TesseracT

12/11/2012

Batofar - Paris

Par Renaud Besse Bourdier

Photos:

Marjorie Coulin

Site du groupe : www.myspace.com/memoriesofadeadman / tesseractband.co.uk

Setlist :

Memories Of A Dead Man : Trismagistus King / On The Height of Despair / Diving Bell / Spoken Yet Never Heard / Good Mourning – Registered Bodies / Lighthouse / Tomorrow at Dawn

TesseracT : Nocturne / Concealing Fate / April / Lament / Nascent

C’est dans les cales du bateau Le Batofar que le djent s’invite à Paris : nous sommes un lundi soir d’octobre, TesseracT vient tester son nouveau chanteur face à un public français bien présent. Et en guise d’apéritif, la formation française Memories Of A Dead Man ; que demande le peuple ?

Mais avant, deux autres groupes doivent passer sur scène. Le premier, The Dali Thundering Concept, est une bande de jeunes français pleins d’énergie. Le guitariste, le bassiste et le batteur délivrent une musique djent très violente, plus proche de Periphery que de TesseracT, tandis que le chanteur jure et vocifère sans relâche. Si la passion est bien présente et si certains passages recèlent de bonnes idées, l’ensemble manque d’inventivité, et l’on peut regretter l’absence totale de chant, remplacé du rap ou du growl. Le deuxième groupe, lui, n’a pas peur de pousser la voix même si cela veut dire chanter complètement faux. Nommé Fight For Ashes, ces Français complètement déjantés déversent un flot de metal grindcore croisé avec du speed metal sans aucune retenue (mention spéciale au guitariste qui a terminé le concert à faire du sweeping à la Malmsteen sur cinq cordes), qui convainc certains et laisse perplexe d’autres.

Il faut dire que durant ces deux performances, l’attention du public était largement dirigée vers le cœur de la fosse, où deux hommes et une femme avaient décidé d’inventer le pogo Power-Ranger ; c’est-à-dire qu’ils sautaient partout en jetant des coups de pieds aériens, escaladaient les poteaux, et parfois couraient en cercle en imitant des poules et des coqs. Vraiment, ça ne s’invente pas.

Mais alors que les techniciens préparent la scène pour Memories Of A Dead Man, la foule grandit et empêche nos trois originaux de continuer à sauter partout, de risquer d’assommer tous leurs voisins. Le groupe arrive et impose tout de suite sa signature : le rythme est bien plus lent et le son plus lourd que pour les précédents. Nous en profitons pour noter l’excellente qualité de l’éclairage durant toute la soirée. Il aura fallu deux morceaux pour que le public rentre vraiment dans le concert, mais les musiciens savent ce qu’ils font, et l’auditoire sait apprécier leur style noir qui emprunte autant au doom qu’à l’ambiant et au hardcore. Il faut noter que l’acoustique de la salle est plus que correcte, et on entend parfaitement tous les musiciens, à ceci près que le chant est un poil trop faible. Le grand moment du concert de Memories Of A Dead Man arrive lorsque le chanteur invite des amis à lui, arborant tous fièrement des jolis dreadlocks, à venir rapper sur scène. Le résultat est surprenant et saisissant : si vous vous êtes déjà demandé ce que ça donnerait si Hacride et les Fatals Picards jouaient ensemble, ne cherchez plus, MoaDM le fait pour vous, et c’est tout bonnement excellent.

Enfin, les Britanniques arrivent, le nouveau chanteur Ashe O’Hara fermant la marche. TesseracT ouvre le concert avec un extrait de son prochain album, « Nocturne » qui peine à réellement convaincre. Les musiciens eux-mêmes semblent tendus, nerveux, et restent très statiques. Mais cela ne dure pas puisque dès le morceau terminé, le groupe entame la pièce qui l’a rendu célèbre, « Concealing Fate », dans son entier et sans un seul faux pas. Le public est très vite conquis : les gros riffs font valser les têtes, la basse groovy d’Amos Williams claque sans relâche au rythme effréné de la batterie, et Ashe O’Hara démontre sa technique vocale sans une fausse note. Enfin décomplexé, TesseracT est prêt à casser la baraque.

A peine la pièce de trente minutes achevée, il enchaîne avec l’excellente « April ». L’arrivée du nouveau chanteur dans TesseracT a fait du bruit ; beaucoup lui préféraient le précédent, mais force est de constater qu’O’Hara a tout autant de capacités que son prédecesseur. Plutôt que d’imiter Daniel Tompkins dans les moindres détails, il sait jouer sur ses atouts – qui sont différents de ceux de Tompkins – et maîtrise parfaitement sa voix. TesseracT termine par les deux morceaux qui ouvrent l’album One, tout en annonçant subtilement qu’il a encore deux trois tours dans son sac. Les musiciens quittent donc la scène face à un public conquis, qui n’attend maintenant le rappel quasi-traditionnel.

Que vont-ils nous réserver maintenant ? De nouveaux extraits du prochain album, qui seront plus accrocheurs que le premier ? Les quelques titres de leur premier opus One qu’ils n’ont pas joué ce soir ? La réponse : rien du tout. Après quarante-cinq minutes de concert, après avoir chauffé son public bien comme il faut, TesseracT ne fait pas de rappel et saborde le navire.

C’est donc avec amertume que l’on quitte le Batofar pour regagner la terre ferme, car si TesseracT a su montrer son assurance sur scène et conquérir son public bien aisément, vraiment, quarante-cinq minutes, c’est peu. On se consolera alors en pensant à la très bonne performance de Memories Of A Dead Man, et bien sûr à la découverte d’un nouveau genre de pogo qui mérite d’être popularisé.