– Headway Festival

LIVE REPORT : HEADWAY FESTIVAL 2004

 

Artistes : Xenobia, Textures, Mister Kite, Death Machine, Laberinto, Watchtower, Karma, Anand, Biomechanical, Ephel Duath, Ice Age, Sieges Even
Lieu : Amstelveen, P60
Date : 3 & 4 avril 2004
Photos : Dan Tordjman


Fort du succès de l’édition 2003 première du nom, le festival Headway, cru 2004, était attendu avec une certaine impatience. Cette année encore, l’affiche avait de quoi séduire, avec de réelles raretés scéniques : ce n’est en effet pas tous les jours que Watchtower ou Sieges Even sont en tournée… Progressia a donc envoyé l’un de ses espions, dont voici un compt- rendu détaillé de ces deux jours de frénésie musicale.

C’est sous les nuages que se trouvent à nouveau Amstelveen et le P60, où l’édition 2003 s’était déjà tenue. Après un rapide salut aux organisateurs, direction la scène, pour retrouver les Hollandais de Xenobia, à qui revient la lourde tâche de déclencher les hostilités. Principale curiosité de cette formation : une jolie violoniste en lieu et place d’un claviériste, déclenche un certain intérêt dans les rangs du public pour le début de la prestation du groupe… qui s’atténuera tout au long de la performance quasi-instrumentale de Xenobia. Pourtant le guitariste-leader, Collin Hoeve, joue réellement bien, mais cela se semble hélas pas suffisant. Malgré de bonnes idées, Xenobia doit encore travailler la mise en place… le groupe est donc à revoir dans de meilleurs conditions pour s’en faire une réelle idée. Néanmoins le public encore clairsemé du P60 se montre compréhensif.
Si cette cuvée 2004 débute donc plutôt “calmement“, le P60 connaît un premier séisme avec une autre formation batave, Textures. Si son album, Polars, peut paraître linéaire, l’histoire est toute autre sur scène ! Puissance et gros son sont de mise, avec une prestation sans temps morts, qui casse la nuque des nombreux headbangers ! Une première rafale est passée sur le P60. Combien y en aura-t-il ?

Ce ne seront pas hélas les Suédois de Mister Kite, qui provoqueront le second choc de la journée. Auteurs d’un set remarquable malgré l’absence de leur guitariste malade – remplacé par le guitariste originel du groupe, pas chien – et une guitare sous-mixée, ils ne réussissent cependant pas à s’attirer les faveurs du public dont ils voient une grande partie s’en aller se rassasier durant leur passage… A noter : “All In Time“ et “From This Day On“, qui furent les titres les plus puissants de leur répertoire.

Après la pause dîner, une bonne digestion s’imposait, mais il ne fallait pas compter sur Death Machine pour vous faciliter la chose ! Cette formation est en réalité le projet annexe des jumeaux Tipton et de Mike Guy, qui officient habituellement au sein de Zero Hour. Au vu de l’enthousiasme du public, les Pays-Bas sont manifestement la deuxième patrie des Californiens. Cette prestation était l’occasion de découvrir Tipton & Co. dans un nouveau registre, bien plus agressif que Zero Hour, et surtout, dans un accoutrement inhabituel. Chaque musicien est en effet déguisé : Jasun Tipton fait figure d’émule de Gene Simmons tandis que Troy officie en Daredevil, basse en main. Death Machine verse dans un death metal mélodique proche de Soilwork et fait sérieusement s’agiter le P60. Dans l’audience, Ron Jarzombek, qui nous a fait part de sa curiosité quant à Death Machine, est attentif. Les crinières fusent de toutes parts et le groupe s’en tire avec les vivats du public.

Il était visiblement écrit que cette première journée serait placée sous le signe de la poésie : Laberinto, inconnu de la plupart du public, s’élance dans un jeu pour le moins déjanté, dans ce que le groupe nomme du « metalatino ». Évoluant dans un style proche de Suicidal Tendencies, Laberinto enflamme le P60, notamment lors du moment fort du concert, lorsqu’une une groupie tente de monter sur le dos de l’imposant bassiste du groupe et tombe à la renverse. Si le public éclate de rire, il n’en adhère pas moins à la musique et salue la prestation comme il se doit.

Il est ensuite temps d’accueillir la première tête d’affiche de ce Headway 2004, et ça n’est rien moins que le légendaire Watchtower qui est chargé de boucler la première journée. Le P60 réserve une véritable ovation aux Américains, visiblement ravis d’être là et qui le montrent : Ron Jarzombek taquine les photographes, cherchant à échapper à leurs objectifs, tandis que Doug Keyser, qui arbore un magnifique costume vert rappelant l’Homme-Mystère de Batman Forever, semble tout juste sorti d’un asile spécialement pour l’occasion, grimaçant sans arrêt. Jason Mac Aster et Rick Colaluca ne sont pas en reste : le premier joue avec la foule comme un chien avec sa balle et le second crée des parties de batteries en fer forgé, en se fendant en prime d’un petit solo qui n’en enfoncera le clou que plus. S’agissant des titres joués, les classiques du groupe ne sont pas oubliés : “Control And Resistance“, “The Fall Of Reason“, “Eldritch“ etc. Watchtower ne fait pas les choses à moitié et offre même au P60 un cadeau à savourer sans aucune modération : lors du rappel, prodigues, les Américains reprennent le mythique 2112 de Rush dans son intégralité. Un grand moment, sur lequel se referme cette première journée, et c’est en compagnie des jumeaux Tipton, qui partagent le même hôtel que nous, que nous repartons nous coucher !

