Motorpsycho - Here Be Monsters

Sorti le: 23/02/2016

Par Aleksandr Lézy

Label: Rune Grammofon

Site: http://motorpsycho.no/

Un album de Motorpsycho est toujours vécu comme un grand événement. Avec des sorties régulières espacées d’un an ou deux, notre insatiable gourmandise ne souffre d’aucuns maux. Les morceaux réunis sur Here Be Monsters ont été commissionnés pour les cent ans du Musée Norvégien des Sciences et de la Technologie et joués une seule et unique fois en novembre 2014 par une formation qui comprend en plus aux claviers Ståle Storløkken (Elephant 9, Supersilent, Terje Rypdal, etc.). Tout ça ne pouvait rester dans l’oubli, le trio de base a décidé de transformer le coup en un nouveau projet pour Motorpsycho !

Ce n’est ni un double album, ni un très long disque : sept pistes, dont deux de moins d’une minute, identiques ou quasiment, une reprise et un long morceau de presque dix-huit minutes. On est dans l’esprit de Still Life With Eggplant sorti en 2014, la même année que ce fameux concert. En tout état de cause, à l’écoute de ce nouvel album, plusieurs détails sont immédiatement perceptibles : la douceur et l’atmosphère légère de l’ensemble, l’immédiate imprégnation du style Motorpsycho reconnaissable entre mille, précis et chaleureux, le peu de chant et de soli de guitares dérangés tout au long des morceaux, la superbe qualité de la production.

Comme l’album est assez court, plusieurs écoutes d’affilée permettent de s’imprégner un peu mieux de l’essence du disque, plutôt fade de prime abord. Il est évident qu’il manque un peu d’énergie dans la première partie puis dans la seconde et notamment dans le long et presque magmaïen « Big Black Dog » : les moments d’intensité sont lâchés avec retenue mais renforcés par un brin de tourment et de mélancolie. C’est un peu le constat : le disque se situe énormément dans les émotions comme sur le floydien « Lacuna Sunrise », dont le thème et le refrain sont tout simplement magnifiques, et moins dans le psychédélisme déchaîné qu’on leur a connu, mais qui se retrouve toutefois sur « I.M.S ». La reprise du « Spin, Spin, Spin » de Terry Callier est en définitive une chanson très représentative du groupe, avec les voix qui s’entremêlent, les guitares acoustiques qui montent les harmonies et les intensités qui s’élèvent progressivement : une appropriation réussie haut la main.

Pour un dix-septième album, Here Be Monsters remplit plus ou moins le cahier des charges de Motorpsycho. Plutôt calme et moins fou mais néanmoins très attrayant et somptueux, il s’agit d’une sorte de fourre-tout de ce que le groupe sait faire de mieux, un best-of clairement ramassé et compressé. Il faut se rendre à l’évidence : Bent, Hans et Kenneth, accompagnés de Ståle, fonctionnent à l’instinct sans se fixer de limites. Au final, il s’agit tout de même d’une réussite – certes moins éblouissante que The Death Defying Unicorn (2012) – mais une réussite, à un autre niveau.