– Tritonales 2006

FESTIVAL : Tritonales 2006

 

Lieu :Le Triton (Paris)
Photos : Fabrice Journo

En ce printemps 2006 un peu groggy, qui s’extrait à grand peine du cocon de glace d’un hiver combien trop long, et qui cuve les soubresauts d’une année riche en émois sociaux, les banderoles des manifestations à peine remisées dans des placards d’où elles ne demanderont qu’à ressortir à la prochaine occasion, l’imperturbable Triton regarde vers l’été, avec détermination. Comme chaque année, désormais, il se prépare aux chauds rayons du soleil en faisant vibrer ses enceintes de la fine fleur du progressif d’hier et de demain.
Et pour cette quatrième édition des Tritonales, devenues LE festival progressif français, le Triton s’est paré de ses plus beaux atours. Car c’est à présent sous les oliviers, les lauriers et les sculptures végétales que l’impatient regarde tranquillement venir à lui l’heure du concert, sirotant distraitement un étrange apéritif sorti des cuves d’El Triton.


25 mai 2006 – Scott Taylor solo – John Greaves « Roxsongs »

L’ouverture de cette quatrième édition des Tritonales revenait à un grand nom de la scène de Canterbury, aujourd’hui revenu des campagnes épiques du progressif pour un rock plus simple et empreint de maturité, et à un loustic loufoque du meilleur acabit.
Scott Taylor entre, seul en scène, maladroitement caché derrière d’épaisses lunettes et arborant un sourire bonasse autant que réjoui. Mais l’air placide du bonhomme ne doit pas tromper. Une fois lancé, accordéon en main, plus rien de l’arrête. A lui seul, armé d’un instrument aussi connoté que l’accordéon, il parvient à tenir une salle pourtant exigeante et convainc plus que largement.
Il faut bien dire d’ailleurs que, malgré le timbre pourtant si particulier de son instrument (ou de ses variantes du type bandonéon, que Scott Taylor utilise pour certains morceaux), jamais la lassitude ne s’installe, tant le registre musical autant que stylistique est varié, entre une bouffonnade, un jeu de mot agréablement idiot, un texte loufoque (car Scott Taylor chante aussi parfois, quand il ne joue pas de la trompette d’une main, l’autre restant sur l’accordéon) et un délire virtuose échevelé. On est parfois proche d’un Monty Python musical, et les rires le disputent aux applaudissements entre chaque morceau.
Au cours de morceaux souvent relativement longs au vu de la pauvreté de l’instrumentation, Scott Taylor rencontre, voire écorne plusieurs styles, n’hésitant devant rien, puisque l’une de ses improvisations délirantes l’amène à … « la Java bleue » chère à nos grands-mères. On se prend souvent à penser, à le voir divaguer d’une association d’idée à une autre, qu’il part loin, bien trop loin pour pouvoir retomber sur ses pattes. Mais il y parvient curieusement toujours, même si c’est parfois au prix d’acrobaties musicales périlleuses.

Suite à ces élucubrations, John Greaves apportait sagesse et sérénité sur la scène, avec son projet « Roxongs », pour lequel le francophile Canterburien s’est entouré de Jef Morin à la guitare, Mathieu Rabaté à la batterie, et de David Lewis et Scott Taylor (encore lui) à la trompette.
Le répertoire dans lequel évolue Roxongs est plutôt loin du passé progressif du bonhomme, puisqu’il va même jusqu’à Brassens, avec une version profondément émouvante de « Saturne », où l’on sent tout l’amour que Greaves porte à l’auteur. Hors cette incursion, on se trouve dans l’ensemble plutôt du côté d’un rock simple mais travaillé, d’une belle maturité.
Toutefois, les premiers morceaux ne sont pas des plus enthousiasmants : l’ensemble est parfois un peu pataud, souvent plutôt froid, et surtout, la voix de Greaves laisse concevoir des inquiétudes sur sa capacité à tenir tout le set. Pourtant, une fois la machine lancée, les choses s’améliorent peu à peu, et Greaves laisse même passer par moments de fortes émotions, auxquelles le timbre, resté un peu rauque, de sa voix, convient en fait fort bien.
On pourra regretter simplement que ce grand bonhomme n’ait pas toujours été épaulé au mieux par les musiciens qui l’entourent : les parties de cuivres et celles de guitare manquaient souvent pour les unes de développement, pour les autres de souplesse dans le phrasé et de cohérence musicale d’ensemble. « Roxongs » contient certes le mot « rock », mais un peu plus de souplesse et de musicalité dans les parties de guitares auraient été les bienvenues, quitte à diminuer le nombre de notes à la minute.
Dans l’ensemble, donc, une soirée d’ouverture du festival de bonne tenue, oscillant entre fou rire et émotion, virtuosité loufoque et concision réfléchie. C’est tout juste si l’on pourra concevoir quelques réserves sur l’équilibre de la formation de John Greaves. Le drame, sans doute, est que lorsqu’on a le passé musical du bonhomme, on est diablement attendu au tournant !

