Gargamel - Watch for the Umbles

Sorti le: 10/08/2006

Par Djul

Label: Transubstans Records

Site:

Gargamel ! Mais qui, au sein de ce groupe (car c’en est un !), a eu une telle idée ? Certes, la BD de Peyo a bénéficié d’une reconnaissance internationale (on les appelle les « Smurfs » outre-atlantique), on a pourtant du mal à associer le grand méchant de nos après-midi poussette à un groupe de prog’! A la limite, on aurait préféré Azraël, son stupide complice félidé, qui a le mérite de porter un nom un peu plus diabolique ! Toujours plus fort, Gargamel est aussi une formation musicale liée aux barjots de Sleepytime Gorilla Museum : deux groupes de prog’auraient donc choisi un nom pareil ! Mais passons…

Après des débuts en 2001, et quelques expériences scéniques, les norvégiens signent chez Transubstans Records pour ce premier album à la glaciale pochette, Watch for the Umbles. A l’image de celle-ci, Gargamel propose une musique assez dépressive et glauque, dont les climats oppressants sont renforcés par un goût pour la répétition et les passages rythmiques mécaniques. Le disque est donc massif, pour ne pas dire monolithique, et chaque titre démarre en général de manière assez abrupte, à la manière d’un Van Der Graaf Generator martial, auquel il emprunte ses instruments à vents (flûtes et saxophone, par Tom Uglebakken, également à la guitare). Autre référence (étonnante), on pense souvent à Eloy en entendant le clavier de Arne Ton, son orgue Hammond très « rond », caractéristique du son des allemands. Il est d’ailleurs frappant de voir que cette approche « globale » a pour conséquence immédiate de donner l’impression que ce disque a été enregistré il y a vingt cinq ans, aucune sonorité ne permettant de soupçonner qu’il a été mis en boîte cette année. Une réflexion qui vient aussi à l’esprit à l’écoute d’une autre formation de Norvège, Wobbler.

Progressif pur sucre donc, Gargamel ajoute parfois quelques pincées de jazz dans sa potion amère. De même, il arrive aussi que quelques instruments à cuivres ou à vent (violons et flûtes) viennent dégrossir ces pavés de rock brut, sous forme d’arrangements discrets ou au contraire d’improvisations prenant le pas sur le morceau lui-même (deuxième puis dernier tiers de « Strayed Again »). Mais pour le reste, le groupe se plaît à faire tourner des riffs complexes, à les désosser, pour mieux y revenir, avec un penchant pour des tonalités assez peu mélodiques, voire un peu dissonantes. La voix de Morten Tornes, également à la batterie et aux claviers, est assez monocorde, pour ne pas dépareiller avec la musique, et ses intonations tantôt lancinantes tantôt menaçantes évoquent tour à tour un Ozzy progressif ou Peter Hammill. Notons cependant que la formule des norvégiens est avant tout instrumentale, puisque sur chacun des cinq (longs) titres, les interventions vocales sont assez limitées. Dans un tel contexte musical, difficile de trouver un titre qui sorte du lot, tant l’approche de Gargamel est identique d’un morceau à l’autre (et c’est bien le but recherché – et atteint), mais « Agitated Mind » est une conclusion magnifique, de près de vingt minutes, dont le début rappelle le meilleur de VDGG, pour se muer au fur et à mesure en une longue plainte Floydienne en écho à la seconde partie de Shine On You Crazy Diamond, seul moment où l’auditeur reprendra enfin son souffle.

Gargamel ? C’est schtroumpfement claustro, à la fois rigoriste et timbré, complètement anachronique et c’est sans doute pour cela qu’il apparaîtra comme un disque essentiel à certains de nos lecteurs, pour lesquels ces adjectifs ne sont pas péjoratifs, au contraire.