Alain Blesing - Songs from the Beginning

Sorti le: 15/08/2007

Par Jérôme Walczak

Label: Musea

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La démarche d’Alain Blesing doit être saluée. Il fait pénétrer dans un univers quasi-géométrique, où chaque note, chaque partie de voix ou de guitare trouve une juste place, toujours cohérente, et, c’est louable, jamais démonstrative malgré une haute technicité de l’écriture. Il n’en demeure pas moins que le plaisir est là, tant les reprises proposées ici prennent un coup de neuf et sont revisitées avec conscience, avec tact, pour délivrer toutes leurs qualités sous ces nouveaux atours. Blesing manœuvre comme un parfumeur, en travaillant chacun des morceaux – enregistrés lors d’une séance live au Triton – en espérant délivrer une fragrance parfaite, après avoir subtilement dosé les interventions de chaque instrument.

Le titre de l’album est éloquent : il s’agit bien de revenir à la source, et de faire partager à un auditeur éclairé (le défaut du disque réside peut-être d’ailleurs dans ce côté un peu abrupt) les titres emblématiques d’un horizon progressif resté dans l’ombre de noms tels que Genesis, Yes ou Pink Floyd, alors hégémoniques. Blesing tire l’auditeur vers l’autre versant de cette montagne magique, vers des contrées plus jazz, plus rock, et il vient confirmer ce qu’on savait déjà : le rock progressif n’est pas un style en soi, mais une démarche d’innovations, de changements, de renouvellements constants.
C’est dans ce mouvement perpétuel que Blesing fait pénétrer dès les premières écoutes. Soft Machine, Led Zeppelin, The Who, King Crimson, pour citer les noms les plus évocateurs, sont ainsi invoqués, dans des ambiances de club de jazz. Blesing n’a pas l’œil rivé à sa montre, et il échappe à toute forme de convention, en se laissant aller au plaisir des improvisations. L’auditeur erre, avec lui, dans le jazz le plus épuré, synthétique au possible, où la basse et la guitare viennent faire partager de somptueuses émotions, entre le psychédélique (« Slightly all the Time », rehaussé par la voix folle de John Greaves), les méditations pianistiques (« Beautiful as the Moon ») et le blues (« Mumps »).

Ce disque intéressera les amateurs de jazz, mais il saura aussi séduire ceux qui aiment qu’on déplace les lignes, qu’on se réapproprie les œuvres. Les reprises de King Crimson ou des Who valent largement le déplacement, et même sans bien connaître ces groupes, on prend un vrai plaisir à l’écoute, et, qui sait, on se prend à se dire qu’il serait bon de se replonger dans les originaux. Il n’est jamais trop tard pour bien faire.