Tomahawk - Anonymous

Sorti le: 04/10/2007

Par Aleksandr Lézy

Label: Ipecac Recordings

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On ne parlera jamais assez de l’activité débordante de monsieur Mike Patton. Depuis la fin des années 90, cet homme n’arrête pas de nous étonner : Faith No More en 1989 avec lequel il fera quelques perles, puis trois albums avec Mr Bungle, et bien plus tard Fantômas, Peeping Tom, de nombreuses collaborations avec John Zorn, Dan The Automator, Björk, Kaada, The X-ecutioners, etc … et bien évidemment Tomahawk qui nous intéresse aujourd’hui.

Tomahawk est à la fois le groupe le plus rock et le moins expérimental de Patton, même si c’est avant tout le groupe de Duane Denison. On connaissait jusqu’à maintenant Tomahawk sous sa forme quadrilatérale, il faudra dorénavant le concevoir sous sa forme triangulaire, le bassiste Kevin Rutmanis (ex-Melvins) s’en étant allé. Sous l’impulsion de Duane Denison (Jesus Lizard), Tomahawk met en relation pour la première fois son nom et sa musique pour ce troisième album Anonymous. En effet, il s’agit ici d’utiliser du matériel préexistant dans les archives, les chants des indiens d’Amérique de la fin du 19ème siècle, afin de les remettre à la sauce du groupe. Le résultat est surprenant !

Tomahawk n’est pas le premier groupe à utiliser ce concept d’intégration culturelle et musicale et sa tribalité exacerbée par les rythmes et flux d’énergie : les brésiliens de Sepultura l’avait fait en 1996 avec leur Roots (ndlr : Patton chante d’ailleurs sur le morceau « Lookaway »). Avec la musique des américains, le mélange est tout aussi réussi, on retrouve complètement les sonorités du groupe. Patton démontre encore une fois sa force à s’adapter à n’importe quel environnement.

Le grand chef a sorti toute sa panoplie : vocalises, onomatopées, paroles chantées, bruitages électroniques qu’il a enregistrés ultérieurement et dans un studio (le Vulcan de San Francisco) différent de deux autres musiciens, ceux-ci ayant enregistré à Nashville dans le Tennessee. Duane Denison endosse la double casquette de guitariste – avec de très beaux sons clairs, de la saturation et autres effets discrets, fins et savamment dosés – et celle de bassiste avec un bon gros son diffus. Le travail de John Stanier (Battles, ex-Helmet) est quant à lui tout fait remarquable. La batterie, dont il sait se dépêtrer de mains et de pieds de maître, a été mise légèrement de côté sur la plus grande partie du disque, les percussions gagnant ici bien plus en signification et en originalité. Les mélodies sont typiques de ce que l’auditeur lambda peut se faire de la musique amérindienne de l’époque : on les retrouve dans « Mescal Rite », « Ghost Dance » ou « Red Fox » tandis qu’un morceau comme « Cradle Song » s’en détache totalement.

D’une manière générale, la production est très appréciable. Fort d’un gros son et d’une clarté dans les détails, il s’avère tout de même qu’à volume élevé, les basses sont un peu trop prononcées. Enfin, comme d’habitude l’artwork est soigné et entretient la collectionnite aigüe du fan de Mike.

Anonymous est indéniablement différent des deux précédents disques (Tomahawk et Mit Gas). Voilà pourquoi les adeptes du gourou Patton ne seront pas déstabilisés. La question qui nous vient pourtant à l’esprit est de savoir où se trouve la frontière entre Fantômas et Tomahawk. La séparation n’est plus aussi évidente qu’elle ne l’était auparavant. Et au final, il est un peu gênant de ne pas pour pouvoir se positionner autour de tous ces projets. Cela n’en fait pas pour autant un disque à part dans la discographie du Général. Anonymous est tout simplement différent et réussi.