Fanny Layani

31 mai 2006 – Deus Ex Machina

Flashbacks. Juin 2001 : Progressia assiste au concert new-yorkais de Deus Ex Machina à New York. Dans l’enceinte de la Knitting Factory, aux couleurs de Cuneiform ce soir-là puisque le label organisait un festival présentant ses propres groupes, les Italiens avaient fait souffler un vent de folie, avec leur musique hors normes et leur énergie tellurique. Octobre 2002 : le groupe fait l’objet de la première interview parue sur la version numérique de Progressia, à l’occasion de la sortie de Cinque, leur dernier album à ce jour. Novembre 2005 : le concert du groupe aux Tritonales d’automne est annulé, du fait d’un accident de moto d’Alessandro Porreca, le bassiste. Tout ceci pour nous mener à ce 31 mai 2006, date du premier concert à Paris d’un groupe qui compte plus de vingt années d’ancienneté, malgré la relative jeunesse de ses membres (37 ans de moyenne d’âge) !

Deus Ex Machina avait annoncé qu’il enregistrerait le concert pour la sortie d’un DVD l’an prochain. En outre, le groupe a enregistré trois titres au studio du Triton, prises qui viendront peut-être augmenter ce DVD à paraître. Seul point négatif de cette belle soirée, a fortiori dans un contexte d’enregistrement : l’affluence… Une quarantaine de personnes pour pareil évènement, c’est fort peu (pour ne pas dire plus…), et l’enthousiasme de l’assemblée ne suffit pas à faire passer la pilule !
Pourtant, le groupe n’a semblé en avoir que faire, et a proposé avec beaucoup d’énergie son savant mélange, suivant la recette Mahavishnu Orchestra meets l’opéra italien. Car c’est bien de cela qu’il s’agit avec Deus Ex : des lignes de guitares complexes et bavardes, une section rythmique en ébullition et produisant un groove peu commun dans le genre progressif, et un chanteur à la tessiture impressionnante, qui ponctue ses paroles en latin et italien d’envolées lyriques dignes d’un opéra.
C’est « Rhinoceros » qui ouvre le bal, avec son introduction presque funky et les claviers très vintage de Fabrizio Puglisi (Fender Rhodes, orgue Hammond etc…), augmenté d’une partie improvisée précédant l’entrée en jeu d’Alberto Piras, au chant. Deux nouveaux titres (« No » et un autre au titre alambiqué en italien que nous n’avons pas réussi à retenir !) furent ensuite proposés, et sont dans la lignée des compositions du groupe : le premier est un morceau accessible (plus même qu’à l’accoutumée) avec passages calmes au violon et au Fender Rhodes, le second est plus proche des passages instrumentaux complexes des précédents albums, enflammé par le jeu de Claudio Trotta qui use et abuse de sa cloche et de ses roulements de caisse claire ! Un grand moment, « à la Richard Cocciante », un autre « grand produit d’exportation, avec Berlusconi », comme le souligne malicieusement Piras à la fin du morceau !
Après une brève pause, le concert reprend sur un duo basse-guitare aux arpèges qui rappellent tout autant Fripp que Page, rejoint par Alessandro Bonetti au violon, pour un passage plus harmonieux et calme. Juste le temps de lancer « La Fine Del Mondo », au long final digne de Soft Machine, et l’incroyable « Il Pensiero Che Porta Alle Cose Importanti », le morceau de progressif le plus « funky » de tous les temps, conclu par un tellurique solo de batterie de Trotta, plein de sonorités inattendues et de descentes de toms. Le long « Cosmopolitismo Centimetropolitana » suit, où l’on note le chant totalement possédé de Piras, déjà impressionnant sur disque mais qui, dans un contexte de concert, rend plus encore compte de la folie du groupe. Une folie d’ailleurs ce soir un peu en dedans, au profit d’une interprétation plus soignée : le concert auquel nous avions assisté en 2001 était sans doute plus énergique, mais la prestation du Triton fut plus précise dans l’exécution, notamment en ce qui concerne Mauro Collina aux guitares. Quelques nouveaux titres et autres classiques plus tard, Deus Ex Machina revient avec un nouveau « Rhinoceros », sur lequel il se « lâche » plus instrumentalement, pour un résultat encore meilleur que celui atteint lors de la première partie. La demande continue d’un public en transe pour un second rappel ne s’achèvera qu’avec le retour de Piras depuis la porte d’entrée du Triton !

