One Shot

13/12/2010

Triton - Les Lilas

Par Fanny Layani

Photos: V. Chassat

Site du groupe : http://www.myspace.com/oneshotrock

Setlist :

Urm / Black P / Def MK1 / Riff Fantom / Missing Imperator / Nouveau titre / Nosh Partitas / Ewaz Vader / Rappel : Monsieur G

Pour One Shot, « faire » le Triton, c’est un peu comme jouer à la maison. Le groupe a écumé la scène lilasienne à maintes reprises et y a enregistré ses deux derniers albums. Pour ce retour après un séisme d’importance, le départ d’Emmanuel Borghi, clavier originel du groupe, l’enjeu est lourd pour son remplaçant Bruno Ruder (qui lui a d’ailleurs succédé également au sein de Magma il y a deux ans), comme pour l’ensemble de la formation. Il allait falloir s’imposer à domicile et convaincre le public exigeant de cette salle – que l’on avait l’habitude de voir plus pleine pour One Shot – que le choix musical était le bon.

Bruno Ruder a fait ses premiers pas scéniques avec One Shot l’été dernier lors d’une tournée japonaise et doit désormais imposer un nouveau style. Finis les claviers et les effets électroniques d’Emmanuel Borghi, tout se joue au piano Rhodes. Pourquoi pas après tout, voilà qui pourrait donner à l’ensemble un petit côté roots, à l’ancienne, qui ne serait pas pour déplaire à un public assez largement nourri au jazz-rock et au progressif des années soixante-dix.

Cependant, le résultat est mitigé. Le toucher du nouvel arrivant à cet instrument si délicat n’est pas véritablement convaincant, manquant par trop de nuances. Il n’utilise en outre que trop rarement sa main gauche, domaine dans lequel son prédécesseur était très actif, assumant en cela un rôle rythmique crucial qui manque aujourd’hui. Enfin, le nez coincé dans ses partitions, Bruno Ruder ne peut être entièrement disponible et réactif.

La véritable machine à « groover » qu’était One Shot en prend un sacré coup, mais c’est également du fait d’un Daniel Jeand’heur à la batterie que l’on a connu bien meilleur. Petite forme ou choix de baguettes ? La batterie sonne à plat, notamment sur les toms et la caisse claire, sans réelle profondeur, et le jeu de cymbales paraît par moments confus. Il ne reste guère que Philippe Bussonnet (basse) pour tenir tant qu’il peut et à grands renforts d’énergie l’armature rythmique et tenter d’enlever un peu le propos.

Enfin, le choix des titres surprend. Tous les compositions signées par Emmanuel Borghi, dont certaines des plus appréciées du public, ont été écartées, ce qui ampute assez sérieusement la setlist. Ainsi resurgissent d’anciens titres dont « Monsieur G » exhumé pour le rappel, et un morceau inédit, prémice d’un cinquième album en préparation. Un monument tel que « Missing Imperator », en début de second set, permet heureusement de remettre les pendules à l’heure et prouve que One Shot peut encore administrer de belles et magistrales gifles.

En demi-teinte, sans réelle souplesse ni fluidité, le concert peine à soulever un vent d’enthousiasme dans une salle que l’on a connue plus réceptive. Et ce n’est pas la courte, festive et brutale prestation avec Jim Grandcamp et Guillaume Perret mais sans Bruno Ruder lors des dix ans du Triton le 20 novembre dernier, qui aura rassuré les sceptiques.

Gare toutefois à ne pas tirer de conclusions hâtives. Un concert raté peut arriver, quelle que soit la qualité des instrumentistes, et aucun musicien n’est censé être uniformément parfait et égal d’un soir à l’autre. One Shot s’était construit, progressivement, une identité forte, celle d’un mur du son, d’un monument de groove. Et si l’on reste pour l’instant sur notre faim, la nouvelle formation a manifestement besoin d’un rodage supplémentaire. Il reste à espérer que le travail à venir en studio permettra au quatuor de trouver l’aisance qui lui a fait défaut ce soir-là.