Gerard - Power of Infinity

Sorti le: 20/03/2005

Par Djul

Label: Musea

Site:

Lenormand ? Manset ? Presgurvic ? Non. Gerard tout court. Qui fait du progressif et non de la variété. Japonais, au surplus. Bref, un patronyme trompeur, à l’instar de ses compatriotes de Fromage !

Roulant sa bosse depuis plus de vingt ans au pays du Soleil Levant, où le temps semble parfois s’arrêter et où les tournées de Steve Hackett et John Wetton affichent toujours complet, Gerard fait figure de patriarche d’une scène très dynamique. Si celle-ci nous a offert quelques perles en matière de jazz barré (Machine and the Synergetic Nuts, Otomo Yoshihide, ou encore Six North), c’est également le pays qui héberge quelques fous furieux du clavier, comme Ars Nova ou Gerard. Emmené par Toshio EGAWA (Novela, Sheherazade, Earthshaker…), ce « power trio », pendant masculin de Ars Nova, en est à son dixième album officiel. Et, encore une fois, Gerard redéfinit le terme « pompier », allant même jusqu’à débuter et terminer son morceau introductif par… une alarme !

Pour se figurer la musique de Gerard, il faut imaginer un Emerson Lake and Palmer (enfin, surtout Emerson !) encore plus abracadabrant, enchaînant des passages survoltés et des envolées lyriques délicieusement kitsch. Ca y est, le mot est lancé, et même s’il est connoté, comment ne pas l’employer à l’écoute de ses sonorités très datées et très synthétiques ? A condition de pouvoir « supporter » cette avalanche de virtuosité déballée et de romantisme larmoyant, ce Power of Infinity (quel titre !) ne laissera pas indifférent. Car ce kitsch est finalement assez rare de nos jours, tout comme le fait de trouver des groupes qui osent encore des instrumentaux de plus de dix minutes comme « Caravan On The Moon » (et son passage ethnique bienvenu) ou se lancer dans un pavé d’un quart d’heure mêlant ELP et néo-prog (« Blue Word »)

En ce sens, les interventions vocales du chanteur italien Alex Brunori, ancien Leviathan, permettent d’alléger cette trame musicale dense, d’autant que le bonhomme s’en sort fort bien, et magnifie un titre comme « Only The Light », certainement la composition la plus équilibrée du disque avec ses claviers à la UK. En fait, la seule vraie faute de goût est à mettre sur le compte du morceau-titre, où les sonorités de claviers sont à la limite du risible (surtout les premières minutes), Gerard se perdant dans des digressions sans jamais attirer l’attention.

Finalement, Gerard est au progressif ce que le rococo est aux arts décoratifs : une folie pleine d’extravagance, boursouflée mais rayonnante. Et, tout comme le fait de vivre dans un appartement plein d’ornements colorés, une écoute prolongée de Gerard risque d’écœurer bien vite. Mais sur une envie, à condition de ne pas être allergique à ce que le progressif a fait de plus emphatique, on peut apprécier ce disque anachronique.