Robert Wyatt - '68

Sorti le: 29/01/2014

Par Florent Simon

Label: Cuneiform Records

Site: http://www.disco-robertwyatt.com/

Cuneiform nous offre avec ce ’68 l’une de ses archives les plus intéressantes parmi celles publiées en 2013. C’est justement en cette année 1968 que Soft Machine, après avoir terminé une tournée américaine avec Jimi Hendrix et The Move, s’est séparé à l’aube de l’été malgré l’obligation de fournir un deuxième album pour honorer leur contrat avec Probe. Si Kevin Ayers est parti à Majorque et Mike Ratledge a retrouvé Albion, Robert Wyatt est quant à lui resté sur le nouveau continent, notamment chez une amie new-yorkaise, passant une grande partie de son temps au travail sur un petit piano. S’ensuivront deux séances d’enregistrement, l’une aux studios T.T.G. à Hollywood puis une seconde au Record Plant à New-York. Complètement seul avec ses instruments.

Le voyage dans le temps débute avec la douce « Chelsea », chanson donnée par Kevin Ayers et composée en l’honneur d’une femme. Ce morceau pop mid-tempo est teinté d’une mélancolie légère et dominé par l’orgue. Agréable sans être renversant, il a pour principal intérêt de constituer en fait la première version de « Signed Curtain » ré-enregistré avec Matching Mole en 1972 (avec ses paroles absurdes citant chaque partie du morceau : « This is a chorus… or perhaps it’s a bridge »).

Passé ces minutes apéritives, il est temps d’attaquer la première des deux pièces maitresses qu’est ce « Rivmic Melodies » de 18 minutes. Les connaisseurs auront tout de suite noté qu’il s’agit du nom donné à la face A de Soft Machine volume 2 (enregistrée en groupe un an après). Habile suite de thèmes allant du loufoque au tendre, ce morceau est aussi remarquable par son sens de l’enregistrement « solo » basé sur un assemblage batterie-voix-piano, certes verbeux et excentrique mais pour autant toujours créatif. Robert y évoque la tournée américaine passée qui a offert à Soft Machine une couverture médiatique sans précédent, parlant de ses compagnons de route (« Thank you Jim for our exposure to the crowd »). Des délires vocaux à l’humour très british (avec un « alphabet » à rallonge) finissent de compléter la liste des ingrédients de cette épopée anti-pop.

S’ensuit encore un prémisse de morceau à venir, ce « Slow Walkin’ Talk » façon boogie-woogie entrainant qui deviendra un « Soup Song » plus cuivré en 1975. Le seul intérêt de ce morceau plus anecdotique réside dans le fait que Robert Wyatt s’octroie ici les faveurs de Jimi Hendrix à la basse, ce dernier n’ayant répété le morceau qu’une fois avant de l’enregistrer. Il convient également de noter que Hendrix, toujours bienveillant envers les artistes, a payé lui-même ses séances de studio !

Dernier morceau et deuxième pièce de maitre frôlant les 20 minutes, « Moon in June » se verra à son tour ré-enregistré en groupe et gravé sur l’anthologique Third en 1970. On distingue clairement deux parties sur cet enregistrement très proche de sa version définitive. La première partie est intégralement interprêtée en solo et porte un Robert Wyatt à son apogée du piano-voix touchant et harmonique. Les paroles sont encore une fois personnelles et traitent de la nostalgie d’un anglais pour son île natale, alors qu’il est exilé aux Etats-Unis. La deuxième partie, enregistrée plus tard en Angleterre avec Mike Ratledge et Hugh Hopper, consiste en un boeuf rageur qui ne nous en apprend pas plus sur leur capacité à prodiguer un jazz rock volcanique.

’68 met à profit rien moins que le meilleur de ce créateur unique, géniteur de belles mélodies autant que bidouilleur multi-instrumentiste. Au final, ces quatres titres (qui totalisent dans les 45 minutes de musique) auraient pu devenir un premier album solo remarquable, posant un jalon important entre Soft Machine et The End Of An Ear. Donc indispensable à tout amateur de rock progressif.

