Snake Oil – Snake Oil

ENTRETIEN : SNAKE OIL

  Origine : France
Style : Jazz/Rock
Formé en : 2004
Composition :
Boris Blanchet – sax ténor & soprano
Daniel Jeand’heur – batterie
James MacGaw – guitare, bruits divers
Romain Massini – piano fender rhodes
Greg Théveniau – basse
Dernier album : Uppercut Attitude (2008)

Avec la sortie de son second album Uppercut Attitude, la formation Snake Oil nous prouve qu’elle a tout des plus grands. L’idée de proposer deux disques présentant chacun une facette particulière de leur musique au travers de nouvelles compositions (un disque en studio suivi d’un enregistrement live) permet à l’auditeur de découvrir l’étendue des talents de ces musiciens agréables et motivés.

Progressia : D’où vient le nom Snake Oil ?
Daniel Jeand’heur : C’est le nom d’un morceau de l’un des bassistes du Tony Williams Lifetime et aussi une manière de présenter ce qu’est cette formation : un laboratoire d’expériences d’où sortent parfois des potions dangereusement dynamiques ! Ce peut être une « médecine » pour certains ou bien déranger fortement. Les portes sont grandes ouvertes.

Vous avez une solide expérience musicale et êtes issus de milieux différents. Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Le Crescent Jazz Club et la Cave à Musique de Mâcon avaient besoin d’une première partie pour un concert de RDL (NdlR : le groupe Radio Désastre de Lyon). J’avais envie depuis un certain temps de monter une formation électrique puisant dans de multiples influences jazz, sans retomber dans l’exercice de style des « néo-bopeurs ». De plus, c’était une manière de jouer la musique du grand Tony Williams, et de lui rendre hommage. Je connaissais Romain depuis quelque temps et il m’a présenté Greg. Dès la première répétition, la pâte a pris et nous avons commencé par monter un medley du Bitches Brew de Miles Davis et très vite des morceaux écrits pour l’occasion. Quelques semaines plus tard, Boris Blanchet nous a rejoints et s’est impliqué totalement dans le projet. Nous avons sorti deux enregistrements pour les amis puis un album Doustrian Dance autoproduit. Les retours favorables à propos de ce CD nous ont décidés à nous ateler à un projet plus large, plus mûr, plus écrit. J’ai appelé James (NdlR : guitariste – entre autres – de Magma et de One Shot) car il nous manquait un « son », un lien harmonique pour faire sonner la machine. Il a tout de suite accepté et a intégré le groupe une semaine avant l’enregistrement du second volume d’Uppercut Attitude.

Vous participez tous à de nombreux projets parallèles. Comment faites-vous pour concilier ces différentes expériences musicales ?
Toutes nos expériences musicales nous servent à nourrir le répertoire de Snake Oil. La pratique de styles différents nous permet de nous aventurer plus loin et de ne pas nous enfermer. Cela nous conduit aussi à prendre beaucoup de risques et à accepter nos erreurs, à nous en servir comme des tremplins… Dans cet orchestre, nous travaillons à nous libérer des préjugés, des idées toutes faites sur la pratique et le développement d’un thème, d’une structure et bien entendu, d’un chorus. C’est un travail lent qui demande de l’investissement et de la patience. Tous les musiciens du groupe vivent de la musique ce qui, dans les circonstances actuelles, nous demande une grande implication et un don presque généreux de notre temps. Comme le dit Greg : « Il faut faire le métier !!! ».

Pourquoi avoir choisi de sortir un double album comprenant un disque studio et un live ? Etait-ce votre idée de départ ?
Oui et non ! Au départ il ne devait y avoir qu’un seul CD mais nous nous sommes rendu compte qu’il n’y avait pas la place sur une « galette » pour tout sortir… Nous avons décidé d’enregistrer la suite des morceaux live en intégrant James. Nous pensons également que cette musique va évoluer et que ces enregistrements ne représentent qu’un moment d’un parcours musical. Le fait de donner deux versions du son du groupe me paraît essentiel par rapport à notre démarche d’improvisation ; cela permet de mieux s’imprégner du climat général du groupe et de sa démarche.

