Captain Squeegee – Captain Squeegee

ENTRETIEN : CAPTAIN SQUEEGEE

Origine : Etats-Unis
Style : fusion jazz pop progressive
Formé en : 2002
Composition actuelle :
Austen Mack – claviers, guitare, chant, percussions 
Chris Hoskins – saxophone ténor
Danny Torgersen – chant et trompette 
Kory McCarthy – guitare 
Mat Malloy – batterie 
Ryan Sims – trombone et chant 
Tyler Carlblom – basse 
Dernier album :
Nothing vs Everything (2008)

On s’attend rarement à recevoir une leçon de musique de la part d’une bande de jeunots à peine sortis du lycée, encore moins d’un groupe en provenance de l’Arizona. C’est pourtant bien une démonstration que nous infligent les post-ados de Captain Squeegee sur leur surprenant Nothing vs Everything, concentré de classe à l’état pur. Et comme un tel talent intrigue forcément, Progressia n’a pu résister à la tentation de rencontrer Danny Torgersen, cerveau de cet improbable septuor.

Progressia : Vous donnez l’impression d’être une bande de joyeux étudiants. Captain Squeegee  est-il un groupe de « potes » monté « pour le fun » ? Quel est – sans mentir ! – l’âge moyen dans votre groupe ?
Danny Torgersen
: Le terme « joyeux » est assez pertinent en effet, bien que nous ne fassions pas de la musique spécifiquement pour le fun. Nous adorons tous la musique, à un point presque dangereux pour l’homme. C’est notre plus grande force motrice. Ceux qui sont à l’origine du groupe l’ont pour la plupart quitté ou ont été remplacés. Nous ne sommes même pas complètement sûrs de l’origine de notre nom. Austen a été le premier d’entre nous à intégrer le groupe au milieu de l’année 2002 ; et les autres sont arrivés dans les deux ou trois années qui ont suivi. Bien que certains d’entre nous aient fréquenté le même lycée, nous sommes plutôt une collection aléatoire de musiciens en provenance de diverses banlieues, qui se sont trouvés via internet et / ou au petit bonheur la chance. J’aimerais pouvoir dire que nous sommes tous des prodiges de quatorze ans, mais la fourchette dix-neuf / vingt-deux ans est bien plus réaliste.

Nothing vs Everything est gorgé d’influences très diverses, ce qui est surprenant pour un jeune groupe. Chaque membre apporte-t-il sa pierre à l’édifice ?
Les membres de Squeegee ont des goûts musicaux très éclectiques. Nous sommes à fond dans les musiques progressives en tous genres depuis que nous nous sommes rencontrés. Lorsque j’écris un titre, il se trouve très souvent transfiguré par l’influence de chaque musicien en quelque chose de plus abstrait, une sorte de magnifique paysage musical.

Justement, sur Nothing vs Everything, tu es crédité pour la totalité de la musique. Quelle est la contribution réelle des autres membres du groupe ?
Je fais une sorte de storyboard, si tu veux, une ébauche de chanson avec des idées, des suggestions, ou même des partitions. Je rencontre chaque musicien individuellement, nous mettons ensuite tout en commun avec le groupe, et c’est ainsi qu’un morceau évolue vers une version beaucoup plus riche que tout ce que j’aurais pu imaginer. C’est un peu comme si je donnais naissance à des enfants et que l’ensemble du groupe les élevait, comme les êtres dans K-Pax, film génial sorti en 2001 avec Kevin Spacey.

La production de votre album est très organique, proche d’une performance live, ce qui lui donne un côté spontané. Dans quelles conditions d’enregistrement avez-vous réalisé Nothing vs Everything ?
Nous avons enregistré aux SoundVision Studios à Tempe, dans l’Arizona, avec l’ingénieur du son et coproducteur Mike Beck. C’est très amusant de travailler avec lui. Nous avons enregistré la batterie en premier, avec Mat et moi, puis les guitares, les cuivres, le chant et – la partie la plus intéressante – tout le reste. Ce son organique provient de notre désir de ne pas surproduire inutilement notre musique. Il s’agit simplement de l’enregistrer correctement ! Les cuivres ont été équipés de micros à la fois individuels et communs, ce qui leur donne un son particulièrement live. Ce que j’ai enregistré de plus sympa, ce sont les pelletées de gravier synchronisées avec le titre « Shovel ».

