Caprice - Sister Simplicity

Sorti le: 20/08/2004

Par Djul

Label: Prikosnovenie

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Signé sur le label français Priskosovénie, connu des amateurs de musiques atmosphériques et gothiques, Caprice est un groupe russe ayant déjà quatre albums à son actif, fondés sur des concepts très différents, le dernier d’entre eux étant consacré au Seigneur des Anneaux.
Dans la lignée de certains collègues de label, Anton Brejtovski (compositeur) et Inna Brejestovskaya (chant) s’inspirent de la musique « classique », et plus exactement baroque, et en proposent une version épurée et plus accessible, sans tomber néanmoins dans les facilités du « gothique ». Plus original que son prédécesseur, Sister Simplicity a pour ambition de mettre en musique une série de poèmes composés par les plus grands auteurs anglais, de Byron à Shakespeare en passant par Shelley et Wilde (les époques choisies étant en parfaite adéquation avec le genre auquel Caprice emprunte).

On retrouve donc un univers musical coloré, rappelant l’opéra dans sa volonté d’expression, et joué par six musiciens (violon, violoncelle, flûte, clarinette, haut-bois, piano). Les climats développés sont souvent mélancoliques, sans que le groupe cherche à forcer inutilement le trait, notamment en jouant sur le côté doux-amer de la voix de sa chanteuse (le splendide « To My Sister », ou « Autumn »). Les moments les plus enjoués font, quant à eux, irrésistiblement penser à Purcell, sans aucun doute une source d’inspiration majeure de Caprice. Les mélodies sont simples, et aisément mémorisables (« The Green Bowl », le dramatique « Juliet’s Beauty »), mais les rythmes imprimés par les instruments à cordes sont souvent soutenus. Parfois l’ensemble peut se complexifier, comme sur « Once Kings », pas si loin de Magma (voix masculines / féminines sombres) ou d’Univers Zero (hautbois entêtant). L’ajout de techniques modernes est quasiment imperceptible, à l’exception d’une boîte à rythme souvent légère, qui ne fait que marquer le tempo (sauf « The Dole of the King’s Daughter »). Il manque juste parfois à certains titres un peu plus de personnalité ou de prise de risque pour surprendre l’auditeur, même si la cohésion de l’ensemble et le plaisir de l’écouter d’une traite auraient peut-être été entamés.
Si l’on devait décrire la voix d’Inna Brejestovskaya, on pourrait dire qu’il s’agit d’un compromis réussi entre Sara Mc Laughlan, pour la rigueur technique et Tori Amos, pour les envolées et le petit grain de folie. Son débit et son phrasé, s’adaptant à des lignes mélodiques parfois heurtées, est rarement mis en défaut : l’exigeant « Nothing Will Die » est parfaitement interprété. On regrette juste que Caprice n’ait pas trouvé bon de plus jouer sur les dédoublements de voix, sûrement par souci d’authenticité. La voix masculine présente sur trois titres s’avère plus critiquable, car son aspect récitatif et langoureux rend pénible et précieux les morceaux en question.

Il est conseillé de lire les paroles, disponibles sur le site du groupe, en même temps que l’écoute du disque, pour plus d’immersion, la voix très théâtrale d’Inna n’aidant pas à la compréhension des textes, malgré un accent maîtrisé. Par ailleurs, le disque propose une plage multimédia en forme d’interview des membres du groupe dans leur studio.
Voici donc une idée ambitieuse, composée avec talent et faisant preuve d’un réel respect des textes dont elle se veut l’illustration. Caprice offre une musique agréable à l’écoute mais toujours sophistiquée, et qui donnera à cet été un avant-goût d’automne.