Symphony X - The Divine Wings of Tragedy

Sorti le: 15/06/2007

Par Jean-Philippe Haas

Label: InsideOut Music

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En 1994, un groupe de heavy metal « néo-classique » américain, emmené par un guitar hero nommé Michael Romeo livrait son premier album éponyme à un obscur label japonais. Encore très marqué par la guitare d’Yngwie Malmsteen et des harmonies vocales à la Queen, Symphony X constituait pourtant déjà une timide tentative d’émancipation, grâce à de brèves incursions dans le territoire du progressif et la volonté de ne pas faire porter l’intérêt du disque sur la seule virtuosité des musiciens. Fort d’un nouveau chanteur, le groupe – qui a eu le nez incroyablement creux en recrutant Russel Allen – va poursuivre dans cette voie en enregistrant dans la foulée The Damnation Game, mieux produit et bien mieux chanté. En 1996, Symphony X accouche de son premier disque majeur, The Divine Wings of Tragedy, et se voit enfin distribué en Europe l’année suivante.

« Of Sins And Shadows » met clairement les points sur les i dès l’ouverture de l’album : ce sera puissant, imparable, virtuose. Et inutile de chercher un quelconque schéma répétitif sur ce disque, chaque titre apporte une pierre différente à l’édifice. « Out of the Ashes » et « The Witching Hour » lorgnent encore vaguement du côté d’Yngwie Malmsteen et les duels guitare-clavier entre Michael Romeo et Michael Pinella, bien qu’en tous points jouissifs, ne se démarquent que très peu des canons définis par le fanfaron suédois et son Rising Force. Mais ces réminiscences restent mineures en comparaison de l’apport de compositions comme « The Accolade » ou « The Eyes Of Medusa », qui se démarquent très nettement des clichés « néo-classiques » par leur coté respectivement progressif et agressif . Diverses ambiances se succèdent : baroques, moyenâgeuses, épiques, inquiétantes, les thèmes mythologiques chers aux groupe sont omniprésents. Tous ces éléments contribuent à donner à The Divine Wings of Tragedy un style particulier qui définira à long terme celui du groupe.

Mais on ne saurait parler de cet album sans accorder une mention spéciale au morceau-titre, remarquable composition qui recèle en ses vingt minutes autant, voire davantage de facettes que le groupe en a développé sur le reste de l’album. Russel Allen y fait la démonstration des nombreuses nuances de son impressionnant organe (pour vous en convaincre, comparez donc les parties III et V : respect !). De par son timbre unique assez éloigné des clichés du genre, son coffre à faire trembler la pyramide de Kheops et la variété de son chant, Russel Allen démontre qu’il est en voie de devenir intouchable dans sa catégorie. Les sollicitations extérieures dont il fera l’objet par la suite (Star One, Genius, The Battle, …) ne feront que confirmer ce statut.

Après deux premiers albums à la production respectivement fluette et honorable, les américains ont mis cette fois-ci les bouchées doubles : celle de The Divine Wings of Tragedy écrase tout sur son passage tout en restant d’une éblouissante clarté. La section rythmique est énorme, envahissante, la guitare de Romeo omniprésente, tandis que les claviers de Pinella survolent le tout en nappes ou soli furieux. L’originalité de Symphony X tient aussi en cela : aucun des musiciens n’est mis en retrait pour permettre à un autre de prendre la pose et récolter tous les lauriers.

The Divine Wings of Tragedy a défini de nouvelles normes dans un style vieillissant et a permis à Symphony X de distancer aisément tous les groupes de metal « néo-classique » de l’époque. Aucune concurrence sérieuse ne se dessine pour le moment à l’horizon.