Zs - New Slaves

Sorti le: 09/08/2010

Par Jérémy Bernadou

Label: The Social Registry

Site:

Ces New-Yorkais commencent à vraiment faire parler d’eux. Adeptes d’une expérimentation sans concession, chacun de leurs albums possède sa propre personnalité. Arms était à ce titre empreint d’une énergie à la fois directe et très calculée. Charlie Looker (l’actuel meneur d’Extra Life) faisait alors partie de la formation et son apport était immédiatement reconnaissable. Depuis son départ du groupe, la sortie de The Hard EP en 2008 laissait présager de bons augures. Cet amalgame de sons de quinze minutes extrêmement complexe était certainement ce qu’ils avaient sorti de mieux.

C’est pourtant avec Music of the Modern White, publié l’an dernier que l’on perçoit nettement plus la nouvelle orientation de Zs. La musique se fait moins rythmique pour se concentrer sur un mélange de timbres, un matériau plus « organique » dans une optique similaire à Glenn Branca. New Slaves concrétise donc cette approche et se permet d’aller jusqu’au bout : l’album est long, riche en sonorités et fatalement très exigeant. Lorsque le rythme s’éloigne, ce sont les boucles de guitares qui dominent, soigneusement cachées derrière une montagne de pédales d’effets. Un titre comme « Don’t Touch Me » tire dès lors plus sa force de la performance réalisée que de la structure ou de la composition en elle-même. Zs désarçonne en permanence son auditeur, lui fait perdre tous ses repères, pour se retrouver quelque part entre le harsh noise et le free-jazz…

Tout cela est loin d’être sans intérêt ! La démarche est éminemment nombriliste, dans le sens où le groupe se positionne au cœur de la scène underground « artie » new-yorkaise. L’autoparodie n’est jamais très éloignée et il faut bien reconnaître que cet édifice élitiste tient debout. Imposant du haut de ses vingt minutes, « New Slaves » fait apparaître un développement à la richesse certaine. Les souvenirs de The Hard EP ressurgissent, l’ensemble devient épileptique, mais aussi plus intelligible.

Une musique mouvante qui se cherche sans arrêt et qui parvient ainsi à évoluer peu à peu, dans le même esprit que la musique minimaliste « historique » (Steve Reich, Terry Riley, etc.). À ne pas mettre entre toutes les oreilles, néanmoins. Visiblement, le pressage double LP de l’album ne se termine jamais : le sillon du vinyle se referme sur lui-même, laissant raisonner les derniers instants du disque dans une boucle infinie… à la manière du Metal Machine Music de Lou Reed. Ça ne s’invente pas.