Cynic - Re-Traced

Sorti le: 14/05/2010

Par Fanny Layani

Label: Season of Mist

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Cynic est sans doute l’archétype du groupe culte : un premier album en 1993 (Focus), rapidement suivi d’une séparation, alors même que le groupe s’apprêtait à lui enregistrer un successeur. S’en étaient suivies quinze longues années de silence, au cours desquelles des générations de musiciens avaient décortiqué chaque mesure de cet unique disque, avant que la formation ne revienne avec une tournée, suivie d’un Traced in Air aussi salué qu’attendu en 2008. Parti sur la lancée du renouveau, porté par l’enthousiasme soulevé par son retour, Cynic aurait-il déjà remis le couvert ?

Hélas… Re-Traced n’est qu’un « simple » EP qui, à l’exception de « Wheels Within Wheels », ne propose aucune nouveauté. Les fins observateurs l’avaient en effet sans doute déjà compris, il ne s’agit que d’une relecture de quatre titres (« The Space For This », « Evolutionary Sleeper », « King of Those Who Know » et « Integral Birth »). Décevant pour autant ? Non. Car après tout, Cynic reste Cynic, et ne fait donc jamais les choses à moitié, ni comme tout le monde. La troupe de Paul Masvidal et de Sean Reinert propose une véritable re-création autour d’une identité musicale qui reste forte et cohérente, quand bien même les différents morceaux sont ici profondément transfigurés.

« Space » revêt de subtils atours électroniques, tandis que les versions presque acoustiques et intimistes des trois titres suivants dévoilent une dimension émotionnelle inattendue chez les Américains, d’ordinaire plus loués pour leur technique échevelée et leur sens des structures alambiquées que pour leur propension à toucher l’auditeur ! La voix de Paul Masvidal, débarrassée des growls et autres effets robotiques qui la dissimulent d’ordinaire, se présente ici nue, fragile et sensible, et tient un rôle majeur dans cette révélation émotionnelle. Une grande réussite. « Wheels Within Wheels » clôt le disque sur une note plus électrique et plus habituelle, tout en arborant une douceur nouvelle.

Si Re-Traced ne contient que de bien maigres réelles nouveautés, la relecture des titres existants reste très convaincante. Cette facette délicate et pleine d’émotions rappelle, par une étrange association d’idées, les dernières explorations d’Anathema : des ambiances nostalgiques sans être tristes, pour un climat introspectif et confortable qui ne verse jamais dans la déprime. Ce disque moelleux et sensible, heureuse surprise, est bien loin de l’image de robot désincarné qu’évoque souvent Cynic. En espérant à présent ne pas attendre quinze ans avant de pouvoir écouter une éventuelle suite, quelle que soit la voie que le groupe aura choisie.