Änglagård – Retour gagnant

Après un retour très réussi en 2012 avec la sortie de Viljans Öga et du live Prog på Svenska – Live in Japan en 2014, le groupe culte suédois Änglagård donne son premier concert à Paris, l’occasion pour l’équipe de Chromatique de s’entretenir pour la première fois avec Johan Brand, bassiste du groupe depuis sa création.

Chromatique : En 2012, Änglagård a sorti Viljans Öga presque vingt ans après Epilog, peux-tu nous raconter ce qu’il s’est passé pendant cette période?
Johan Brand
: La situation du groupe n’était pas viable en 1994. Nous travaillions très dur et intensément pendant cette époque qui était à la fois merveilleusement créative et très difficile pour nos relations au sein du groupe. Nous avons décidé de sortir un dernier album studio Epilogue et faire un dernier concert au Progfest 94 aux Etats-Unis [NDR enregistré sur l’album Buried Alive]. Après ça, il était essentiel de faire une pause significative. Nous avons suivi notre vie en général mais la musique est toujours restée présente dans nos esprits même pendant ces longues années. Änglagård a simplement été dormant durant les différentes périodes de nos vies.

Änglagård est devenu un groupe très important dans l’histoire du rock progressif et il y avait beaucoup d’attentes après cette pause de vingt ans. A-t-il été difficile de créer un nouvel album alors que les deux précédents sont considérés comme des classiques?
Änglagård a toujours créé sa musique comme il l’entendait : sans compromis. Nous n’attachons pas vraiment d’importance à ce que nous avons créé dans le passé ni à ce que font les autres groupes de prog aujourd’hui. Le plus important est de rester concentré et croire en ce que nous faisons.

Vous êtes de retour avec une formation à deux guitaristes, ce qui n’était pas arrivé depuis 1994, est-ce que cela va changer quelque chose pour les concerts à venir?
La musique d’Änglagård a été écrite pour deux guitaristes il est donc naturel que nous redevenions un sextet. Les concerts vont être plus puissants et plus variés.

Lorsqu’Änglagård a débuté au tout début des années 90, votre musique ressemblait beaucoup aux productions des années 70 en terme de son et de textures (avec la présence importante du Mellotron ou de la flûte). Aujourd’hui des artistes comme Opeth ou Steven Wilson sortent des albums avec l’intention de retourner aux racines du rock progressif et ont eu beaucoup de succès. Que penses-tu de cette nouvelle mode?
A mon avis la musique progressive se perd un peu de nos jours. Beaucoup d’artistes se présentent comme étant progressifs mais écrivent plutôt du pop rock mélodique. Je ne citerai pas de noms…

La plupart des groupes scandinaves chantent en Anglais, était-ce important pour vous d’avoir des paroles en Suédois?
Nous sommes suédois et il est naturel pour nous de nous exprimer dans notre langue maternelle, la musique en devient plus personnelle et unique.

Quand on écoute Änglagård, il se dégage une ambiance nordique, êtes-vous influencés par les musiques traditionnelles scandinaves?
Oui tout à fait, nos racines se trouvent dans la musique nordique avec des artistes comme Jan Johansson, Merit Hemmingsson ou Kebenekajse. Nous continuons cette tradition et intégrons cet aspect dans nos albums.

Votre musique est très complexe, comment se passe le processus de composition?
Il n’y a pas d’idées précises au départ quand nous composons. Nous venons chacun avec des compositions que nous regroupons dans de longs morceaux. Le plus difficile est d’arriver à mettre ces idées différentes dans un ensemble cohérent. C’est important de trier les bonnes émotions, les thèmes musicaux, et de les rassembler. Ce qui rend la musique Änglagård unique c’est que tous les membres ont une façon spéciale de composer. Mettre tout ça ensemble crée le son particulier du groupe.

La musique du groupe est assez sombre et mélancolique, d’où penses-tu que cela provienne?
Cela provient de notre mentalité nordique, nous vivons dans un pays où il fait sombre et froid la plupart du temps, alors tu composes chez toi à l’intérieur et allume des bougies.

Vous étiez très jeunes quand vous avez débuté dans la musique, avez-vous changé de point de vue sur la composition et la création?
Si tu écoutes nos albums, tu peux entendre clairement notre développement musical. Les albums deviennent plus personnels et possèdent une touche plus étroitement progressive au fil des ans. Sur notre dernier album Viljans Öga, nous avons repoussé les frontières musicales si bien que beaucoup de fans peuvent être déroutés à la première écoute. Il faut beaucoup d’écoutes pour comprendre et assimiler cet album, mais nous pensons que c’est ce qui définit la musique progressive.

Que penses-tu de la scène progressive contemporaine?
C’est une question pertinente et nous réfléchissons beaucoup à ça dans le groupe. Aujourd’hui la musique progressive s’est transformée en rock ordinaire, je ne dirai pas de noms… et Änglagård est considéré simplement comme du prog « vintage » par certains. Écoute Viljans Öga sorti en 2012, est-ce qu’il sonne réellement rétro ? Bien sûr, nous jouons beaucoup avec des instruments de cette époque mais je dirais que cet album représente ce le rock progressif revendique : repousser les limites, être novateur et ne pas suivre les tendances.

Quels sont vos projets pour le futur, travaillez-vous sur un nouvel album?
Tous les membres écrivent de la musique et nous avons beaucoup de nouvelles idées et de nouveaux thèmes musicaux qui doivent passer pas le filtre d’Änglagård avant de devenir des morceaux du groupe. C’est un moment très excitant, nous avons un nouvel album à l’esprit mais seuls les dieux du prog savent quand il sortira!
Nous avons l’idée d’enregistrer l’album dans les conditions du live autant que possible quand nous serons en studio. Je pense qu’il y a une saveur complètement différente quand nous jouons tous en même temps et transmettre ce sentiment vaut de l’or. Nous continuerons bien sûr à jouer en concert.