Vous avez enregistré un disque nommé Behind the Metal and Metric Pace, sous le nom Captain Squeegee and the Soap Suds, dans un genre assez proche. S’agit-il d’un projet parallèle ? D’un groupe précédent ?
Lorsque nous avons enregistré notre premier EP officiel de six titres, Behind the Metal, le groupe était encore attaché à son nom « de jeunesse », donné par ses mystérieux pères fondateurs, qui nous ont laissé le ska en héritage et que nous avons vite laissé de côté ! Le nom Captain Squeegee est apparu avec Nothing vs Everything et représente simplement notre maturité. Aujourd’hui, nous appelons nos fans les « soapsuds » (NdlR : « lessives au savon » !), c’est pour nous une manière de reconnaître leur importance dans notre parcours.

Lorsqu’on évoque les musiques différentes, progressives, on ne pense pas immédiatement à l’Arizona. Existe-il une scène, un public pour ce genre de musique ?
L’Arizona a certainement des avantages et des inconvénients. Mais il y a ici une scène musicale vraiment extraordinaire, avec de nombreux musiciens qui innovent. Le public que nous avons réussi à atteindre, à Phoenix et dans sa banlieue, est constitué de foules incroyablement enthousiastes, qui sautent et chantent avec nous. Il est plus compliqué d’atteindre les fans potentiels, ceux qui ont à faire des trajets d’une heure et demie pour venir à un concert, et il n’y a pas vraiment de salle dédiée aux musiciens locaux. Merci donc à internet et aux auditeurs avertis comme vous !

Votre musique a un côté festif, apporté par les cuivres et les rythmes que vous employez. Les gens dansent-ils à vos concerts ?
Certains dansent mais ici, dans les grands Etats rouges (NdlR : les Etats « rouges » sont républicains, tandis que les « bleus » sont démocrates), on peut être condamné si on danse en public, comme dans le film Footloose… terrible, terrible film. J’aime à penser que nos concerts provoqueront un jour une révolution contre ces règles établies. Les Français dansent-ils bien ? Si c’est le cas, nous viendrons ! Et bien sûr, nous attirerons de charmantes demoiselles !

Vous êtes trop nombreux pour tenir sur les scènes que vous pratiquez habituellement. Avez-vous pour objectif de conquérir le monde pour pouvoir jouer plus à l’aise, dans des stades par exemple ?
La domination du monde a toujours été notre priorité absolue.

Vous êtes autoproduits et autodistribués. Est-ce un choix ou recherchez-vous un label ? Penses-tu qu’il soit encore possible pour un groupe différent, non académique, d’être signé sur un gros label ? Ou l’indépendance est-elle la meilleure option dans le marché de la musique aujourd’hui ?
J’ai envie de croire que les corporations qui oppressent le marché de la musique sont en train de s’effondrer, et que cela redonnera de la valeur à la musique de qualité au détriment de la musique prémâchée. Nous verrons bien. En attendant nous sommes tout seul pour propager l’amour.

Quels sont vos projets immédiats et futurs ?
Davantage de tournées, de musique, de progrès. Et pourquoi pas une vidéo musicale et, bien sûr, venir en France ?

Un dernier mot pour les lecteurs de Progressia ?
N’abandonnez pas à leur sort les oreilles de la masse. La musique artistique et conceptuelle est en train d’imprégner les esprits qui savent écouter autre chose que ce qu’on leur donne à manger. Et si vous pouvez, s’il vous plaît, écoutez notre nouvel album en ligne, visitez notre page Myspace et accompagnez-nous sur le chemin de la Renaissance du Rock.

Propos recueillis par Jean-Phillipe Haas
Photos de Janet Zhou

site web : http://www.captainsqueegee.com/

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