Quelle opportunité de voir ce groupe en concert en France ! Espérons juste que la faible assistance du soir ne laisse pas penser au groupe qu’il n’est pas nécessaire de faire un détour par notre pays la prochaine fois ! Il est cependant heureux que la prochaine parution du groupe garde trace de cette prestation très appliquée de Deus Ex Machina (la première, à l’exception d’une partie du concert au NearFest au milieu des années 90), et des nouveaux morceaux prometteurs qui furent joués.

Djul

1er juin 2006 – Lazuli – Nebelnest

Pour cette soirée présentant une double affiche, c’est Lazuli qui ouvre le bal. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la scène est bien remplie : cette formation, créée il y a huit ans, réunit pas moins de six musiciens et un attirail instrumental impressionnant ! Sous l’impulsion d’un chanteur très charismatique, dix titres très agréables se succèdent et recueillent des vivats d’intensité croissante à mesure que la soirée avance.
Le juste mélange entre technique, poésie et engagement dans les paroles fait que leur troisième album, sur le point de sortir chez Musea, est très attendu par certains dans le public.
Le charme que dégage Lazuli provient de la diversité et de l’originalité des instruments utilisés, notamment la Léode, crée par le fondateur du groupe après qu’il ait été victime d’un grave accident de moto qui l’a privé de l’usage normal de son bras. Avec des sonorités entre la cornemuse, la guitare et le synthétiseur, l’exotisme est au rendez-vous puisque le groupe compte également un stick Chapman et un percussionniste chevronné.
Le concert se termine par un rappel couronné par une véritable orgie autour des deux vibraphones présents sur la scène, chacun s’étant saisi de deux baguettes pour composer un air hypnotique !

Nebelnest prend la relève un peu plus tard. Le contraste avec Lazuli est saisissant : le groupe ne compte que quatre membres. Après une mise en place quelque peu discrète, ils chauffent cependant la salle avec des compositions instrumentales tortueuses. La musique de Nebelnest est urbaine et rugueuse.
Plus le temps passe, plus les thèmes s’effacent au profit des seules structures rythmiques et harmoniques, et ce malgré l’intégration à la formation d’un nouveau guitariste, tout jeune et dont c’est le premier concert ! Dans l’ensemble, la prestation du groupe tient la route, mais l’absence de communication avec le public et l’hermétisme croissant des titres n’aide pas convaincre un public en partie sceptique. Nebelnest gagnerait sans doute à travailler ses relations publiques, et à retrouver le juste équilibre entre thèmes et structures rythmiques qui était perceptible sur Nova Express, le premier album des Rémois.

Sébastien Crépy pour Lazuli, Fanny Layani pour Nebelnest

2 juin 2006 – Tribute to Mahavishnu – « Birds of Fire »

Après Deus Ex Machina qui utilise de façon très personnelle ses influences liées au Mahavishnu Orchestra du grand John Mac Laughlin, c’est au tour de Hugh Hopper, fort bien entouré, de proposer sa version et son interprétation de ce groupe mythique.

