Sensitive to Light - Almost Human

Sorti le: 18/10/2006

Par Jean-Daniel Kleisl

Label: Cyclops Records

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Vynce Leff, délaissant pour quelques temps ses compères de Saens, a formé un nouveau projet avec de nouveaux compagnons très expérimentés, Sensitive To Light. On reste dans la lumière et les sens. D’ailleurs, Vynce Leff est toujours le leader, guitariste, claviériste, producteur, principal compositeur et ingénieur du son. Force est de constater que cela s’entend si l’on compare les albums de Saens à ce Almost Human. Cependant la musique de STL, même si elle reste très écrite et complexe (la Vynce’s Touch), est d’un abord relativement plus accessible.

Almost Human, c’est un concept, celui du mythe de Pinocchio, de la condition humaine et les éternelles questions que seuls des artistes de rock progressif n’ont de cesse d’explorer : où vais-je, où cours-je, dans quel état j’erre ? Plus d’informations sont données sur le site du groupe et, évidemment, dans le somptueux livret qui accompagne le CD.

D’emblée, avec « Pinocchio », on entre dans le vif du sujet : introduction vocale de très haute volée de Jenny Lewis, agrémentée de chœurs très bien sentis, suivi d’une partie très complexe, « Birth », posant les bases du concept qui sera développé dans la suite de l’album. Ce morceau épique a dû nécessiter une minutieuse mise en place tant il est foisonnant. Presque trop d’ailleurs – comme certains titres de Flower Kings, si l’on peut tenter une comparaison forcément hasardeuse mais non dénuée de fondement. Trop de complexité tue la complexité.

Toutefois, résumer la musique de STL à un pur exercice de style serait leur faire injustice et oublier que Vynce Leff est connu pour la qualité de son écriture musicale et de ses arrangements dont certains rappellent la musique classique. De plus, il faut relever l’originalité certaine de STL (tout comme celle de Saens d’ailleurs) dans un style pourtant encombré depuis des années. Enfin, les musiciens sont de très haut niveau à l’instar d’une section rythmique très en verve (Claude Thill à la basse et Georgio Salvini à la batterie), d’un Vynce Leff qui fait feu de tout bois avec sa guitare très « camélienne » et enfin d’un Jean-Philippe Dupont aux claviers qui, contrairement à bon nombre de claviéristes de groupes néo-progressifs, ne noie pas la musique de STL sous des tonnes de plages sonores.

Evidemment, il ne faut pas oublier le point fort de l’album : le chant. Jenny Lewis, la chanteuse écossaise du groupe, est en quelque sorte « la star », apportant une richesse vocale insoupçonnée et une inflexion celtique des plus touchantes. Plus simplement, elle est l’une des plus belles voix dans le giron du « classic prog » ces dernières années (clin d’œil amusé à certains sympathiques forcenés de notre forum). Elle est par ailleurs admirablement soutenue par Vynce dans l’accompagnement vocal.

Si le long épique du début de l’album laissait quelque impression de longueur, il n’en va pas de même pour la suite, qui est de très haut niveau ! « Something Happened… », pourtant tout aussi complexe que son prédécesseur, est beaucoup plus intéressant, avec son superbe final en forme de boléro et cette divine intervention au saxophone de Cyril Queneau-Pitol du groupe Hyskal. Ce dernier, bien que simple invité, enjolive plusieurs parties de l’album ! Un autre sommet est le très symphonique et prenant « Kyrie (Gepetto’s Death) » d’une beauté qui ferait pâlir Sinkadus. Le reste des compositions soutient bien évidemment la comparaison avec les deux pièces précitées tout en étant plus accessibles. Seul le morceau bonus, « Why », fait un peu tache dans cet ensemble très intégré et structuré. Sa présence sur l’album est des plus discutables.

Mais enfin, tous les amateurs de prog symphonique et néanmoins moderne – Vynce Leff n’hésite pas à faire l’usage de power chords, ce qui aurait été impensable il y a quelques années pour ce style musique – devraient être ravis par Almost Human, qui, disons-le une fois pour toute, sera l’une des grandes réussites 2006 de « classic prog » en France avec le Si partie I de Nemo. Ni plus ni moins.