Aviez-vous une idée de l’orientation artistique de Uppercut Attitude au début de son élaboration ?
Oui, les morceaux, pour la plupart, ont été écrits deux ans auparavant et ont été joués sur scène. Pour information : nous avons assez de musique pour la suite….

Êtes-vous satisfaits du résultat ?
Oui, très satisfaits !!!

Comment se déroule l’écriture des morceaux ?
Nous écrivons à la maison et faisons ensuite le montage ensemble. Parfois, il y a un travail en petit comité pour finaliser des arrangements. Chaque membre du groupe amène du matériel dans les idées proposées. Il est très important que chacun se sente en confiance, les arrangements évoluent ainsi au fur et à mesure de la pratique des morceaux. Pour ma part, j’ai apporté cette fois des thèmes et des structures plus écrites que pour Doustrian Dance.

Comment s’est passée l’intégration de James Mac Gaw ?
Bien, merci ! Aussi bien musicalement qu’humainement, James est en or ! Ce n’est pas compliqué d’intégrer une telle personne ! Et puis on avait bossé ensemble sur d’autres projets.

Pourquoi ce dernier apparaît-il seulement sur le disque enregistré en concert ?
Car auparavant nous n’avions sans doute pas besoin d’un cinquième élément !
James Mac Gaw : C’est parce que j’étais puni !

Vous développez une musique de plus en plus rock. D’où vient cette volonté ?
Daniel : Parce que nous aimons tous profondément « ça » et puis les effets utilisés font indéniablement penser à des groupes de rock, mais aussi de jazz et de musiques inclassables comme la musique de Frank Zappa, Magma ou bien d’autres. On n’a pas voulu spécialement changer les sons, c’est venu à nous comme une chose indispensable et évidente. Nous avons tellement d’influences ! Et puis du rock dans la sauce de serpent c’est bien non ? En tout cas, nous, on aime bien !
James : Et parce que le jazz c’est dur, et on a pas notre permis-jazz… On pourrait se faire arrêter !

Quelle place donnez-vous à l’improvisation dans votre musique ?
Daniel : Une place de choix !
James : Et inversement. Cela reste un mystère.

Comment arrivez-vous à conserver la cohérence des titres, compte tenu des différences artistiques de chaque musicien ?
Greg Théveniau : On se bat ! Mais non… Dans ce groupe presque personne n’est utilisé comme d’habitude (parfois même on frôle le contre-emploi !). Tout le monde a fait un pas vers l’inconnu, puis nous avons trouvé un langage commun, nous le développons ensemble, nous parlons beaucoup aussi. Nous jouons tous d’une manière particulière pour Snake Oil…

Quel est votre point de vue sur la scène jazz actuelle ?
Daniel : Plein de choses se passent et beaucoup de très bons et jeunes musiciens arrivent, malheureusement nous n’avons pas l’occasion d’assister à beaucoup de créations faute de lieux d’accueil. Il y a beaucoup de projets vraiment furieux qui restent dans l’ombre… J’espère que cela va pouvoir se débloquer, autrement : « risque de cancer des musiques libres ».

Et quelles sont vos influences hors du jazz ?
J’aime toutes les musiques !!!
Greg : Funk, rock, salsa (je viens des îles !!!) , musiques traditionnelles, musique classique…
James : Les femmes et la physique quantique (NdlR : Bien trouvé !).

Un dernier mot pour les lecteurs de Progressia ?
Daniel : Allez le plus possible découvrir les musiciens sur scène, faites attention à la télévision !!! Pour moi, il n’y a que deux catégories de gens : les curieux et les morts–vivants : restez curieux !!!
James : Jetez votre télévision !

Propos recueillis par Jérémy Bernadou

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