Vivien Lalu – Le prog dans la peau

Vivien Lalu est assurément un artiste atypique au sein de la scène prog metal française. Se donnant clairement les moyens de ses ambitions, ce jeune trentenaire de banlieue parisienne réalise depuis quelques années certains de ses rêves musicaux les plus fous et a su s’entourer des plus grands noms de la scène internationale.
Généreux et profondément sincère, Vivien revient pour nous sur son parcours musical et son processus créatif, sans jamais être avare en anecdotes.


Chromatique : Les metal progueux avertis se souviennent d’Oniric Metal récompensé par Rock Hard il y a quelques années, mais Vivien, peux-tu brièvement te présenter et rappeler un peu ton parcours, tes influences ?
Vivien Lalu :
La première chose qui m’ait inspirée, je crois que c’est le fait que mes parents aient été musiciens. Mon père avait un groupe de prog dans les années soixante-dix qui s’appelait Polène et avait gagné le concours du Golf Drouot. Sans être très connus, ils avaient tout de même gagné un tremplin prog et une signature sur un label, mais ils ont dû arrêter… un peu à cause de moi. Ma mère qui était clavier du groupe n’avait pas suffisamment de temps pour moi, ils ont donc arrêté tous les deux. Dès que j’ai fait mes premiers pas dans le salon, il y avait un Moog, celui de ma mère. J’ai grandi en écoutant les enregistrements audio de leur groupe.

C’est ta mère qui t’a appris à jouer ?
Personne ne m’a appris en fait, je n’ai jamais voulu apprendre à jouer. Tout petit, dès que j’utilisais le clavier de ma mère, j’ai toujours cherché à écrire mes propres mélodies, à créer de petits accords, c’est devenu quelque chose de très naturel pour moi. Mes parents m’ont ensuite offert mon premier synthé, puis lorsque j’avais 10 ans, mon premier Amstrad et un petit logiciel de musique sur disquette avec lequel je m’amusais à créer. J’enregistrais des musiques de jeux video sur cassette que je me repassais en boucle sur un walkman. Donc globalement, la musique a toujours été quelque chose d’énorme pour moi. J’ai eu une période “dessin” à un moment, j’ai fait une école d’arts appliqués, ce qui explique l’importance que je porte à l’aspect graphique qui entoure un album : pour moi, musique et image ont toujours été liées. J’ai d’ailleurs eu 18/20 en arts appliqués au Bac, grâce à un projet de fin d’année sur Roger Dean et Yes (rires). Paradoxalement, c’est à cette période que j’ai recommencé à faire de la musique au sein d’un groupe de doom qui cherchait un clavier… Puis je suis revenu petit à petit vers le prog notamment grâce à un album de covers à Yes sorti chez Magna Carta et là j’ai halluciné d’entendre ça à la sauce metal, avec de la double pédale et de grosses guitares. A peu près à la même période, on m’a offert Images & Words de Dream Theater, dont je n’avais jamais entendu parler auparavant et qui a fait office de révélation pour moi, je l’écoutais en boucle. Du coup, avec le guitariste du groupe de doom, on a quitté la formation et monté un groupe de prog. Et c’est à la Fac que j’ai commencé à faire le plus de musique en groupe, à une période qui fût très riche pour le prog metal (Symphony X, Vanden Plas, Pain of Salvation, à la fin des années 90…).

Et pour en venir à Lalu, Oniric Metal, c’était ton premier album ?
Mon premier album “à moi”, en tant qu’artiste solo. Il faut savoir qu’en 2002 j’ai rencontré par internet le chanteur de Dreamscape, Hubi Meisel, et il m’a offert mon premier job en musique. J’ai composé la musique (pour l’ensemble des instruments) et j’ai fait les claviers de son premier album solo, et des deux suivants d’ailleurs. Arrivé en 2003/2004 j’ai voulu voler des mes propres ailes. Hubi, c’était un peu mon client, et on ne partageait pas toujours le même point de vue, donc j’ai voulu voir ce que cela pourrait donner si je gardais mes idées pour moi. Et c’est pour cela que j’ai décidé de faire Oniric Metal. Ma première expérience en tant que producteur de ma propre musique.

