Ben Craven - Great & Terrible Potions

Sorti le: 11/12/2011

Par Wendy-Anne Milleret

Label: Desert Comb Music

Site: www.bencraven.com

Au sein de la foisonnante scène australienne, Ben Craven fait figure de navigateur en solitaire. Après un essai confidentiel paru sous le titre de Tunisia puis un EP de relectures acoustiques, le voici qui lance judicieusement sa carrière sous son propre nom.

Derrière cette pochette dessinée par Roger Dean, pas de publicité mensongère possible. L’album s’annonce avec emphase comme du « classic prog » pure souche. L’illustrateur fétiche de la galaxie Yes et son imagerie si connotée en seraient presque encombrants, mais Craven aurait-il dû se priver de cette attrayante devanture ?

Les pionniers du progressif, on les énumérerait tous parmi les ingrédients de Great & Terrible Potions. Mais s’il fallait pratiquer un test de paternité, le plus proche parent serait pourtant David Gilmour. L’ambiance planante et les clins d’œil appuyés (« The Conjurer »), les sonorités « hawaïennes » et les longues ascensions mélodiques sur le titre éponyme, la voix chaude sur le très rock « Ready to lose », tout désigne la face claire du Floyd comme une inspiration majeure.

Sur ce disque prétentieux et décomplexé, ainsi qu’il le revendique, le chanteur-compositeur fait étalage de ses talents. Il déploie fièrement l’éventail de ses influences, de Pink Floyd à John Barry et les condense à outrance, comme si ce premier album devait être le dernier. Les orchestrations pompeuses à souhaits viennent épaissir la dimension cinématographique que le créateur ambitionne pour sa musique.

Cette image d’un musicien autodidacte et réservé qui assemble des compostions si fortes rappelle la personnalité de Steven Wilson. C’est donc tout naturellement que le moment fort, « No Specific Harm », composition épique à l’introduction grandiloquente, évoque Porcupine Tree par ses vocaux travaillés et son excellent refrain.

Séduisant chanteur et touche-à-tout de premier ordre, Ben Craven devra s’ouvrir à d’autres musiciens ou s’armer de samples pour défendre seul en scène son oeuvre si pointilleuse. C’est là le revers de sa démarche. Néanmoins, en demeurant seul maître à bord, l’artiste s’épargne (espérons-le pour sa santé mentale) une scission pour « divergences musicales ». Sage précaution par les temps qui courent.