Tormenta - La ligne âpre

Sorti le: 08/02/2011

Par Mathieu Carré

Label: Africantape

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Rarement titre d’album aura autant titillé le carabin qui sommeille en chaque auditeur, mais également décrit avec un tel à-propos la musique qu’il précède. Car si au sens médical du terme la ligne âpre, saillie osseuse de la face postérieure du fémur, représente une zone de tensions multiples sur laquelle s’insèrent tendons et ligaments, il en est de même du disque homonyme de Tormenta. Ici guitares et batterie se lient et s’enchevêtrent, se frottent ou s’affrontent en harmonie, telles la chair et l’os au service du mouvement parfait.

Compactes et musculeuses, les compositions du groupe sont à l’image de celui-ci. Vincent Beysselance, le fantastique batteur de feu Cheval de Frise et le guitariste Jeff Grimal (soutenu en studio par Esteban Rodière) semblent avoir pensé chaque seconde, chaque sursaut d’une musique qui transcende tous les genres du rock instrumental. Tirant parfois du côté de la violence et du caniveau, Tormenta rappelle alors Car Bomb et ses excès en tous genres, mais grâce à une extrême précision d’écriture, ses membres parviennent toujours à maintenir cette furie à leur service (« La sensation de membre fantôme »).

Inversement, quand ils abordent le versant le plus cérébral de leur art et donnent un peu d’espace et d’oxygène aux ambiances plutôt qu’au chaos, Beysselance et Grimal laissent une sourde tension s’installer et diriger en sous-main les opérations. De la première à la dernière seconde, ils rejettent toute facilité, ne s’octroient aucun temps mort et en une grosse demi-heure en disent autant que beaucoup en une heure, ou plus.

Quasiment un an après l’excellent deuxième album de Marvin, Africantape confirme son statut de label d’exception et de découvreur de vrais talents. Véritable brûlot de rock intelligent délivré sans préavis, La Ligne âpre s’installe instantanément comme l’un des disques majeurs d’une année 2011 qui ne fait pourtant que commencer.