Ten Jinn - Alone

Sorti le: 09/06/2004

Par Djul

Label: Heaven Record

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Groupe formé d’Américains et d’un leader suédois, John Paul Strauss, Ten Jinn s’était fait un nom dans le petit monde du progressif avec son deuxième album, As On A Darkling Plain , et son premier morceau, longue suite de près de quarante minutes, inspirée d’un roman d’Ann Rice, sur lequel Stan Whitaker, guitariste de Happy The Man, faisait une apparition. Quatre ans et un changement de label (d’Inside Out à Heaven Record) plus tard, le groupe revient présenter Alone , doté d’une orientation musicale radicalement nouvelle.

Venant d’un style progressif complexe et épique, Ten Jinn a en effet désormais plus à voir avec Saga ou Enchant qu’avec Spock’s Beard. Et encore, on pourrait aller plus loin en se demandant même si le qualificatif souvent galvaudé de « progressif » vaut encore pour le groupe : avec des titres courts (six minutes au maximum) et très portés sur la guitare et la voix, Strauss propose un album de rock américain sophistiqué mais extrêmement accessible. Ainsi, seuls les arrangements de claviers, les chœurs sur les voix et des rythmiques parfois plus inventives, permettent encore d’inclure Ten Jinn dans le genre.
La voix de Strauss fait immédiatement penser à celle de Michael Sadler (Saga), tant par sa tessiture que par son interprétation maniérée, bien qu’il soit moins performant quand il monte dans les aigus. C’est d’ailleurs à cette occasion qu’il se rapproche d’une autre star de la chanson… Véronique Sanson ! En effet, lorsqu’il pousse sa voix, il émet avec sa gorge une sorte de roulement grave, véritable marque de fabrique de l’interprète de « Besoin de Personne » ! Sur le plan musical, Ten Jinn délivre un rock efficace, sur des tempos souvent peu enlevés, à la manière des premiers Enchant (« Goodbye My Love » et son mélange de sons acoustiques et de claviers planants, ou « Never Ending Love »). Les claviers de Bob Niemeyer sont mis à contribution : souvent en roue libre par rapport à la rythmique (« Something Wrong »), ils apportent une fraîcheur à des titres parfois trop convenus. Car Strauss (qui a composé la quasi-intégralité des paroles et musiques de Alone ) s’égare sur des morceaux sans réelle inspiration mélodique : le mou « Too Late Now », pendant des ballades « gentilles » de Saga, ou le californien « Killing Me Softely », quand il ne va pas jusqu’à ruiner un splendide pont voix/piano par un refrain insipide (« Felis Feminalis »). Ce n’est qu’en de trop rares occasions que le groupe s’éloigne d’un style policé et prévisible : « Legend of Green », instrumental latin aux surprenantes sonorités de claviers, ou l’énergique « How It Goes », savant mélange de guitares/claviers contemporain, font regretter le manque de prise de risque de Ten Jinn.

Voici donc un groupe plein de savoir-faire (cohésion d’ensemble, voix singulière, production soignée) mais à qui fait trop souvent défaut l’essentiel : le génie de la mélodie, un petit grain de folie. Une remise en cause des canons de composition du groupe lui permettrait peut-être de mieux exploiter son potentiel créatif.