Nemo

25/10/2008

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Par Jérôme Walczak

Photos:

Site du groupe :

CONCERT : NEMO

 

Artistes : Bobby Watson, Rosa Luxemburg, Nemo
Lieu : Paris, La Scène Bastille
Date : 29 septembre 2008
Photos : Chris CB Photographie (http://www.chriscb.org)

Une nouvelle salve de rock du côté de Bastille. Le Prog Rock Fest : un petit arrêt sur image, un appui sur pause sur ce qui constitue le prog’ français aujourd’hui. Le bilan demeure mitigé, malgré des performances évidentes et un talent qui ne se dément pas.

La salle est bien clairsemée en cette fraîche soirée d’automne. Les organisateurs de la Scène Bastille prennent des initiatives heureuses : rentabiliser durant le week-end et permettre ainsi à des artistes sans doute moins connus de venir s’essayer à la scène en semaine. Le jeu de tout festival, c’est d’en proposer pour tous les goûts, et ce manque d’unité est de plus en plus flagrant aujourd’hui. Une palette, certes, a besoin de couleurs multiples pour que soit figurée une œuvre agréable mais il ne faut pas pour autant en oublier la synthèse. Et c’est à une série de camaïeux hermétiques auxquels nous avons assisté, alors que nous attendions (sans doute trop ?) un dégradé, une harmonie.

Prog Rock Fest : sans doute un nom qui suscite l’attente ? Le public est avant tout celui de l’un des trois groupes : des amis, des amateurs éclairés, ou encore de quelques chroniqueurs épuisés ; ce n’est pas (plus) le public d’un genre. On peut certes le déplorer, pleurnicher sur ce qu’aurait dû ou devrait être le rock progressif. Nous sommes en 2008, cette musique est devenue confidentielle, le public passablement désargenté, et le prog’ n’a plus grand-chose à donner au monde, en terme de joie, de fête, d’amusements et de rêverie. Les trois groupes de ce soir-là reflètent assez bien ce constat, amer mais réaliste.

Tout commence par de la technique, par une hypertechnicité même avec Bobby Watson, un groupe du Havre, qui s’essaie avec brio à des reprises de Dream Theater. La voix d’Elodie donne une dimension sympathique à tous ces tubes égrainés les uns après les autres. Le sens de la scène est bel et bien présent, une empathie entre les divers protagonistes fait même plaisir à voir, l’auditoire demeure courtois, malgré quelques tentatives pour le remuer un peu. A vue de nez, un bon tiers de la salle ne connaît pas les hits de la bande à James LaBrie. Le public s’étoffe mollement, passablement forcé tout de même. Petit bilan de cette introduction : c’est carré mais il manque cette petite chose si indéfinissable et qui faisait tant frémir nos oreilles adolescentes : la magie. Celle qui nous emporte dans un tourbillon d’émotions, de rêveries est demeurée absente, tout comme ces instants où on se surprenait à fermer les yeux et à partir en vrille, comme ça, pour rien, avec en tête la simple joie de goûter l’instant présent. La salle, invitée à frapper dans ses mains, s’y livre de bonne grâce et salue, tranquillement, ceux qui demeurent un bien joli groupe d’artistes qui doit encore grandir pour nous faire partager sa passion.

Arrivent donc les hôtes : Rosa Luxemburg, principaux protagonistes de ce festival. Des Parisiens à l’aise sur scène, pleins d’humour, qui ne se prennent pas au sérieux et savent placer une ambiance. La scénographie, les reprises de Genesis, les petites allusions comiques, les bonbons jetés dans le public (un peu plus dense semble-t-il), tout cela contribue à se laisser un peu porter. La musique est nette, maîtrisée, souffrant sans doute elle aussi d’une absence de mélodies mais l’ensemble passe sans trop d’emcombres ; pendant toute la session, on ne peut s’empêcher de penser à la voix de Muriel Moreno et aux compositions de Niagara, et de fait, la nostalgie revient tranquillement au grand galop… Le public est aux anges, un triomphe. Leur musique ? Un rock musclé, mâtiné d’élans techniques, de parodies, d’improvisations, de dialogues entre guitares. Le béotien, celui qui s’attache à écouter des chansons avant de regarder quelle est la marque de la pédale ou celle de la basse en a pour ses frais. Le soufflé se relève légèrement et la soirée s’annonce réussie.

Nemo, en compagnie d’un tout nouveau guitariste, vient ainsi récolter les moissons de ce qui a été semé. Si Jean-Pierre Louveton est peut-être un peu plus fatigué que d’habitude, tout est cependant et aisément corrigé par les compositions, notamment quelques exclusivités tout droit sorties de Barbares, le nouvel album à venir prochainement, qui rendent la salle tout acquise et extatique. Les titres s’alternent, entre prouesses guitaristiques, petites pointes d’humour, clin d’œil et moments plus intenses en terme d’émotions.

En dressant le bilan, ce festival de rock progressif ne pouvait pas décevoir. Le public savait ce qu’il venait voir, et comme face à un écran d’ordinateur ou une télévision, il a zappé, choisi et sélectionné parmi une offre variée, mais un tantinet morose. D’accord, le prog’ de grand papa est terminé, oui les temps ont changé, c’est vrai, l’industrie du disque n’est plus la même et les petits groupes doivent travailler dur pour se forger une reconnaissance qui restera de toute manière très confidentielle… Mais de grâce, n’oublions pas notre histoire, n’oublions pas de sourire un peu, le talent ne se mesure pas en s’éreintant sur une guitare ou en réussissant un accord à la basse. Le but est d’embarquer le public vers un ailleurs dont seuls les artistes ont le secret et qui manqua, ce soir d’automne 2008, quelque part dans le XIème arrondissement…

Jérôme Walczak

site web Bobby Watson : http://www.myspace.com/bobbywatsonprog
site web Rosa Luxembourg : http://www.rosaluxemburg.com
site web Nemo : http://nemo.web.free.fr/

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