Ingranaggi Della Valle - Warm Spaced Blue

Sorti le: 01/05/2017

Par CHFAB

Label: Black Widow Records

Site: https://www.facebook.com/ingranaggidellavalle/

Petit rattrapage, grande claque…

Ingranaggi Della Valle avait déjà fait parler de lui avec sa première parution en 2013. On y découvrait une musique ambitieuse, entre emphase symphonique et jazz rock, servie par des musiciens excellents, la présence d’un violon, le meilleur des sonorités seventies (ceci vaut pour les claviers, ainsi que le visuel de la couverture !), enfin un chanteur à la voix puissante et un lyrisme appuyé. Ce dernier atout avait, soit emporté (pour la majorité), soit divisé. Nous étions plutôt de ces derniers, à considérer que la musique se doit de parler d’elle-même, sans que forcément la voix appuie le sens des paroles, ou tout simplement fasse montre d’une certaine prétention autocomplaisante… Mais c’est une affaire de sensibilité aussi, me direz-vous… Et puis il y a les paradoxes… Genesis, Van Der Graaf… et comment résister ? Bref, quoi qu’il en soit, ce groupe avait autant conquis qu’il suscitait d’espoir.

Voilà que paraît en 2016 son deuxième opus. D’entrée, l’image affichée semble annoncer un propos plus trouble, plus sombre peut être, plus organique… Et le contenu musical qui s’ensuit ne dépareillera pas cette impression. Les premières mesures d’ouverture nous jettent dans un abyme de vertige et d’angoisse instrumentale (The Call For Cthulhu, tout est dit !), pour ensuite assister à un raz de marée, augmentant inexorablement, gorgé d’émotion, et absolument dévastateur… Le musique offre ici une toute nouvelle couleur, rompant véritablement avec l’album précédent. Rio, new jazz, avant-garde semblent bien donner le ton de ce disque, et avec quel brio ! On pense immédiatement à Univers Zero, Anglagard, Areknamès, Seven Impale ou Miriodor (! ! !). On retrouvera Cthulhu à trois reprise, autour duquel s’articulera tout le disque, qui d’ailleurs conclut sur ce même sujet. La suite s’avère absolument brillante, proposant aussi des ambiances moins torturées, et d’une beauté renversante. L’omniprésence vocale du passé a très largement fait place à l’expression instrumentale, pour notre plus grande satisfaction, et lorsque le chant intervient, en anglais, c’est de façon bien plus canalisée et écrite, pour tout dire.

Six plages, de longueur raisonnablement conséquente, constituent le répertoire de Warm Spaced Blue, offrant à l’auditoire de quoi largement en explorer les moindres recoins, tous sans cesse passionnants. L’excellence et la cohésion des musiciens est de mise, charpentée par une section rythmique de feu, ultra groove, et la présence de deux claviéristes (Rhodes, B3, piano, Mellotron M400, M4000, Taurus, Minimoog!). Le combo italien distille des ambiances aux arrangements absolument remarquables, explorant autant la noirceur des mondes que l’extrême luminosité, sans passéisme aucun…Faut-il continuer ?

Essai transformé, transcendé même, pour ce deuxième disque, qui dès la première écoute s’avère indispensable dans toute discothèque, pas seulement progressive. Ingranaggi Della Valle a frappé très fort, se taillant ici une belle place parmi le meilleur des productions venant d’Italie (pays qui, mine de rien, est en train de définir toute une école du renouveau, alliant jazz rock, rio, zeuhl et canterbury). Voici un album absolument hypnotique, et dont on tente, un peu désespérément, de s’empêcher de le laisser tourner en boucle.

Magistral. Un des albums de la décennie.