Panzerballett - Starke Stücke

Sorti le: 24/03/2008

Par Jean-Philippe Haas

Label: ACT Music

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Panzerballet. Un nom empreint de légèreté qui évoque des images chamarrées d’artillerie lourde et de rouleaux compresseurs en tutus, de pluie d’obus sautillants dans une brise tiède et printanière. De quoi démotiver l’amateur potentiel qui s’était laissé dire – mais sans doute aura-t-il mal entendu – que ces Germains de Münich délivrent une fusion instrumentale inédite où un metal lourd et savant se laisse indécemment chevaucher par un fougueux saxophone. Dépassant le préjugé patronymique, Progressia avait été séduit en 2006 par cette recette originale qui fit de Panzerballett un remarquable coup d’essai autoproduit. Signé depuis et contre toute attente sur le dynamique label allemand de jazz ACT Music (havre notamment du Esbjörn Svensson Trio), Panzerballett repart en guerre armé d’un Starke Stücke qui restaure sensiblement l’équilibre des forces en présence.

Très loin d’être un simple album de reprises comme peut le laisser supposer la liste des titres, Starke Stücke est composé d’une part de matériel original dans la lignée du premier album et d’autre part de reprises non moins originales rendant hommage entre autres à des classiques du hard rock. Panzerballett joue le contrepied et prend ainsi de très nombreuses libertés par rapport aux versions originales, soit en les passant sur un gril incandescent, soit en leur donnant au contraire une patine purement jazz, à tel point qu’il n’est pas aisé parfois de les reconnaître ! Ainsi, le grand classique de Weather Report, « Birdland » n’est pas le moins méconnaissable, tout gonflé qu’il est aux stéroïdes anabolisants, tout comme le « Paranoid » de Black Sabbath, réarrangé en ballade mélancolique.

Quant aux compositions du groupe, elles confirment tout simplement l’impression laissée par l’album éponyme : l’amour en apparence impossible entre un saxophone et un riff dévastateur est ici rendu possible, le mariage peut-être célébré, le bonheur et les nombreux enfants sont à portée de main. La complémentarité des jeunes époux saute aux yeux, l’un apportant au couple vie, chaleur, couleurs, et l’autre force motrice, protection rassurante.
Et contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, Panzerballet ne se prend pas au sérieux, maniant humour et autodérision avec une certaine dextérité. Alors que « Mit Weißglühendem Morgenstern In Ommas Frischgebackene Rüblitorte » (traduction non fournie, n’insistez pas) ne nécessite pas d’autre commentaire, « Friede, Freude, Fußball » mêle les jazzouillis métalliques à l’ambiance surchauffée d’un match du Bayern. Quant à « Zickenterror », les non germanophones eux-mêmes réfréneront difficilement un fou rire à l’écoute de cette version revisitée et mise en paroles d’un titre figurant déjà sur Panzerballett.

Starke Stücke réussit ce que peu d’albums sont capables de réaliser à l’heure actuelle : marquer par son originalité sans presque rien devoir à personne. La symbiose quasi-parfaite réalisée ici semble tellement naturelle qu’elle parvient à faire oublier ses composantes. Reste à espérer qu’elle séduira le plus grand nombre.