Et avec du recul, en es-tu satisfait ?
En fait, je l’ai surtout composé et produit seul dans mon home studio, dans ma cité de banlieue, j’ai tout fait de A à Z, le label n’a fait que presser le disque.

En home studio, mais en utilisant une méthode que tu as réutilisé depuis, c’est à dire en travaillant avec tes musiciens à distance.
Tout à fait. Je suis arrivé plutôt au bon moment sur internet, vers 2001/2002, les groupes commençaient à créer leurs sites web et beaucoup de musiciens étaient assez facilement accessibles et s’écrivaient entre eux. J’avais pu par exemple parler avec Michael Romeo de Symphony X sur IRC, on était réellement proches des groupes à l’époque, plus qu’aujourd’hui il me semble. Au final, pour mon disque, j’avais contacté le batteur de Devin Townsend, Ryan Van Poederooyen, qui a un frère ingénieur du son qui m’a beaucoup aidé en prémixant le son de batterie. J’ai bien sûr fait des erreurs de débutant si je puis dire, des choses que je regrette, comme par exemple le son de basse mixé un peu trop fort. Mais bon, pour un premier album, je pense qu’on peut dire que les étoiles étaient plutôt bien alignées, j’ai pu notamment rencontrer Joop (Ndlr : Wolters) qui d’emblée à un super son de gratte, et j’ai eu la chance de globalement travailler avec des gens qui de base fournissent de bonnes prestations, avec des sons de qualité.

C’est également à cette période que tu as rencontré ton chanteur actuel, Martin Lemar.
Toujours à la même période, vers 2003, un groupe allemand, Broken Grace, cherchait un claviériste. Martin en était le chanteur et il y avait le batteur actuel de Luca Turilli, Alex Landenburg, mais ils n’étaient absolument pas connus à l’époque. Donc j’ai fait une audition, ils m’ont proposé de rejoindre le groupe, qui a splitté juste avant que je les rejoigne. Au final Martin s’est retrouvé sans groupe, et comme j’avais adoré sa voix sur les démos de Broken Grace, je lui ai dit « je vais faire mon album solo, est-ce que ça te dirait de chanter pour moi? ». Cela s’est bien passé, je lui ai envoyé tout de suite mes premiers morceaux, et il m’a rapidement appellé. Il avait déjà enregistré des trucs chez lui et me les faisait écouter au téléphone. Par la suite on s’est appelés régulièrement pour partager nos idées… C’était la première fois que j’avais ce réel échange artistique avec le chanteur, ce qui m’avait manqué avec Hubi Meisel.
Puis Oniric Metal est sorti, et c’était vraiment une période géniale. Par exemple, Devin Townsend est venu en Europe à l’époque, et comme Ryan était son batteur, on a été invités au Prog Power. On a partagé des moments excellents avec lui, je me rappelle notamment de Devin en chaussettes sur le lit de sa chambre d’hôtel en train de discuter avec mon père et de fumer des trucs… enfin bref, la totale (rires). Oniric Metal, c’est sans doute la meilleure période de ma vie. C’est horrible de dire ça puisque je n’avais pas encore mes enfants (rires). Le couronnement, c’était le fait d’être élu album du mois dans Rock Hard.

Tu en as ressenti les retombées d’ailleurs ?
Oui tout à fait, pour un premier album, on peut dire que les ventes ont été bonnes. A savoir, quand Ocean Machine de Devin Townsend est sorti, il en avait vendu à peu près autant que moi pour Oniric Metal au début, soit environ 1500 copies. Sauf que le miracle c’est qu’on en a vendu à peu près 3000 en deux semaines, ce qui était assez énorme pour moi, pour une première sortie. A l’époque, je crois que Lion Music bossait avec une bonne boîte de promo qui a beaucoup aidé.

