John Zorn - The Dreamers

Sorti le: 14/04/2008

Par Aleksandr Lézy

Label: Tzadik / Orkhestra

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John Zorn n’en est plus à son coup d’essai. Pour lui, arriver à jongler entre tous ses projets relève de la performance, mais pour nous, pauvres pêcheurs, c’est parfois plus difficile. Réussir à discerner dans l’ensemble de sa discographie si hétéroclite ce qui conviendra ou plaira à notre propre écoute demande du temps et de la patience, investissement nécessaire pour éviter de finir enseveli sous une montagne de disques qui ressemblerait plus à du fanatisme ou de la collectionnite aiguë qu’à une véritable admiration artistique globale. 2008 se voit déjà bien accaparée par le saxophoniste, puisqu’en dehors de la sortie de ce The Dreamers, il occupera tel un conquérant la Cité de la Musique à Paris durant une semaine au mois de juin, avec sa clique de fidèles généraux.

Parmi la multitude de styles abordés par Zorn se trouve ce que l’on appelle communément l’easy-listening : des morceaux simples, tournant autour d’une unique idée, facile à retenir et fredonner, permettant à l’auditeur de reposer ses petites oreilles fragiles au son de douces mélodies. Dans The Dreamers, Zorn, accompagné de Joey Baron, Marc Ribot ou encore Cyro Baptista pour ne citer qu’eux – membres de l’Electric Masada, comme son nom l’indique, branche électrique de son fameux groupe Masada – expose sa vision de la surf-music (« Mow-Mow » ou « Exodus »), du jazz élémentaire (« A Ride on Cottonfair »), du rock psychédélique (« Mystic Circles ») ou bien encore du klezmer moderne (« Toys » ou « Nekashim »). On notera aussi, aisément, l’étrange ressemblance d’« Anulikwutsayl » avec « The Torture Never Stops » de Frank Zappa. Il poursuit ainsi ce qu’il avait entrepris en 2001 avec The Gift : un tiroir fourre-tout à l’opposée de ses complexes pièces contemporaines (The String Quartets) ou bien de ses groupes « arrache-tympans » Naked City et Painkiller.
Durant un peu plus de cinquante minutes, les morceaux défilent sans se ressembler dans une joyeuse ambiance. Certes, tout ce beau monde joue fort bien et la production est propre et bien réalisée, mais malheureusement, elle est tellement aseptisée qu’elle en devient identique sur chaque morceau quel que soit le style abordé. Mais peu importe, car de toute manière, ce disque n’est pas de ceux pour lesquels on se creuse les méninges : il s’agit de le mettre dans la platine pour dîner entre amis ou se reposer, allongé dans un transat.

Si The Dreamers, aux émotions éphémères, illustre l’une des nombreuses facettes de l’incroyable John Zorn, il ne reflète en rien son génie. Voici un énième disque qui n’apporte rien à sa gigantesque et si admirable discographie. Un plaisir de plus pour le musicien et compositeur, une légère déception pour l’auditeur convaincu.