Pour ce concert-hommage, celui qui restera sans doute à tout jamais étiqueté « le bassiste de Soft Machine » a fait appel à Patrice Meyer à la guitare, dont Hopper dit qu’il a immédiatement pensé au Français pour ce projet, François Verly aux claviers et piano et Chris Cutler (ex-Henry Cow et Art Bears) à la batterie. On note donc d’emblée que cette formation n’inclut aucun violoniste pour remplacer l’excellent Jerry Goodman (ou Jean-Luc Ponty, pour la seconde période du groupe) à ce poste.
Empruntant son nom à ce qui est sûrement l’album mythique du Mahavishnu Orchestra, le répertoire de ce projet exclusivement live y puise largement, et plus généralement dans les titres du groupe « première mouture » (1971-1974), à l’exception de deux courtes incartades sur le terrain de Visions of the Emerald Beyond (1975) et Inner World (1976), pour composer un concert mémorable. Les amateurs n’ont pu qu’apprécier, tant cette période a fourni de moments inoubliables du jazz-rock fusion.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ces quatre musiciens se sont réappropriés l’héritage de Mahavishnu. Au contraire des excellents Américains du Mahavishnu Project, qui restent fidèles aux compositions du groupe pour les étirer dans des improvisations énergiques très proches de ce que proposait Mc Laughlin dans les années 70, Birds of Fire ne conserve que la base des morceaux et affirme sa personnalité dans l’interprétation même de ceux-ci. Il faut dire que les interprètes en question sont des musiciens au jeu affirmé : Cutler semble autant jouer avec l’air qu’avec sa batterie, créant une rythmique spontanée et jazzy qui semble en perpétuelle improvisation, tandis que Meyer joue de sa guitare comme d’une basse, sans mediator et avec un travail de main droite ahurissant de précision et de rapidité, l’ensemble reposant fermement sur les épaules d’un Hugh Hopper tout en sobriété mais solide comme un roc.
C’est donc avec cette formation plutôt particulière que le quatuor a débuté, avec un planant « Resolution », presque Floydien dans l’esprit. Puis « Eternity’s Breath » prend étonnamment la suite, pour une lente montée jazz se concluant par un clin d’œil très intelligent à « She’s So Heavy » des Beatles ! Le concert se focalise alors sur le fameux Birds of Fire, avec la ballade acoustique « Thousand Island Park », où guitare et piano se font brillamment écho, aidés par quelques à-coups de la basse ronflante de Hopper, et « Hope », en version (très) allongée, qui développe le phrasé majestueux du riff de guitare de l’original.
Le second set démarre sur « Lotus Feet », où les percussions très dansantes assurées par François Verly donnent le tempo à Meyer. Ce dernier reprend sa guitare électrique pour un enchaînement de trois grands classiques du répertoire du Mahavishnu : « Sanctuary » (joué dans une version presque « Rock In Opposition », sous forme d’une lente marche ponctuée par un passage totalement abstrait au piano), un « Miles Beyond » groovy et riant et le boogie-blues « Dance of Maya » (un peu longuet). Le groupe revient après un tonnerre d’applaudissement pour un nouveau « Miles Beyond », qui rallonge encore cette soirée jubilatoire.

Ce concert fut l’illustration de ce que devraient être tous les « hommages » et autres « tributes » aux légendes de la musique : un moyen de se réapproprier un héritage et de mettre en relief sa propre personnalité dans ce cadre. On n’en attendait pas moins venant du quatuor formé par Hugh Hopper, et le public n’a bien entendu pas été déçu. Comble de leur réussite : personne ne s’est demandé où était passé le violon de Jerry Goodman, qui n’a pas manqué un seul instant !

Djul

8 juin 2006 – Cahen/Seffer « Zao Family »

Concert en deux parties ce soir au Triton : d’une part Zao Family, c’est à dire la rencontre improbable entre la partie instrumentale de Zao (Yochk’o Seffer au saxophone, Faton Cahen au piano, Gérard Prévost à la contrebasse et François Causse à la batterie) et un quatuor à cordes (Aude Miller et Roland Arnassalon aux violons, Jean-Philippe Bardon à l’alto et Marie Grémillard au violoncelle), et d’autre part, Zao proprement dit, accompagné de la chanteuse Cynthia Saint-Ville.
La première partie est bien en place, avec un répertoire constitué des morceaux qu’on peut trouver sur l’album Zao Family sorti récemment chez Cristal Records. La sonorisation limpide du Triton met bien en valeur les cordes, même si on peut regretter que François Causse ait utilisé des fagots plutôt que des baguettes, ce qui positionne la batterie très en retrait. L’humeur est manifestement très bonne sur scène, et le plaisir de jouer ensemble est palpable : beaucoup de sourires complices, quelques fous rires.
La seconde partie correspond au répertoire « classique » de Zao, avec des morceaux qu’on retrouve sur les trois premiers albums du groupe. Les répétitions n’ont manifestement pas été légion, d’où quelques moments de flottement. Dommage, d’autant que la prestation de la fabuleuse chanteuse Cynthia Saint-Ville est comme toujours remarquable.

Fabrice Journo

16 juin 2006 – Christophe Godin « Mörglbl trio»

Le Mörglbl Trio de Christophe Godin a-t-il sa place dans un festival de musiques progressives ? Le concert de ce soir en constitue la preuve ! Fidèle au Triton, c’est en habitué des lieux que Christophe Godin joue ce soir ! Que ce soit avec 2G (duo avec Pierre-Jean Gaucher), avec son ancien groupe GNO ou encore avec son dernier projet en date, Metal Kartoon (composé des mêmes musiciens que le Mörglbl Trio auxquels s’ajoute Jérôme Ogier au violon), le guitar hero savoyard est en terrain conquis.