Pour toi, Lalu, est-ce un projet où tu peux prendre la liberté d’inviter n’importe qui, ou y a t-il un noyau dur autour de toi et Martin ?
C’est une question intéressante, d’autant qu’elle revient souvent dans mon esprit. Je pense qu’au final c’est vraiment un ersatz des deux, une sorte de « band project ». Je le fais en mon nom, je paye les factures studio, j’écris la musique, je produis, donc objectivement c’est vrai que c’est mon projet, mais quelqu’un comme Martin s’investit énormément dedans, pareil pour tous les musiciens d’ailleurs. Donc je vois un peu cela à la manière d’un groupe car pour moi l’humain prime énormément sur le reste, je ne pourrais pas bosser avec des musiciens que je n’admire pas humainement. Jusqu’ici tous les gens avec qui j’ai bossé sont adorables, je croise les doigts, j’ai jamais été déçu. Je considère aussi cela comme un groupe car je laisse beaucoup de liberté aux musiciens. Même si j’écris les parties, au niveau de l’interprétation, je ne suis pas vraiment un tyran. Le résultat après enregistrement est souvent très différent de mes démos de départ, il y a réellement quelque chose qui s’est créé artistiquement en cours de route, notamment grâce à la liberté que je laisse aux musiciens. Evidemment cela ne doit jamais trahir l’idée de départ. C’est un peu ce qui me fascine dans la production, c’est que je puisse avoir des surprises grâce aux autres, sur ma propre musique. Si je ne la faisais que pour moi, de manière purement égoiste, je pense que l’effet serait complètement différent.

En ce qui concerne Joop Wolters, tu sembles très proche de lui, mais néanmoins il n’est cette fois pas présent sur le nouvel album, peux-tu nous expliquer pourquoi ?
Au moment où j’ai commencé les démos d’Atomic Ark, il se trouve que Joop travaillait sur son album solo. Il était réellement en mode « carrière de guitariste solo » et ne voulait pas vraiment entrer dans une optique de groupe (ce qui était justement important pour moi) et c’est lui même qui m’a proposé de demander à Simone Mularoni de DGM. J’ai donc commencé à travailler avec lui. Au final, Joop (avec qui j’ai d’autres projets musicaux de prévus) m’a tout de même fait des solos sur l’album et des guitares nylon sur « Follow the line ». Même si le line-up évolue un peu de temps en temps, on a tout de même une espèce de cohésion parce qu’on est tous un peu les meilleurs amis du monde.

Donc Lalu sans Martin cela serait possible ?
A présent, non, car dans mon esprit la musique a une signature particulière grâce à la combinaison de mes claviers et de la voix de Martin. Le morceau que je préfère sur Oniric avec Martin au chant c’est le tout premier, « Yesterday Man », parce qu’il monte dans les aigues, un petit peu à la Jon Anderson de Yes, alors qu’il est habituellement plutôt heavy/thrash. Par ailleurs, j’ai commencé à composer le 3e album de Lalu, je suis en plein Brainstorming en ce moment et…

Nous n’attendrons donc pas huit ans pour le prochain Lalu ?? (sourires)
Non non, je n’ai pas le choix, parce que je viens d’avoir la chance de signer avec un label et des gens ont attendu huit ans pour entendre la suite d’Oniric. Je ne peux pas me contenter de cela et revenir 5 ans après, ne serait-ce que par respect pour les fans de cette musique et pour moi même.
Comme à chaque fois où j’écris mes démos, je sais que je n’approcherai pas les musiciens pour jouer dessus tant que je ne serai pas certain de ce que je veux entendre, et de qui je veux entendre. Cela sera très certainement avec Martin pour le chant, comme d’habitude, à moins que cela soit trop conceptuel et que j’ai besoin d’autres voix, je n’en sais rien pour le moment, l’inspiration, ça ne prévient pas.

Quelle différence fondamentale vois-tu entre Oniric Metal et Atomic Ark, tant au niveau du son que de l’approche musicale ?
Oniric est plus proche de Dream Theater dans l’esprit, dans le sens où il y a beaucoup de mesures composées, très peu de morceaux binaires ou de 4/4, ça part tout le temps dans du ⅞, du 11/8.

