François Appas - Le rock progressif se déplace par bonds…

Sorti le: 17/04/2012

Par Jean-Philippe Haas

Label: Appas (éditeur)

Site: www.appas.org

Aussi méconnu qu’en avance sur son temps, le groupe PaillasSon défie les modes musicales éphémères pour mieux suivre sa propre voie, un sentier lumineux où l’audace côtoie la candeur. Car PaillasSon, c’est un peu le Mirjlovsky Ibecksclivaks hexagonal. Il était donc tout à fait inenvisageable pour un ardent défenseur de la musique ambitieuse comme Chromatique – que certaines bouches fielleuses qualifient de « Télérama du prog » – de ne pas consacrer une page à ce manifeste aussi bref qu’essentiel : Le rock progressif se déplace par bonds, aime le double dutch, et trouve intéressant de participer à des compétitions de bobsleigh (pour peu qu’on lui foute la paix cinq minutes).

Muni d’un humour décalé que n’auraient pas renié The Monty Python, François Appas décrit, par l’intermédiaire du bassiste/chanteur/narrateur de PaillasSon, l’univers chamarré et dérisoire d’un groupe de rock progressif, dans sa démesure et son appréhension toute personnelle de la réalité. La trame du récit, quelque peu lâche, ne tient que par le mortier liant – comme le chocolat au lait lie les grains de riz soufflé dans une tablette de Crunch – les quatre membres du groupe dont l’amitié indéfectible, bien que soumise à rude épreuve, semble finalement triompher de tous les obstacles. « Petit Livre rouge » du prog’ (Ou « Sainte Bible » du prog’. Ou « Mein Kampf » du prog’. Ou « Oui-Oui et la voiture jaune » du prog’, selon les affinités idéologiques de chacun), Le rock progressif se déplace par bonds […] conte ainsi les tribulations du groupe au travers de son quotidien : composition, répétitions, concerts, conflits d’egos, relations avec les médias, les femmes, les fans, les faons et les malles de stockage des partitions… Et même si des noms comme King Crimson, Magma et autres Hatfield and the North émaillent la grosse centaine de pages de Le rock progressif […], jamais on n’apprend par l’œil halluciné et déformant du narrateur ce qu’est réellement cette musique. Si ce n’est que les titres sont déraisonnablement longs… Seule la curiosité qu’aura sans nul doute éveillée ces pages – entre deux spasmes de rire – sera susceptible de mener le novice vers une étude plus approfondie d’un genre dont la plus grande partie de l’Humanité ignore il faut bien l’avouer jusqu’à l’existence.

La beauté d’un tel ouvrage tient en ce qu’il s’adresse à la fois à très (très) peu de gens (les progueux) et à un large public (toute personne susceptible de vouloir passer une heure à rire aux larmes en lisant un petit bouquin facile d’accès). Acheter (Et offrir. En plusieurs exemplaires.) Le […] est un geste pour l’auteur, un geste pour le rock progressif, un geste pour la planète (moins de papier = moins de déforestation), un geste pour l’humour drôle qui fait rire, et même un geste de citron. Et si après la lecture de cette chronique et d’un extrait , vous n’achetez finalement pas ce livre, PaillasSon n’en sera pas scandalisé, tout comme il n’a pas été scandalisé par la remise, récente, d’un Grammy Award à un disc-jokey blond et sans imagination dont le nom finit par « ta ».