Symphony X - V - The New Mythology Suite

Sorti le: 01/10/2002

Par Fanny Layani

Label: InsideOut Music

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Symphony X, comme le vin, varie selon les années… Après un Twilight In Olympus (1998) quelque peu décevant, manifestement écrit et enregistré dans l’urgence, Symphony X se devait de « taper très fort » pour ce qui avait été annoncé comme un « grand retour ». Force est de constater (avec précaution toutefois) que c’est chose faite, avec un concept-album ambitieux et une hargne retrouvée.

Pourtant, des esprits exigeants ne manqueront pas de faire grise mine : le concept développé tout au long des soixante minutes de V se présente comme complexe, mais relève avant tout d’un manichéisme un rien désespérant ; la pochette et les oppositions « conceptuelles » qui sous-tendent toutes les paroles en sont une illustration flagrante. Symphony X mêle ainsi de manière totalement hétéroclite des éléments n’ayant rien à voir les uns avec les autres, dépassant les limites de l’influence et frisant le patchwork. On trouve ainsi pêle-mêle panthéisme (« Evolution »), mythologies (en vrac : égyptienne, grecque et orientales), arrière-plan messianique, etc. le tout saupoudré d’un zeste de science-fiction, H.G. Wells en tête, pour ce qui est de la partition bipolaire de l’humanité (cf. The Time Machine).

Cet aspect « melting pot » sans assimilation se retrouve également dans la musique, qui s’en sort cependant bien mieux. Dissimulant pour quelques mesures ses tentations « néo-classiques à la Malmsteen », le groupe retombe dans certains pièges : passages purement heavy sans grand intérêt, bien qu’efficaces (NdF : et si on ne leur demandait rien d’autre, après tout ?), introduction frappée des mêmes syndromes que Rhapsody (Dawn of Victory) bien que plus « digeste », tendance de Michael Romeo à écraser tout le reste (Allen est encore trop en arrière et ses lignes de voix en-dessous de ce dont il est capable) et fantasme incontrôlé du classique.
Symphony X commet en effet de nouveau une erreur magistrale, plus encore que sur Twilight… où Beethoven avait eu les honneurs. C’est ici le « Lacrimosa » du Requiem de Mozart – qui n’est d’ailleurs jamais cité dans le livret – que le groupe greffe artificiellement, par lambeaux, à un instrumental pourtant excellent et qui n’en demandait pas tant (« The Death Of Balance »). Dommage, tant pour Mozart que pour Symphony X ! Les groupes de metal comprendront-ils un jour qu’ils n’ont de comptes à rendre à personne, ni de caution extérieure à rechercher ? Ce besoin de légitimation intellectuelle et musicale les pousse à réutiliser des textes latins conventionnels (en l’occurrence le « Dies Irae » du texte de la messe des morts) à la va-vite en introduction des albums, et à reprendre hors de propos des poncifs du classique.

Et pourtant, la recette fonctionne et l’auditeur se laisse prendre avec plaisir à un style immédiatement identifiable. On est d’ailleurs parfois à la limite de l’auto-plagiat mais ceci est un autre débat. On retrouve une certaine grandiloquence (« Egypt ») propre au groupe, l’aspect extrêmement virtuose de Michael Romeo ainsi que des passages plus purement metal progressif (« Fallen », « Rediscovery – Part II ») bien plus intéressants, aux rythmiques travaillées sans être trop complexes pour autant.

Malgré ces quelques regrets, cet album n’en est pas moins un must pour les fans et, dans l’absolu, l’un des meilleurs albums de Symphony X à ce jour, à la lutte avec The Divine Wings Of Tragedy. Il ne reste qu’à regretter un certain manque de renouvellement ainsi que ce sempiternel « complexe du classique ». Points ponctuels, certes, mais d’autant plus rageants que l’on sent l’évidence avec laquelle le groupe serait capable de les dépasser, en cessant d’être velléitaire !