Andy Emler MegaOctet - E Total

Sorti le: 24/04/2012

Par Jean-Philippe Haas

Label: La Buissonne

Site: www.andyemler.eu

Le MegaOctet fait partie d’une petite poignée de groupes qui brassent autant les influences que les musiciens. Sorte de big band dévergondé, affranchi de toute contrainte, le collectif explore les multiples directions que lui permet la souplesse du jazz, soigneusement encadré par deux mains de maître, celles du pianiste Andy Emler. Après une régulière rotation des membres durant ses premières années d’existence, la formation s’est aujourd’hui quelque peu stabilisée. Celle qui officie sur E total est ainsi la même pratiquement que sur Crouch, Touch, Engage, à l’exception du trompettiste Laurent Blondiau qui reprend le rôle tenu par Médéric Collignon depuis Dreams in Tune.

Comme l’indique le titre du disque, le « Mi » (« E » en anglais), décliné sous toutes ses formes, est au centre des cinq compositions. En guise de présentation, « Good Games » dévoile les forces en présence qui se répartissent peu ou prou de la même façon que sur l’album précédent : le maître de cérémonie reste la plupart du temps dans une sage réserve, jouant avec le redoutable – et beaucoup moins discret ! – Eric Echampard un rôle de meneur de revue, tandis que le saxophone, projeté sur l’avant-scène par le prolixe trio Dehors/Sellam/de Pourquery assoit son incontestable autorité. Les autres instruments vont et viennent au gré des fluctuations incessantes des titres, prêtant main forte ou s’émancipant l’espace des quelques minutes (la clarinette sur la seconde partie de « Father Tom », la trompette dans la première moitié de « Start Peace »,… ). Dense et dynamique (« E total »), voire frénétique (« Shit Happens ») ou au contraire plus retenue, narrative (« Father Tom », « Start Peace »), la musique du MegaOctet se conjugue à tous les modes et temps du jazz, tout en conservant une extraordinaire unité. Libérée des problèmes d’ego, basée sur le dialogue animé et la collaboration opportune entre les instruments, elle se destine à n’importe quelle d’oreille. E total comme ses prédécesseurs ne s’adresse pas à une élite détentrice du bon goût, mais bel et bien à l’auditeur lambda, pourvu qu’il cautionne les mariages mixtes et apprécie les discussions à bâtons rompus.