On sentait également beaucoup l’influence de Devin Townsend à l’époque…
C’est vrai qu’Ocean Machine est un de mes albums de chevet. Et pour l’anecdote, en gros fanboy de Devin Townsend, je voulais que mon premier album ait les mêmes initiales qu’Ocean Machine, c’était un petit délire personnel. J’adore cet album car il a amené cet aspect monstrueusement heavy qu’il avait déjà dans Strapping Young Lad tout en conservant des ambiances new age et progressives derrière. Le metal c’est un univers extrêmement codifié, et au final, dans le progressif on fait tous des morceaux de 20 minutes avec des mesures composées, des solos de moog. C’est ce que j’aime dans Devin Townsend, le fait qu’il s’affranchisse des codes, qu’il les casse. Pour moi, c’est ça le prog metal, c’est cela qui m’inspire. Mais ça ne m’empêche pas de rentrer malgré tout dans des codes, sur Oniric Metal. Pour Atomic Ark, j’avais envie d’essayer quelque chose de différent, pas pop, mais plus facilement accessible, plus binaire avec des morceaux plus courts qui ne dépassent pas les quatre minutes. Même si je n’ai pas résisté au final, et j’ai quand même fait un morceau de dix-neuf minutes. Au moment de composer l’album, je n’avais pas vraiment envie de complexifier à outrance. C’était d’ailleurs important pour moi de travailler avec un ingénieur du son qui lui même fait de la pop, pour avoir un univers différent.

Quand tu parles d’ingé son, c’est également le responsable du mix c’est ça ?
Oui, c’est ça. Le mix a également une importance artistique, car au moment où l’on se pose avec un ingénieur du son, on se pose de multiples questions. Tout peut sonner de façon très différente, de façon plus heavy ou plus soft. Le mix peut changer du tout au tout le disque. J’étais content de travailler avec Yann Memmi car il a mixé des albums de Sinclair ou de Doc Gynéco, mais il a débuté à Londres en bossant également pour Dio ou Bruce Dickinson. Pour moi c’était du pain béni, car il vient d’un autre univers tout en maîtrisant les codes du hard rock et apporte du coup une vision intéressante. Je trouve ça dommage que la norme du prog metal soit d’aller mixer avec des ingés sons typés « metal », faisant une guerre pour que le son soit toujours le plus fort possible.

Tant que l’on parle du son, celui de Virgil Donati (que tu connais d’ailleurs depuis longtemps) est proprement excellent.
En fait, il a son studio à Los Angeles, grosso modo, lorsqu’il sort de chez lui, c’est pour aller dans son studio, c’est son quotidien. Il enregistre pour énormément de monde, et il a enregistré pour moi sur plusieurs mois car il avait d’autres engagements, et quand il est venu sur Paris, il est arrivé chez mes parents avec tous ses disques durs, c’était très sympa. Ce qui est drôle, c’est que ses prémixes étaient très bons sur les démos mais il n’a pas livré ses parties mixées pour l’album. L’anecdote, c’est qu’il m’a fallu galérer pour trouver quelqu’un qui mixe aussi bien sa batterie que lui, et au final c’est Simone mon guitariste qui s’est le mieux débrouillé. Il a utilisé son studio en Italie dans lequel il produit les albums de DGM (d’ailleurs je t’invite à aller voir leurs videos studio, c’est assez impressionnant). En Italie, énormément de groupes de métal viennent dans son studio (le Domination Studio). La difficulté, c’était que Virgil a beaucoup de dynamique dans son jeu car il vient d’un monde où le son de batterie est plus naturel, et Simone travaille dans un monde où on utilise plutôt les trigger, ce qui au départ n’a pas du tout plu à Virgil et je n’en étais pas non plus trop fan. Du coup, en en discutant de façon collégiale, on a basculé sur un son plus naturel, et il n’y a pas photo. Ma référence à ce niveau là, c’est des sons à la Faith No More, Ugly Kid Joe… Ou même le premier Symphony X, Damnation Game, on aime ou on aime pas le côté neo-classique, mais les batteries sont très naturelles, et je suis dingue de ce son là. En prog, je pense qu’il n’y a pas besoin de trigger, sauf si tu penches vers le death avec de la double ultra rapide… et encore, Gene Hoglan a fait d’excellentes choses sans trigger.

