Marillion - An Hour Before It's Dark

Sorti le: 04/03/2022

Par Florent Canepa

Label: Ear Music

Site: https://www.marillion.com

Lorsqu’il s’agit de s’attaquer au nouveau cadeau musical du pygmalion progressif que représente Marillion, c’est un mélange d’excitation et d’appréhension qui s’installe. Si la discographie impressionnante du groupe révèle des chefs d’œuvre tout autant que des livraisons plus anecdotiques, nous ne sommes jamais à l’abri, tel un bon vin, d’avoir à la bouche un millésime. Ce n’était pas le cas du récent F.E.A.R. qui malgré ses thèmes mordants et sa soif d’expérimentations, n’avait pas tutoyé le sublime.

An Hour Before It’s Dark, malgré ses titres à tiroir, est finalement plus facile à appréhender. Si la production est relativement sage et s’installe confortablement dans les mediums, deux éléments forts alimentent l’envie d’approfondir. Tout d’abord les textes, très en résonance avec les différents sujets d’actualité que ce soit sur le sujet de la mort et de l’intelligence artificielle (« Reprogram the Gene »), la fin de vie (« Cure ») ou encore les conditions sanitaires (« Murder Machines »). Autant de pamphlets que Steve Hogarth nous conte avec conviction, avec, parfois, un aspect éraillé (et quasi grunge… en tous cas pour Marillion) qu’on lui connaissait moins. Les chœurs thaumaturgiques viennent appuyer le propos (« Angels on Earth »). L’autre élément, c’est d’avoir su éviter l’académisme malgré un propos musical qui ne se renouvelle pas en profondeur, voire s’aseptise un peu (la jolie ballade « The Crow and the Nightingale », plus proche de l’univers de Tori Amos ou David Sylvian). Il faut bien le concéder, c’est lorsque le groupe frappe avec ses mélodies bien assises, rappelant les hautes heures de Season’s End, que les Anglais sont les plus efficaces (« Be Hard on Yourself », en peloton de tête, revigoré par ses variations rythmiques ou « Murder Machines »). Steve Rothery est peut-être celui qui offre le plus de stabilité dans cet écosystème et on peut du coup lui reprocher une approche un peu trop conventionnelle (à cet égard, le solo de « Every Cell » en mode Gilmour qui baille ou les très ordinaires parties d' »Invicible »).

Au cœur du dispositif, évidemment, et c’est bien dommage, l’auditeur vit des moments plus dispensables même si bien fabriqués (le planplan « Sierra Leone » qui ne décolle jamais vraiment et auquel on préférera largement le final « Care », qui groove aussi bien qu’il plane). Une sorte d’entre-deux donc, même si on peut saluer l’authenticité toujours très caractéristique de la démarche et la clarté du propos qui nous permet d’apprivoiser l’album et d’y trouver du plaisir très vite (à l’opposé, par exemple, du dernier album des comparses suédois The Flower Kings). Une demi réussite chez Marillion, c’est souvent beaucoup mieux que d’autres donc on ne va pas non plus leur faire trop de reproches !