Après les nuages, le soleil : celui-ci irradie alors que débute cette deuxième journée, pendant laquelle l’honneur revient encore aux Pays-Bas d’ouvrir le bal, avec Karma. Comptant dans ses rangs Irene Jansen, la petite sœur de Floor (After Forever), Karma délivre un power metal teinté de quelques éléments progressifs. S’il ne faut pas forcément rechercher l’originalité dans les titres du groupe, la surprise vient d’Irene Jansen, qui n’a pas à être jalouse de sa sœurette (NDD : nous avions d’ailleurs déjà eu l’occasion d’apprécier ses performances vocales lors de la tournée de Star One). Arjen Lucassen a fait preuve d’un certain flair en l’invitant sur The Human Equation : la jeune femme a immanquablement de quoi séduire. Karma est une très bonne entrée en matière, donc, malgré un son perfectible.

Changement radical de style avec Anand, figure nationale de la guitare : et comme on pouvait le deviner, la performance est instrumentale. Le guitariste s’est entouré pour l’occasion de Barend Courbois à la basse (autre grand nom en son pays, ex-Lemur Voice) et de Joost van den Broek (Sun Caged) qui semble multiplier ces temps-ci les collaborations extérieures (NdD : Joost apparaît également sur The Human Equation d’Ayreon). Là non plus, pas de surprises mais les néophytes semblent apprécier, la musique d’Anand ne versant pas dans l’ultra technique. Voilà au moins de quoi éviter le déluge de triples croches traditionnel dans ce type de prestations.

La leçon de tendresse entammée la veille reprend grâce aux Britanniques de Biomechanical. Accompagnée d’une délégation anglaise de fans, la formation verse dans un power metal teinté d’éléments thrash, le tout saupoudré d’une touche “moderne“. À ce titre une comparaison avec Kill II This ne serait pas absurde. Les rythmiques de la paire Jamie Hunt / Chris Webb font mouche et le chanteur, John K., impressionne par sa facilité à passer d’un registre suraigu à la Rob Halford à des grognements dignes de Phil Anselmo. Biomechanical érige un véritable mur du son qui assourdit le P60. La première grosse gifle de la journée pour un public pas encore au bout de ses peines…

C’est aux Italiens d’Ephel Duath de relancer les hostilités après la pause dîner. La diligence du restaurateur chinois voisin nous fait manquer l’essentiel du concert des Transalpins, visiblement très influencés par Meshuggah, sans compter quelques éléments jazz. Si les « beuglements » de Luciano George Lorusso sont à la limite du supportable et provoquent le départ d’une partie du public, les musiciens qui l’accompagnent doivent être retenus : mise en place et maîtrise de l’instrument, ces instrumentistes ont tout compris.

Vient ensuite un groupe qui a longtemps divisé les fans de metal progressif soigné. Ice Age, quatuor américain encensé par certains, littéralement descendu par d’autres, n’a pas donné de signes de vie depuis Liberation en 2001. Le groupe investit la scène sous les applaudissements de la foule, sans se préoccuper de savoir dans quel camp se situe le public du jour, qui d’ailleurs ne s’y trompe pas : la formation offre un concert en tous points remarquable. Josh Pincus est impérial, à la fois au chant et aux claviers, et ses acolytes ne sont pas en reste. Le groupe joue de nombreux titres figurant sur leur nouvel EP éponyme, et la réponse du public s’élève à la hauteur de la prestation. On attend l’album avec impatience.

Le moment tant attendu par une grande partie de la salle arrive enfin : c’est à Sieges Even que revient l’honneur de clôturer ce Headway édition 2004. Visiblement très détendus, les Allemands débutent leur concert avec “Repression“. Derrière sa batterie, Alex Holzwarth est tout sourire – quand il n’a pas la cigarette aux lèvres. Le nouveau chanteur – hollandais – du groupe, Arno Menses, fait une très bonne démonstration de l’étendue de son registre et donne raison au groupe de l’avoir recruté. Sieges Even se permet même de jouer un extrait de son album à venir The Art Of Navigating By The Stars, décrit comme étant un unique titre de plus de quarante minutes. Inutile de préciser que l’album est attendu avec impatience. Suivent ensuite les classiques du groupe : “Life Cycle“, “Steps“, “Dimensions“, “Tangerine“… Si le concert en lui-même est impressionnant, on regrettera cependant le manque flagrant d’interactivité entre Sieges Even et son public. Collé à son ampli, Markus Steffen se regarde jouer tandis qu’Arno Menses, pris entre deux passages instrumentaux, arpente la scène ne sachant que faire. Heureusement que les yeux sont souvent fixés sur Alex Holzwarth, qui assure le spectacle à lui seul. Mais le public n’en a cure et réserve à Sieges Even une véritable ovation, mettant ainsi fin à deux jours de folie musicale à Amstelveen.

Dan Tordjman

site web : http://www.headwayfestival.com

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