En tant que claviériste et compositeur principal, comment abordes-tu l’écriture pour d’autres instruments, que ce soit le chant ou la guitare ?
L’écriture du chant, je ne m’en occupe pas, je laisse toujours ça au chanteur, et en l’occurrence, ici c’est Martin qui s’en est occupé. Il prend ma musique, il trouve des lignes de chant et écrit les paroles. Sauf sur deux titres, « War on Animals » et « Follow the line ». Pour ce dernier, c’est ma lecture des « Fourmis » de Weber étant plus jeune, qui m’a inspiré. Pour le coup, c’est moi qui ait imposé les lignes de chant sur celle-ci. Donc pour résumer, sur Oniric Metal et Atomic Ark, il fait tout à 95%.

Tu lui donnes des indications sur les thèmes à aborder ?
Au départ j’ai des titres de travail, des noms de chansons qu’il change régulièrement, ce qui ne me dérange pas outre mesure.

Et concernant les riffs de guitare ?
Je compose tout aux claviers, que ça soit la batterie ou la guitare. Je me prends un multipistes, je construis ma maquette aux claviers, et j’exporte chaque partie que j’envoie aux musiciens (un mix complet plus une partie isolée de son instrument). Pour Virgil, je lui exporte en pdf des notations, des structures, pour l’aider à appréhender le morceau. Pour voir la différence entre mes maquettes aux claviers et le résultat final, sur mon channel Youtube il y a une video assez courte qui explique le processus (http://youtu.be/YVbgDdhFsdU). Cela peut montrer le chemin parcouru entre la préproduction et la version finale. On a réussi sa prod si cela reste dans l’esprit initial. Je laisse une certaine liberté pour l’interprétation des parties, mais concernant les riffs de gratte, je suis un peu un dictateur, c’est vraiment à la note près que ça doit être joué. J’adore écrire des riffs de gratte, j’en ai plein mes disques durs (rires). Paradoxalement, Joop avait adoré cela sur Oniric Metal, il m’a dit que j’écrivais des riffs ou des enchaînements auxquels il n’aurait pas pensé naturellement en tant que gratteux. Pour lui c’est une sorte de challenge car techniquement certains passages sont moins naturels à jouer à la guitare qu’aux claviers. Il m’expliquait que c’est ce qu’il aimait chez Allan Holdsworth, qui avait débuté par les claviers, et résonnait sur son manche de guitare comme un claviériste.
Concernant Atomic Ark, je crois que le riff le plus difficile est celui de « War on Animals », mais Simone m’a agréablement surpris lors de l’enregistrement. Il faut d’ailleurs le signaler, c’est tout de même grâce à Simone si l’album sonne de cette manière, car il a mixé toute la batterie de Virgil, ses grattes et la basse ensemble, il a prémixé beaucoup de choses. Bien sûr on a mixé l’album avec Yann mais le prémix nous a beaucoup aidé et Simone a investi énormément de son temps pour l’enregistrement, et il a tout simplement énormément de talent.

Et humainement cela s’est bien passé ?
On ne s’est pas encore rencontrés, mais ce qui est amusant c’est que Martin et lui se connaissent déjà, ils se sont rencontrés plusieurs fois lors de tournées. Ils ont également rencontré Mike Lepond de cette manière. Les membres avec lesquels je suis le plus proche sont Virgil et Joop, même si il n’est pas à temps plein, ça reste un frère musical et un grand ami dans la vie.

Il y a différents guests sur l’album, mais un des plus marquants reste celui de Jordan Rudess, qui pose un solo hallucinant, tel qu’il n’en a pas produit chez Dream Theater depuis un certain nombre d’années. Comment cela se passe avec lui, tu lui as donné des instructions ou c’était carte blanche ?
Lorsque l’on a commencé à travailler ensemble, il m’a simplement demandé ma maquette et voulait savoir ce que j’attendais de lui. Je lui ai donc envoyé ma partie au piano, ma propre version de l’intro de « Revelations » au piano, et j’aurais presque honte de la faire écouter aujourd’hui, parce que je ne suis pas du tout un claviériste virtuose, même jouer une pièce de Mozart c’est dur pour moi, ce n’est pas du tout mon univers, alors que Jordan est très à l’aise en piano classique. Je te laisse imaginer la pression pour oser lui montrer la chose, et au final il s’est lâché complètement et ça a fini en impro de deux ou trois minutes. Cela m’a tellement fait halluciner que j’ai tout gardé et rallongé le morceau.

