– (1/6) : Des groupes qui OZ.

L’Australie se révèle être, depuis quelques années, une véritable pépinière de formations progressives. Chacune a choisi une orientation musicale bien particulière et la qualité est au rendez-vous. Si certaines ont opté pour la voie d’un progressif classique, d’autres ont voulu en explorer une autre, sortant des sentiers battus. Chromatique s’attarde aujourd’hui sur les groupes fer de lance du mouvement tout en tentant de revenir sur la généalogie de cette scène progressive, en interrogeant quelques uns afin d’avoir leur point de vue sur l’émergence de ce courant musical.

On peut dresser un parallèle entre la Suède et l’Australie. Le premier pays a vu naître de véritables groupes cultes et ce depuis les années soixante-dix avec ABBA. Un niveau de qualité rarement atteint qui a su perdurer au travers de groupes tout aussi « mainstream » que Europe ou Roxette. Dans les années quatre-vingt-dix et deux mille, le propos s’est considérablement durci avec l’émergence de la scène dite de Göteborg. Citons le Big 3 composé d’In Flames, At The Gates et Dark Tranquillity, ainsi qu’Arch Enemy, Opeth, Meshuggah ou Pain of Salvation. L’Australie, quant à elle, a également connu un certain engouement avec AC/DC (bien que ces derniers ne soient pas australiens d’origine) mais aussi avec l’éclosion de la jolie minette Kylie Minogue, d’INXS, de Men At Work et des rockers engagés de Midnight Oil (tellement engagés que Peter Garrett, chanteur et leader charismatique du groupe, s’est reconverti dans la politique). Plus récemment, on a pu noter le succès d’artistes comme Silverchair et, dans un registre toujours « mainstream », The Baby Animals et The Living End.

Dans le cas de cette scène progressive, il est intéressant de constater que certains groupes, sur lesquels on ne parierait en France pas un kopeck quant à un potentiel passage en radio, parviennent à faire leur trou face à des artistes de musique country, dont une grande partie de la population australienne est très friande. Citons Karnivool, The Butterfly Effect et Dead Letter Circus. Nous nous étions déjà entretenus avec les premiers lors de leur passage à Paris en décembre dernier. Nous nous sommes donc tournés en toute logique vers leurs petits camarades dont les entretiens seront bientôt en ligne. Nous avons également interviewé ToeHider et son éminence grise Mike Mills, afin de rétablir un certain équilibre en faveur d’une musique progressive plus traditionnelle, et surtout de permettre à notre lectorat de s’intéresser à ce groupe qui devrait plaire à nombre d’entre vous. Enfin, pour finir, mentionnons également Alarum, équivalent australien de Cynic et Atheist dont le nouvel album Natural Causes vient de sortir. Pour y voir un peu plus clair, nous avons discuté avec Mark Baston, originaire de Brisbane et rédacteur pour le site Perfectprog.com, afin de connaître son sentiment sur le relatif essor de ces formations progressives. Mais avant cela, tentons de dresser une généalogie de la scène rock australienne.

Impossible de ne pas penser à Rose Tattoo, Cold Chisel, Little River Band ou AC/DC (bien qu’originaires d’Ecosse, les frères Young se sont installés Down Under en 1963). Les années quatre-vingt virent émerger de nombreuses formations dont la renommée a dépassé les frontières du continent. Si AC/DC était déjà un monstre dans le monde entier, cette période vit INXS, Midnight Oil, Men at Work ou encore Crowded House accaparer les premières places des divers hit parades, chacun dans son propre style : pop-rock pour INXS, politiquement engagé pour Midnight Oil, pop grand public pour Men At Work et alternative pour Crowded House.

Les années quatre-vingt-dix virent se succéder différentes formations qui, là aussi, firent leur trou avec leur propre style, mais sans pour autant réussir à s’exporter. Ainsi, The Living End (clone de Green Day made in OZ), The Baby Animals (au parfum noisy) et surtout Silverchair (l’exception qui confirme la règle et qui connaît un succès grandissant sur la planète) occupèrent le devant de la scène. Le groupe de Newcastle vit d’ailleurs son public s’accroître en embrassant une musique plus progressive et plus variée, aux antipodes du grunge de ses débuts.

Depuis 2000, pléthore de groupes de rock tentent de se faire une place au soleil dans ce pays où la musique country a plus droit de cité que le rock. Or, depuis quelques années, on assiste à un retour en force des formations de rock australien issus notamment de la frange alternative. Elles ont la particularité de mêler ces influences à des groupes progressifs. Coheed & Cambria et Muse étant les chefs de file (bien qu’américains et britanniques), aux côtés de Cog, influence principale de Karnivool, The Butterfly Effect ou Dead Letter Circus. D’ailleurs ces deux groupes ont accepté de répondre à nos questions. Concernant la scène progressive plus typique, Mark Baston a peint dans notre interview, un tableau que nous vous invitons à lire.