Gazpacho – Gazpacho

ENTRETIEN : GAZPACHO

 

Origine : Norvège
Style : néo-progressif
Formé en : 2002
Composition :
Jan Henrik Ohme – voix
Thomas Andersen – claviers
Jon-Arne Vilbo : guitare
Mikael Krømer – violons
Kristian Olav Torp – basse
Robert Risberget Johansen – batterie
Dernier album : Tick Tock (2009)

Après un album très réussi, les Norvégiens de Gazpacho reviennent avec Tick Tock, une œuvre néo-progressive inspirée de l’univers d’Antoine de Saint Exupéry, qui médite sur le temps qui passe et les émotions attenantes. Le disque sort le 15 mars prochain et le groupe sera en concert à Paris le 29 mars. Une occasion de faire le point vers ce nouveau souffle d’air frais.

Progressia : Vous êtes considérés comme un groupe de néo-progressif classique par un grand nombre de nos lecteurs. Le public vous a acclamés lors de la dernière Convention ProgRésiste au Spirit of 66 de Verviers. Voilà bien une preuve que votre succès est de plus en plus reconnu. Pensez-vous qu’avec Night, et aujourd’hui Tick Tock, votre carrière va encore évoluer et élargir votre audience ?
Jan Henrik Ohme
: Nous essayons avec chacun de nos disques de toucher un plus large public et d’augmenter le nombre de nos fans. Je pense que notre style a bien évolué vers quelque chose d’assez unique et qu’il a reçu l’approbation de beaucoup de personnes. Nous sommes vraiment heureux de constater que le succès ne s’interrompt pas, que les gens sont sincèrement touchés par ce que nous composons et produisons. Notre but, c’est ce cercle vertueux d’avoir suffisamment de public pour couvrir les frais d’une tournée afin de rencontrer ce public justement.

Peux-tu décrire le concept de Tick Tock et pour quelles raisons vous en êtes venus à évoquer la vie d’Antoine de Saint Exupéry ?
Tous les membres du groupe connaissent l’œuvre de Saint Exupéry. Nous avons tous étudié Le Petit Prince à l’école. Notre concept est d’évoquer la lutte incessante contre le temps qui passe. Chaque jour, l’horloge nous gratifie de son «  Tic Tac  » et nous rapproche de la fin. Si vous commencez à penser à cela, c’en devient quelque peu effrayant. Pour illustrer ces angoisses, nous avons imaginé une longue marche dans le désert, notre façon de retrouver notre chemin et les différents états d’esprit qui nous submergent pendant cette traversée. C’est au début de la composition de l’album que nous avons trouvé la relation de l’accident d’avion de Saint Exupéry en 1935, et ce récit est une bonne description de ce qui se passe lorsque deux hommes sont perdus : ici, Saint Exupéry et son co-pilote, Prévot. En lisant ce livre, il était évident que Saint Exupéry était seul, même en étant accompagné. Nous marchons toujours seuls…

La tendance actuelle des musiques progressives lorgne vers le regard sur soi, la méditation et l’introspection. Le dernier album de Marillion en est une preuve patente. Cette évolution n’est-elle pas une réponse simple à un monde devenu de plus en plus compliqué et incompréhensible ?
Je suis tout à fait d’accord. La musique progressive est avant tout une évasion, et notre production est avant tout introspective. La musique actuelle est obsédée par le rap, le hip-hop, le R&B, mais il existe des gens pour lesquels la musique n’est pas un simple accessoire de mode ou une occasion de danser. Ils envisagent plutôt une écoute comme un livre où communiquent ceux qui la jouent et ceux qui la lisent.

Quelle est votre audience en Norvège et plus généralement en Europe ? Avez-vous une idée de votre «  fan-type  » ?
Difficile de répondre… En regardant un peu ce qui se passe sur un site comme Last.Fm, on constate que beaucoup de gens écoutent notre musique, l’équivalent d’environ dix mille personnes. Nos fans ont entre quatorze et soixante-cinq ans (toujours d’après Last.Fm !). On peut donc affirmer que le fan typique de Gazpacho n’existe pas, enfin, le définir semble impossible. Nous nous contentons d’accueillir et c’est bien l’essentiel.

Votre musique, notamment avec Night et désormais avec Tick Tock, se rapproche davantage d’ambiances aujourd’hui qualifiées de post-rock…
Je le crois bien volontiers, même si la question des styles nous est un peu indifférente. Pour être honnête, je n’écoute pas beaucoup de productions progressives récentes.

Pouvez-vous brièvement retracer l’histoire du groupe et donner quelques détails sur vos influences ?
Tom et Jon se sont rencontrés enfants au Koweit, ils sont arrivés en Norvège à l’âge de treize ans et ont commencé à composer de la musique. Tom a commencé à enregistrer lorsqu’il fut certain d’être capable de bien jouer et c’est là qu’ils m’ont rencontré. Je chantais sur quelques radios où ils se produisaient et m’ont demandé de les accompagner. Les autres sont arrivés un peu plus tard. Nos influences sont nombreuses : Muse, Marillion, Kate Bush, tout comme la musique électronique, notamment Tangerine Dream.


Combien de temps avez-vous passé à l’enregistrement du dernier album ? Comment vous répartissez-vous les tâches ?
Nous avons à peu près passé deux ans à le composer : jouer, enregistrer, conserver ce qui nous convenait, puis finalement retourner en studio. Nous avons tous mis la main à la pâte pour écrire ce Tick Tock car nous possédons tous un petit studio à domicile. Ainsi, on s’envoie nos dossiers, nos idées, ce qui s’avère très efficace. On regroupe en commun, en général le vendredi soir, en buvant pas mal de vin et en laissant l’inspiration venir !

Quelle est selon toi les évolutions par rapport à Night ?
Cet album nous a ouvert de nouvelles portes, notamment concernant le son et les arrangements. Avec Tick Tock, nous avons amplifié ce son, le rendant nettement plus puissant.

Vous n’êtes pas des artistes à plein temps, comment vous organisez-vous entre vos vies personnelles et votre carrière ?
Difficilement il faut bien l’avouer ! Composer est un travail de longue haleine. Nous passons nos vacances à tourner et nos week-ends à composer. C’est un vrai sacrifice et beaucoup de relations ont en souffert mais si ça en valait la peine. Et ça apporte de la magie à nos vies !

Pensez-vous un jour vivre de votre musique au regard de l’évolution de l’industrie musicale ?
La plupart des gens téléchargent notre musique donc on ne gagne guère d’argent avec nos albums. Nous nous sommes mis d’accord : si le groupe grandit encore, il est probable que nos revenus nous permettront de vivre normalement. Je ne pense toutefois pas que ce sera possible, mais tant que les albums et les tournées sont rentables, nous continuons.

Quels sont vos projets à venir ? Avez-vous quelques idées pour l’album à venir ?
Nous commencerons à composer à partir de Pâques, lorsque nous serons revenus de tournée. Nous sommes en contact avec Steve Lyon (NdlR : Depeche Mode, Laura Pausini, Paul McCartney, Cure, Soul Asylum, etc.) qui pourrait intervenir sur notre futur album. Nous le voulons vraiment comme producteur. Les idées viennent mais rien de concret pour le moment.

Un grand merci pour vos réponses. Quelques mots pour nos lecteurs ?
Merci de venir à nos concerts et de nous apprécier. J’ai rencontré beaucoup de gens intéressants au fil du temps. Il ne faut pas hésiter à venir discuter. Je suis sûr que nous serons d’accord sur le fait que le progressif dirige le monde !

Propos recueillis par Jérôme Walczak

site web : Gazpacho

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