Yes - 90125

Sorti le: 01/10/2002

Par Greg Filibert

Label: Atlantic Records

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Le parcours de Yes est des plus atypiques : alors que l’on croyait le groupe fini, le voici qui réapparaît, à peine deux ans plus tard ! Les irréductibles Squier et White, après avoir tenté – sans succès – l’aventure XYZ, font la connaissance d’un jeune guitariste sud-africain, nommé Trevor Rabin. De cette rencontre nait un groupe initialement baptisé Cinema. Mais avec l’arrivé de Tony Kaye aux claviers et de Jon Anderson au chant, la reprise du nom de Yes s’imposa naturellement.

Quelle surprise ! Le rock progressif épique et élaboré qui avait fait la popularité du groupe dans les années soixante-dix laisse place à du rock FM. Les fans de la première heure sont choqués et dubitatifs devant un changement aussi radical, que beaucoup considèrent comme opportuniste. Mais il n’empêche que ce nouveau visage possède son charme… Voilà certes un virage vers un style plus consensuel et formaté qui n’est pas des plus aguichants, mais c’est sans compter sur le talent des vétérans et de la nouvelle recrue : le rock FM de Yes est de haute qualité et fait preuve d’efficacité et de raffinement, à commencer par le tube interplanétaire « Owner Of A Lonely Heart ». Outre une ligne de chant immédiate dont le sieur Anderson a le secret et des arrangements de bon goût, le succès viendra d’un riff de guitare complètement accrocheur, unique et identifiable tant par le son que par la forme, qui deviendra l’un des étendards du rock des années quatre-vingt.
Par son style plus moderne que celui de son prédécesseur Steve Howe, le brillant et inventif Trevor Rabin redonne un coup de jeune à un Yes alors en voie de décrépitude. Le timbre cristallin d’Anderson s’adapte très bien à la nouvelle direction musicale, et on reconnaît tout à fait sa griffe dans les chœurs recherchés à la couleur particulière (« Hold On » ou « Leave It »). 90125 s’écoute avec réel plaisir car les titres sont accessibles, vraiment bien construits et, dans l’ensemble, homogènes : les mélodies, le groove, les soli de guitare ou les boucles de synthé hypnotiques reviennent sans cesse en tête après l’écoute de ces neuf titres. L’excellent et distingué « Changes » se détache tout de même du lot avec son introduction trépidante et progressive !

Yes réussit son entrée dans la nouvelle décennie en faisant table rase de son passé. La touche progressive a pratiquement disparu mais le savoir-faire demeure, et le succès est au rendez-vous. Le groupe cherche simplement à vivre avec son temps et au vu de la qualité de 90125, peut-on lui en vouloir ?