Distribué par Orkhestra.

Cuneiform nous offre avec ce ’68 l’une de ses archives les plus intéressantes parmi celles publiées en 2013. C’est justement en cette année 1968 que Soft Machine, après avoir terminé une tournée américaine avec Jimi Hendrix et The Move, s’est séparé à l’aube de l’été malgré l’obligation de fournir un deuxième album pour honorer leur contrat avec Probe. Si Kevin Ayers est parti à Majorque et Mike Ratledge a retrouvé Albion, Robert Wyatt est quant à lui resté sur le nouveau continent, notamment chez une amie new-yorkaise, passant une grande partie de son temps au travail sur un petit piano. S’ensuivront deux séances d’enregistrement, l’une aux studios T.T.G. à Hollywood puis une seconde au Record Plant à New-York. Complètement seul avec ses instruments.

Le voyage dans le temps débute avec la douce « Chelsea », chanson donnée par Kevin Ayers et composée en l’honneur d’une femme. Ce morceau pop mid-tempo est teinté d’une mélancolie légère et dominé par l’orgue. Agréable sans être renversant, il a pour principal intérêt de constituer en fait la première version de « Signed Curtain » ré-enregistré avec Matching Mole en 1972 (avec ses paroles absurdes citant chaque partie du morceau : « This is a chorus… or perhaps it’s a bridge »).

Passé ces minutes apéritives, il est temps d’attaquer la première des deux pièces maitresses qu’est ce « Rivmic Melodies » de 18 minutes. Les connaisseurs auront tout de suite noté qu’il s’agit du nom donné à la face A de Soft Machine volume 2 (enregistrée en groupe un an après). Habile suite de thèmes allant du loufoque au tendre, ce morceau est aussi remarquable par son sens de l’enregistrement « solo » basé sur un assemblage batterie-voix-piano, certes verbeux et excentrique mais pour autant toujours créatif. Robert y évoque la tournée américaine passée qui a offert à Soft Machine une couverture médiatique sans précédent, parlant de ses compagnons de route (« Thank you Jim for our exposure to the crowd »). Des délires vocaux à l’humour très british (avec un « alphabet » à rallonge) finissent de compléter la liste des ingrédients de cette épopée anti-pop.

S’ensuit encore un prémisse de morceau à venir, ce « Slow Walkin’ Talk » façon boogie-woogie entrainant qui deviendra un « Soup Song » plus cuivré en 1975. Le seul intérêt de ce morceau plus anecdotique réside dans le fait que Robert Wyatt s’octroie ici les faveurs de Jimi Hendrix à la basse, ce dernier n’ayant répété le morceau qu’une fois avant de l’enregistrer. Il convient également de noter que Hendrix, toujours bienveillant envers les artistes, a payé lui-même ses séances de studio !

Dernier morceau et deuxième pièce de maitre frôlant les 20 minutes, « Moon in June » se verra à son tour ré-enregistré en groupe et gravé sur l’anthologique Third en 1970. On distingue clairement deux parties sur cet enregistrement très proche de sa version définitive. La première partie est intégralement interprêtée en solo et porte un Robert Wyatt à son apogée du piano-voix touchant et harmonique. Les paroles sont encore une fois personnelles et traitent de la nostalgie d’un anglais pour son île natale, alors qu’il est exilé aux Etats-Unis. La deuxième partie, enregistrée plus tard en Angleterre avec Mike Ratledge et Hugh Hopper, consiste en un boeuf rageur qui ne nous en apprend pas plus sur leur capacité à prodiguer un jazz rock volcanique.

’68 met à profit rien moins que le meilleur de ce créateur unique, géniteur de belles mélodies autant que bidouilleur multi-instrumentiste. Au final, ces quatres titres (qui totalisent dans les 45 minutes de musique) auraient pu devenir un premier album solo remarquable, posant un jalon important entre Soft Machine et The End Of An Ear. Donc indispensable à tout amateur de rock progressif.

Distribué par Orkhestra.