Antimatter - Leaving Eden

Sorti le: 19/05/2007

Par Djul

Label: Prophecy Production

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Orphelin de son partenaire sur ce duo qu’était Antimatter, Mick Moss a décidé de faire de ce groupe commun avec Duncan Patterson un projet solo. L’ancien bassiste d’Anathema a en effet décidé de quitter l’aventure pour mener sa barque vers un autre port, celui d’Ion. Adieu donc au principal compositeur d’une des oeuvres majeures du rock atmosphérique des années 1990, à savoir Alternative 4, mais pas à Antimatter, qui survit à ce départ.

Une mésaventure banale dans la vie d’un musicien, mais qui a visiblement encore plus déprimé Mick Moss, si cela était possible. Ce Leaving Eden sent la solitude comme rarement, et son auteur se mue en homme orchestre, puisqu’on le retrouve au chant, aux guitares et aux claviers. Seuls quelques invités, dont Danny Cavanagh, d’Anathema justement, viennent prêter leurs talents, notamment pour la section rythmique. Le résultat de cette introspection était prévisible : Antimatter s’écarte assez nettement des expérimentations presque trip hop de l’excellent Lights Out (2003) et de l’incartade acoustique que constituait Planetary Confinement (2005).

Peu de tempos électroniques ni de samples, plus de chant féminin, Antimatter revient aux basiques du rock guitare-basse-batterie et donc à une certaine forme de simplicité. En « contrepartie », Antimatter révèle une nouvelle personnalité, celle de son seul auteur, qui, s’il ne partage plus grand chose avec ses musiciens, offre en revanche beaucoup à ses auditeurs. Mick Moss se révèle ainsi, notamment au chant, avec une voix profonde mais qui monte désormais beaucoup plus haut, pour un résultat qui fait assez souvent penser à Eddie Vedder de Pearl Jam. Et puisque la musique d’Antimatter est toujours aussi empathique mais plus électrique, le final de « Redemption », par exemple, n’aurait pas dépareillé sur le sublime Ten des rockeurs de Seattle. A la différence près, et cela n’est pas négligeable, que ces derniers n’utilisent pas de piano électrique ou de violons pour développer des atmosphères mortuaires (« Another Face in the Window », dont la première partie aux sonorités proches du « House of the Holy » de Led Zeppelin ferait pourtant passer celle-ci pour un jingle publicitaire). Les guitares bruyantes qui déchirent souvent les débuts cotonneux des chansons du disque sont clairement l’œuvre de Danny Cavanagh, avec lequel Moss partage souvent la scène pour des prestations acoustiques (comme à la Scène Bastille l’an dernier). On retrouve aussi tous les points communs entre ce dernier et David Gilmour, notamment sur les magnifiques solos plaintifs qui illumine le disque.

Leaving Eden a le défaut de ses qualités, car s’il est dotée d’une vraie personnalité, celle-ci n’a pas mille facettes et le disque reste très monolithique dans son approche (pessimiste !) et dans sa couleur (noire !). Deux morceaux instrumentaux (dont le magnifique « Landlocked », et deux autres acoustiques, viennent cependant utilement casser la « rengaine » de cette approche. Et il est surtout difficile de ne pas s’incliner devant tant de savoir-faire de composition et tout simplement de talent à l’état brut, un talent dont on pourrait presque penser qu’il avait été en partie occulté par celui de Patterson. Désormais maître à bord, Mick Moss n’a probablement pas fini de surprendre et d’émouvoir son public.