Karcius - Sphère

Sorti le: 31/12/2005

Par Sébastien Crépy

Label: Autoproduction

Site: www.karcius.com

Lorsque l’on parle du Canada en termes musicaux, et plus précisément en termes progressifs, il n’est pas rare d’évoquer avec affection Rush, Uzeb ou Saga, mais l’on ne pense peut-être pas encore à Karcius ! Karcius… ce mot rappellera peut-être à certains l’album Tarkus d’ELP, petit chef d’œuvre d’un groupe qui, en son temps, lança un pavé dans la mare en faisant fusionner rock, pop et musique classique. Est-ce un choix délibéré, un hommage à ces artistes vénérables ? C’est en tout cas dans un esprit de création sans compromis qu’opèrent les quatre protagonistes québécois de Karcius. 

Une première écoute permettra de réaliser la richesse de l’univers enfanté avec Sphère. Chacun des morceaux fait vivre de manière intense des microcosmes mélodiques frappés par la grâce de musiciens accomplis. 

Très homogènes malgré la créativité débordante dont font preuve leurs géniteurs, les compositions sont marquées par un foisonnement et une technicité propres aux meilleurs albums de progressif. Avec une guitare incisive, une basse dynamique aux slaps inquiétants par moments et une batterie dont les fûts claquent de manière sèche et précise, les claviers contribuent de manière appréciable à ces instrumentaux : entre un acid jazz très seventies que ne renierait pas un claviériste de légende comme Chick Corea et des envolées classiques dont Beethoven aurait été fier, on crapahute de surprises en surprises avec Karcius. 

Une telle richesse est souvent difficile à ingurgiter – surtout si celle-ci est prétexte à des changements rythmiques et structurels incessants – mais Karcius ménage son public avec des récréations fréquentes et bien senties. L’incipit « Kunidé » unit ainsi ballades aux tons hispanisants et shuffles jazzy frénétiques flirtant avec les confins de l’expérimentation. Le tout évoque sans conteste les grosses pointures du genre, King Crimson, Brand X et parfois même Liquid Tension Experiment.
Quant à « Lunatik », nous avons là un triptyque de vingt minutes à la fois complet et surprenant: l’apparition de quelques soli et cadences très thrash au détour de moments de piano jazz éthérés a de quoi attirer l’attention ! 

Il serait vain de s’épancher davantage. Karcius se positionne de fort belle manière sur un marché où il est difficile d’innover véritablement. Impossible à circonscrire, remettant au goût du jour certains sons et styles un peu moribonds, nos quatre alchimistes proposent une œuvre extrêmement fluide qu’il serait de bon goût de se procurer avant la sortie imminente du deuxième album !