Upsilon Acrux - Galapagos Momentum

Sorti le: 09/10/2007

Par Aleksandr Lézy

Label: Cuneiform Records / Orkhestra

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Upsilon Acrux n’est pas un inconnu de la scène brutal prog. Il en est même un des fers de lance avec The Flying Luttenbachers, Ahleuchatistas, Orthrelm, Hella, Yowie ou Zs. Pourtant, difficile de dire qu’il existe un large public pour ce genre de groupes indéniablement intéressants. Aujourd’hui signés chez Cuneiform Records, les quatre Californiens sortent à notre connaissance leur troisième album, Galapagos Momentum, après Last Train Out de 2001 et Volucris Avis Dirae-Arum de 2004. Certains prétendent que c’est leur cinquième… Qu’ils nous les montrent !

Emprunt de rock progressif ainsi que de post punk, Upsilon Acrux a énormément évolué, non pas stylistiquement mais qualitativement. Si les albums précédents étaient déjà fort sympathiques, il apparaissait des failles de production qui, même si elles correspondaient à des valeurs propres au genre, les desservaient. Voilà ce qui a changé : fini le son sale qui donne l’impression que c’est enregistré en direct dans la cave. La production est ici très nette malgré cet imbroglio de notes. Les effets ressortent avec beaucoup de finesse et chacun à la place de s’exprimer dans un espace ouvert. Finis aussi – et c’est un bien – les horribles sons électroniques, grinçants et stridents mis un peu partout sans réel sens. On a maintenant affaire à un groupe d’un grand professionnalisme musical. Leur musique était déjà très complexe et travaillée mais avec Galapos Momentum, on atteint des sommets de perfection instrumentale. Rappelons tout de même que ce genre évite le chant et que les groupes sont souvent composés d’une ou deux batteries ainsi que de deux guitares, une basse voire parfois des cuivres.

Upsilon Acrux se rapproche dorénavant plus du rock progressif en terme de sonorités que du free jazz ou du post punk qu’auparavant. C’est pourtant toujours la même musique, même si on sent sur cet album un gros effort de mélodies dans un tourbillon rythmique. Beaucoup plus complexe qu’avant, leur musique est pourtant bien plus « audible » sur ce nouvel album. Tout est y frénétique avec parfois des passages plus calmes, relativement. On ressent nettement cette envie de créer des mélodies, du sens, même si ces mélodies ne sont pas communes. Les polyrythmies sont effrayantes de difficulté à la batterie (Jesse Appelhans), les notes de guitares de Paul Lai et de Braden Miller s’enchevêtrent avec brio et rappellent, c’est amusant de le constater, les affolantes mélodies de Steve Howe, le fameux guitariste de Yes sur le morceau « Gates of Delirium » de l’album Relayer. Les dissonances sont au rendez-vous avec pas mal d’intervalles de seconde ou de sixte, ainsi que la technique du tapping au son clair. La saturation fait office d’effet et non de matière première pour créer du punch. Quant à la basse d’Eric Kiersnowski, ronde et dynamique, elle inflige une sacrée dose de force et d’énergie à l’ensemble.

Les gars de San Diego délivrent un album époustouflant, où chaque seconde et chaque riff est une explosion de sonorités, de rythmes et de notes. Chacun des dix morceaux plus ou moins longs renferme son lot de surprise, foisonnant d’idées, avec pourtant toujours le même principe de « déconstruction construite » et de frénésie intense. Intelligente et originale, les amateurs de rock progressif en manque de sensations fortes seront émerveillés par tant de puissance. Upsilon Acrux, où comment reproduire de façon écrite et maîtrisée, la démence improvisée d’Ornette Coleman, avec des mélodies.