Pour l’avant dernier concert de cette édition 2006, le Triton apporte une touche d’étrangeté dans sa programmation. Ni vraiment metal, ni vraiment progressif, le Mörglbl Trio navigue entre un jazz rock instrumental et expérimental de haute voltige et un rock festif déjanté aux influences diverses. Contrairement à Metal Kartoon, la musique du Mörglbl est un peu plus élitiste et vise un public de musiciens confirmés. Pourtant, la bonne humeur communicative des trois compères en fait une soirée grand public, ce qui est assez rare dans un tel festival.
Le groupe a choisi ce soir de proposer deux sets d’une heure et, comme à son habitude, attaque sur les chapeaux de roues. Malgré un repas un peu trop arrosé (du propre aveu des musiciens), le trio annonce la couleur avec « Scipagnoleg & Bambola » et « Lieutenant Colombin », respectivement tirés du deuxième et premier albums du groupe, où technique et humour font bon ménage. D’emblée le son est impeccable et l’ambiance chaleureuse, deux caractéristiques propres au Triton.
S’ensuit une série de titres inédits, à paraître sur le prochain album du Mörglbl Trio. Avec « Tapas Nocturnes », « Le Projet Pied-de-biche » et le cinglant « Buffet Froid » (en hommage au film culte du même nom), les trois Savoyards prouvent une fois de plus leur penchant pour les « jeux de mots laids pour gens bêtes », mais aussi et avant tout leur talent de composition. En effet, ces nouveaux titres sont plus subtils et efficaces que jamais. Le premier set se termine par une reprise très amusante du « Premier pas » de Claude-Michel Schönberg, au sein de laquelle vient se glisser une leçon de « jazz » (prononcé à la française), aussi hilarante qu’impressionnante.

Après un bol d’air frais, le groupe ressert une série de nouveaux titres comme les excellents « Haute Voltige en Haute Volta », « Février Afghan » et le touchant « Les Petits ‘Nous’ ». Les anciens morceaux sont évidemment de la partie comme les incontournables « Le Fantôme de Savoie » (encore un jeu de mot) et « L’Ami Déglingo ».
Sur ce dernier titre, le groupe a l’habitude de faire venir des invités pour bien plus qu’un boeuf improvisé : il laisse à l’artiste le temps de s’exprimer et de construire son propre univers. C’est donc avec beaucoup d’intérêt que le public connaisseur accueille ce titre. Et ce soir, il est gâté ! Le premier invité, Christophe Rime, guitariste confirmé et directeur d’une école de musique à Tours, vient démontrer l’étendue de son talent sans pour autant en faire un simple déballage technique. Quant au deuxième « invité », il s’agit tout simplement du quatrième membre du groupe quand celui-ci s’appelle Metal Kartoon : monsieur Jérôme Ogier, qui livre comme à son habitude un solo de violon des plus déjantés !
Enfin, vient la grosse surprise de la soirée : ce n’est pas un invité, mais presque un groupe entier qui monte sur scène, puisque les trois quarts de One Shot (seul le claviériste Emmanuel Borghi n’est pas présent) viennent clôturer cette soirée, comme il clôtureront le festival le lendemain. Chaque musicien y va de son solo, puis vient le « duel » entre Christophe Godin et James Mac Gaw. La complicité entre les deux guitaristes est telle que One Shot invitera le Mörglbl Trio à « boeuffer » avec eux le lendemain. Le final « Scouskimegnum » est l’occasion de revoir tous les musiciens sur scène et de finir la soirée dans la joie et la bonne humeur.

Julien Damotte

Puisqu’il faut conclure…

La programmation de ce quatrième festival avait pu étonner, de prime abord. Bien peu de noms ouvertement progressifs, et des « doubles affiches » pouvant sembler parfois étranges dans leur association. Et de fait, ce furent sans doute les Tritonales les plus jazz à ce jour, avec un public parfois sensiblement différent.
Pour autant, cela n’implique pas une moindre qualité d’ensemble, bien au contraire. La fureur et la folie (pas toujours douce) étaient bel et bien au rendez-vous, pour notre plus grand bonheur. En témoignent les fulgurances de Deus Ex Machina ou Médéric Collignon, qui laissèrent à la fois K.O. et heureux plus d’un spectateur pourtant averti !

Toutes les photos illustrant ce reportage sont de Fabrice Journo et peuvent être observées dans de meilleures conditions à cette adresse : http://photos.musicales.free.fr

site web : http://www.letriton.com

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