4dB

15/11/2016

La Chapelle des Lombards - Paris

Par Thierry de Haro

Photos: Thierry de Haro

Site du groupe : https://www.facebook.com/damien.boureau.guitariste.troyes

Setlist :

Hello Mister Bond – Are You Funky ? – Nouvelle Vague – Kaléidoscope – Reflexion – Vent d’été - Vieux Robot – J.R. – Eclosion – Zoé – No Jazz for Old Men

A peine sorti du métro Bastille, foule tentaculaire et bruyante, tenues vestimentaires colorées et bien sympathiques dénotent avec CRS en habit de combat … 4dB est un groupe dont on commence à parler, en regard de leur excellent premier album Rokh sorti en cette année 2016 – mais tout de même, difficile de croire que toute cette jeunesse surexcitée pour l’occasion s’est déplacée pour un concert qui s’annonce prometteur certes, mais dont l’écho médiatique est cependant resté confidentiel …

Impressions confirmées par quelques grappes humaines, en attente devant La Chapelle des Lombards, qui paraissent bien éparses en regard du brouhaha environnant de la Techno Parade. Qu’importe le flacon … vous connaissez la suite ! L’ivresse musicale est proposée ce soir sous forme d’un apéro-concert en un lieu, particulièrement convivial et chaleureux, et nouveau pour l’auteur de ces lignes (la programmation étant habituellement plus orientée ‘musique tropicale’ … ce n’est pas forcément la tasse de rhum de votre serviteur). L’ambiance est décontractée et les prémices d’une soirée qui s’annonce fructueuse en émotions et rebondissements sonores s’affichent dès les premières notes de «  Hello Mister Bond », l’un des morceaux ‘phare’ de ce premier album. Le tempo idéal pour démarrer : une atmosphère éthérée et planante, distillée en introduction par les claviers de Thomas Cassis, laissant place à des rythmes plus jazz-latino-fusion – qui ne sont pas sans évoquer le meilleur Santana, celui de Caravanserai.
Les musiciens enchaînent sans break sur l’excellent «  Are You Funky ? » où les longues digressions pianistiques ne sont pas sans rappeler celles de Snarky Puppy, eux-mêmes inspirés par l’émergence du jazz-funk seventies et des fabuleux claviéristes qu’étaient Herbie Hancock, Chick Corea ou George Duke. On retrouve toutes ces influences sous les doigts de Thomas, et le public, particulièrement réceptif, se laisse transporter avec délectation vers des sphères où le groove est omniprésent. Tout aussi énergique, mais plus jazz que funk, le très enlevé «  Nouvelle Vague » met en avant la guitare de Damien Boureau, leader du groupe (le DB du nom du groupe, c’est lui … le ‘4’ indiquant qu’il s’agit d’un quartet !), dans la mouvance d’un Bireli Lagrene lorsqu’il aborde son répertoire plus fusion. Il en sera de même avec «  Kaléidoscope », titre plus doux où Damien va exceller dans un registre plus proche d’un John Scofield – constatation faite sur un certain nombre de morceaux joués, à vrai dire. Le premier set se termine avec «  Reflexion », où une fois encore guitare et clavier guidés sur un tapis rythmique indélébile et jubilatoire, accompagnent l’auditeur au bout de ses rêves d’un soir. Pause fraîcheur d’une dizaine de minutes environ, et on savoure déjà l’idée qu’une deuxième partie aussi intense va nous emmener encore un peu plus loin dans notre quête d’émotions fortes.

Justement, on ne croyait pas si bien dire, puisque «  Vent d’été », titre de reprise, aurait pu figurer sur pas mal d’albums de Scofield – et bien évidemment – fait une fois de plus le bonheur d’un public conquis. Tout y est : la guitare cristalline de Damien, cet incroyable jeu de Quentin Rondeaux à la batterie et en point d’orgue, le jeu ‘bluesy’ et virtuose de Thomas Cassis. Sans oublier Olivier Michel, dont la basse apporte cette touche essentielle à la composition de 4DB. Et en parlant de création, «  Vieux Robot » est justement l’œuvre d’Olivier – tous les autres morceaux ayant été écrits par Damien. Rien d’étonnant donc à ce que la rythmique soit en avant et confirme que nous avons là, à quelques mètres de nous, d’excellents musiciens ! La ‘démonstration’ de Quentin en introduction sur «  J.R. » ne fait que renforcer cette sensation d’osmose parfaite sur scène. Et que l’on a devant nous un batteur prodigieux, alternant subtilité et coups de baguettes plus marqués ! « Eclosion » est une preuve supplémentaire de l’excellence et de la complémentarité du quartet : du grand art !
Le concert tire à sa fin, l’occasion pour Damien Boureau d’annoncer «  Zoé », titre écrit pour sa fille, aux ambiances mâtinées de jazz progressif des années soixante-dix – on pense irrémédiablement à Soft Machine, voire à Happy The Man quand Kit Watkins emmenait son auditoire vers des sensations célestes. Il est temps alors de se quitter, et 4DB choisit «  No Jazz For Old Men » , œuvre aérienne et d’une pureté incroyable, où l’empreinte intense d’un «  Canto De Los Flores » (sur le Borboletta de Santana) se mélangerait à celle de «  The Floating World » (sur l’excellent Bundles de Soft Machine). Nous sommes alors définitivement saisis par cette musique si riche et intense, qui vibre en chacun de nous.

En un peu plus d’une heure et demie de concert, 4DB nous aura fait traverser des paysages musicaux aussi divers que variés, nous transportant en des contrées où le jazz et le rock s’entrelacent au rythme d’une basse et batterie en perpétuelle discussion. Si ce groupe venait à jouer à proximité de chez vous – comme ce sera le cas au Sunside à Paris le 19 Novembre prochain – précipitez-vous, vous ne regretterez pas votre soirée !