Sleepytime Gorilla Museum - In Glorious Times

Sorti le: 11/07/2007

Par Aleksandr Lézy

Label: Equilibre Music

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Sleepytime Gorilla Museum, c’est la révélation musicale de ces derniers mois pour certains, de ces dernières années pour d’autres. Mais le fait est là, le groupe grandit en terme de public, mûrit dans sa façon de composer, dans sa façon de jouer. Loin des considérations de groupes recherchant la célébrité avant de proposer un matériel musical intelligent détaché des stéréotypes stylistiques, SGM remet le couvert avec un troisième album, In Glorious Times, à la croisée des deux premiers disques.

Le passé l’a prouvé, il n’est pas évident de rentrer de prime abord dans un disque de Sleepytime Gorilla Museum, comme il est d’ailleurs difficile de rentrer dans un disque de Rock in Opposition tout court. Cependant, avec l’habitude, il a semblé plus aisé cette fois-ci d’apprivoiser ce In Glorious Times. Peut-être n’est-ce dû qu’au fait que SGM a su jouer la carte de la sensibilité en tout début d’album plongeant ainsi l’auditeur calmement dans les affres de son ambiance gothique et grandiloquente, avec la voix grave et chaude de Nils Frykdahl mise en avant. « The Companions » permet avec ces dix minutes d’installer un climat sombre, mystérieux et envoûtant. La rupture avec « Helpless Corpses Enactment » n’est alors que meilleure ; ce court morceau est le pendant de « 1997 » sur le premier album, Grand Opening and Closing : lourd, complexe, direct et facile à retenir, ce titre est le plus metal du disque.

Frykdahl n’est pas seul compositeur du disque, au contraire. Toute la joyeuse bande est mise à contribution, aussi bien dans les textes que dans la musique, chacun ayant sa propre touche, apportant sa propre identité compositionnelle. C’est pourquoi, tout au long du disque, les morceaux s’enchaînent et ne se ressemblent pas : tantôt énervés, tantôt calmes. On est surpris par l’ambiance « glauquissime » de l’ensemble. Pour le coup, la touche Devil Doll n’est pas loin, sans aller jusqu’à parler de Danny Elfman, même si « Puppet Show » nous y fait grandement penser.

Le lien entre les morceaux se fait par le truchement d’enregistrements vocaux du défunt frère de Nils : Per, dont les dessins ont servi comme illustrations au très beau digipack. Ce disque lui est dédié et ses dessins servent de trame à la musique de Sleepytime Gorilla Museum. Il n’y a à priori aucun concept précis, même si In Glorious Times fait preuve d’une grande cohérence et homogénéité, aussi bien dans sa musique que dans l’ambiance générale et les textes. Sur « Formicary », on retrouve les voix de Carla Kihlstedt et Dan Rathbun dans une ambiance « crimsonienne » des plus désarticulée. Il s’agit en fait ici de deux chansons que Dan a écrites pour finalement les réunir en une seule. Avec « Angle of Repose » et « Ossuary », les stridents violons et les évolutions rythmiques se font dans la violence à mesure que les minutes passent.

Enfin, nous ne pourrons nous empêcher de remarquer la suite des cinq derniers morceaux : la suite des « The… » comme une symphonie en cinq mouvements avec son début, typique de la musique du groupe (« The Salt Crown »), son milieu chaotique, sorte de danse macabre (« The Only Dance » et « The Greenless Wreath ») et sa fin en forme d’apothéose instrumentale, totalement dénuée de chant mais non de voix (« The Widening Eye » et « Putrid Refrain »). Tout cela est-il volontaire et le pur fruit d’une parfaite osmose musicale ?

Sur le plan de la production, Dan Rathbun a fait un boulot impressionnant ! Ne se contentant pas d’être un bassiste atypique et « poutresque », son travail de production l’est lui aussi. Le son est surboosté, puissant, clair, comme si on était dans la pièce où se passe l’enregistrement. Tous les petits bruits sont nets et distincts soulignant un peu plus les reliefs et les contours de cette musique musclée, précise et soignée.

Sleepytime Gorilla Museum sert à nouveau un album excellent en tout point, réussissant à combiner tous les éléments qui ont fait leur succès et leur renommée grandissante jusqu’à maintenant : l’ambition des mélanges et l’originalité des compositions. Tout y est ici parfait : écriture, instrumentalité, sensibilité et puissance.
Sleepytime Gorilla Museum a encore une fois fait évoluer sa propre musique en laissant les audaces rythmiques apparentes en arrière plan et ainsi se consacrer aux ambiances et aux effets de surprise avec des expérimentations plus condensées. Plus intimiste que jamais, il faudra du courage aux non-initiés pour rentrer dans l’univers du groupe avec ce In Glorious Times oppressant au possible. Pour les autres, gros risque d’être encore plus « addict » qu’auparavant !