Tu l’as contacté de quelle manière?
L’histoire est assez dingue, j’avais fait une demande « d’ami » à Jordan sur Facebook et il avait accepté. Un soir pour le fun, j’ai partagé un morceau de Shadrane, mon autre projet, via Spotify sur la page de Jordan, et le lendemain, j’avais un message de sa part me disant qu’il n’avait pas réussi à ouvrir le morceau. De fil en aiguille on a discuté par mail, et depuis, il a toujours Shadrane dans les favoris de sa page Spotify (sourires). Je suis vraiment heureux, car je suis fan de lui depuis Liquid Tension Experiment, et Metropolis Part II est un de mes albums de chevet. Ensuite il m’a invité avec ma mère (une des plus grandes fan de Jordan, elle a ses albums solos) au concert de Dream Theater au Zénith, et je l’ai rencontré après le concert, il a pris le temps de discuter avec nous. On s’en rend difficilement compte, mais que cela soit lui ou John Petrucci, ce sont des gens foncièrement gentils et abordables. Un des moments qui me marquera à vie, c’est lorsque Jordan s’est approché de ma mère, lui a pris les mains, l’a regardée dans les yeux et lui a dit « Your son is very talented » (rires), et elle a bloqué sans savoir quoi répondre. Quelques mois plus tard, il m’a appelé de Djakarta par Skype, et c’est à ce moment là qu’il a accepté de jouer sur mon disque. Pour moi ça reste surréaliste qu’un petit mec de banlieue se retrouve avec Jordan sur son album… Je peux rien demander de plus dans la vie, j’ai vraiment réalisé un rêve.
Atomic Ark c’est une belle histoire, mais le véritable happy ending sera si l’album marche. Mais quoiqu’il arrive il n’y a rien de négatif, cela m’aura renforcé en tant que musicien et producteur. Je serai encore plus à l’aise sur le prochain.

Et la suite ce serait du live ?
Oui tout à fait. Je ne peux malheureusement rien révéler, il faut encore que cela s’officialise, mais il y a du live prévu pour l’année prochaine. Une mini-tournée qui s’annonce et je l’espère des dates en France, même si ce n’est pas encore gagné.

Pour terminer, tu vas reverser la moitié des royalties de cet album à une association de protection animalière. Ce n’est pas très courant pour un projet metal, peux-tu nous en parler ?
Dès que j’ai commencé à travailler sur l’album, j’ai tout de suite voulu le faire pour la cause animale. À une époque, beaucoup de videos circulaient sur Youtube montrant des cruautés terribles infligées aux animaux, ça m’a immédiatement révolté. Après coup, en ayant réfléchi, je me suis dit que cela serait dommage de ne faire qu’un coup de gueule au niveau des paroles, ce qui se fait la plupart du temps. Pour que cela ne reste pas que des paroles, j’ai décidé de faire en sorte d’aider concrètement une association que je connais. Afin d’être certain de savoir où partira mon argent, j’ai décidé de ne pas choisir la SPA ou PETA, et choisir une asso à taille plus humaine. Grâce à ma femme, je suis tombé sur cette association parisienne qui se nomme « Alerte SOS » (http://www.alertesos.com) et je les ai rencontrés. J’ai eu un choc, une véritable révélation. En les voyant se battre au jour le jour pour sauver des animaux, on ne peut qu’être touché. J’ai donc décidé de faire 50/50 avec eux. Cela reste une goutte d’eau par rapport aux frais qu’ils peuvent avoir, au final mon album ne servira peut être pas à sauver beaucoup d’animaux, mais ce sera déjà mieux que rien.