Minimum Vital – Minimum Vital

INTERVIEW : MINIMUM VITAL

 

Origine : France
Style : rock progressif
Formé en : 1982
Line-up :
Jean-Luc Payssan : guitares
Thierry Payssan : claviers
Sonia Ledelec : chant
Jean-Baptiste Ferracci : chant
Eric Rebeyrol : basse
Didier Ottaviani : batterie
Dernier album : Atlas (2004)


Après sept ans d’absence, les Bordelais de Minimum Vital refont surface en proposant Atlas, leur tout nouvel album. Pendant ce laps de temps, Thierry et Jean-Luc Payssan n’ont pas chômé et se sont consacrés à Vital Duo, un projet semi-acoustique prévu l’affiche du festival Triangle de Sarlat 2004. Les frères évoquent cette expérience et racontent l’élaboration d’Atlas.

Minimum Vital fait son retour sur la scène musicale après sept ans d’absence. Pour nos plus jeunes lecteurs et ceux qui ne vous connaissent pas, pouvez-vous rapidement présenter le groupe ?
Jean-Luc :
Il se trouve justement que Thierry et moi nous sommes récemment rendus compte avec stupeur et émerveillement que nous avions déjà plus de dix-neuf ans d’activités dans cette microscopique, minuscule et marginale goutte d’eau que l’on appelle aujourd’hui le rock progressif (rires).
La base du groupe existe en effet depuis 1982. Elle a duré trois ans sous le nom de Concept, qui est devenu Minimum Vital officiellement en 1985. Le seul membre d’origine toujours présent, à part Thierry et moi, est notre fidèle ami Eric Rebeyrol qui est toujours à la basse. Sur le dernier album, Atlas, nous avons au chant Jean-Baptiste Ferracci et Sonia Nedelec, qui officiaient déjà sur Esprit d’Amor, ainsi que l’excellent Didier Ottaviani à la batterie. C’est vrai que nous avons déjà sept albums derrière nous. Pourtant nous sommes loin d’avoir réalisé tous nos projets ! Nous sommes en fait bien décidés à continuer encore longtemps notre chemin contre vents et marée, en tant que musiciens honnêtes et fidèles à leurs idéaux, même si d’ailleurs ça signifie un jour ne plus composer et jouer de la musique que pour quelques dizaines d’amis.
Ça n’a pas d’importance, nous ne sommes que des artisans. La seule chose qui importe c’est d’être en chemin et de faire partager quelque chose par la musique.

Pendant que Minimum Vital était en pause, vous avez monté tous les deux Vital Duo, projet qui a pris beaucoup d’importance. Pouvez-vous nous en parler ?
Thierry :
Ce projet est effectivement très important pour nous. Ce qui nous paraît étonnant avec le recul, c’est que nous ne l’ayons pas entrepris plus tôt ! Au départ, il s’agissait juste de faire un concert par chez nous, à Bègles, juste tous les deux, afin de voir ce que ça pourrait donner. Et puis il s’est passé quelque chose de magique : nous avons découvert que nous étions complètement immergés dans notre élément vital, notre bulle, je ne sais pas comment l’appeler. Bref, nous étions à notre place, et la musique qui venait était celle qui nous ressemblait le plus, au plus prés de nos racines, de notre source d’inspiration. En plus, nous avons beaucoup progressé grâce à Vital Duo : jouer à deux implique une forte concentration, une écoute respective qu’il est plus difficile de développer dans un groupe. Nous avons appris à mieux gérer l’énergie, le travail des nuances, etc.

Allez vous concilier les deux projets ? Ou mettre Vital Duo en stand-by ? Quelle est votre priorité ?
Jean-Luc :
L’expérience nous a montré qu’il est très difficile, matériellement, de gérer deux structures à la fois. Donc entre l’entité appelée Vital Duo et celle nommée Minimum Vital, il va peut-être bien falloir choisir ! Nous ne savons pas honnêtement de quoi demain sera fait. Cependant, il est clair que nous arrivons à la fin d’un cycle, c’est à dire à l’un de ces moments clé où un groupe doit se renouveler, comme nous l’avons fait juste avant Esprit d’amor. L’expérience Vital Duo a été passionnante. En toute logique, nous allons donc devoir « réinventer Minimum Vital » en y injectant… l’esprit du duo. Ca va être casse-tête mais passionnant !

Parlons d’Atlas. Quel a été le procédé de composition pour cet album ?
Thierry :
la plupart des compositions ont été abordées avec l’idée de prolonger Esprit d’Amor, c’est à dire avec une énergie positive, vivifiante. C’est pour ça qu’il y a ce sous-titre « Vers Un Etat De Joie ». Certaines bases remontent donc à quelques années. Mais nous avons voulu aussi y intégrer quelques éléments particuliers comme Icarus qui est un morceau faussement simple, ou la Ribote, qui est un petit instrumental avec une structure répétitive en 5/4.
Sinon, notre façon de travailler est toujours la même : nous écrivons les parties de chant et basse pour ensuite les retravailler avec les autres, qui apportent aussi leur grain de sel. Après, nous faisons des maquettes de chaque morceau, qui servent de « témoins » pour enregistrer les parties de batterie en studio. Ensuite, c’est un processus normal d’enregistrement de chaque musicien, puis le mixage. Tout ça prend beaucoup de temps !

Quels sont les thèmes qui y sont abordés ?
Jean-Luc :
Il n’y a pas de thème particulier, mais plutôt une démarche, toujours la même en fait. Nous cherchons simplement et humblement à apporter quelque chose de positif à celui qui écoute notre musique. Plus le monde autour de nous devient sombre, plus nous avons cette tendance incontrôlable à chercher une sorte de lumière au-delà des notes.
Un morceau qui résume bien pour moi l’esprit du disque, c’est Icarus. L’image d’Icare, l’homme qui s’est brûlé les ailes en voulant s’élever jusqu’au soleil, m’a toujours fasciné. En quelque sorte, c’est une histoire qui finit mal, puisque Icare a échoué et s’est tué, mais c’est son ascension qui est belle. Cherchez la lumière malgré tout, c’est un peu le message. Finalement, c’est ça qui est important : tenter de s’élever, être en chemin vers quelque chose de supérieur, même si ça ne sert à rien, même si c’est peine perdue. « La foi est plus belle que Dieu » disait Claude Nougaro. C’est un peu notre philosophie.

Vous utilisez dans vos chansons plusieurs langues différentes, dont un langage inventé. Qui a imaginé ce langage ? A-t-il un véritable sens ? Ou est-ce seulement une question de phonétique ?
Thierry :
Non, il n’a pas de sens « littéral ». Le sens est seulement musical. Nous essayons de trouver les sons qui peuvent porter au mieux les mélodies ou l’ambiance du morceau. Ce que j’aime c’est justement le fait que parfois il semble qu’un véritable sens puisse être dégagé : cela relève alors de l’inconscient et de l’imaginaire. L’auditeur trouve alors son propre sens. C’est aussi ce qui se passe en poésie : le pouvoir évocateur des mots ouvre nos portes intérieures.
J’aime aussi l’aspect mystérieux, voire ésotérique d’un texte ou d’un mot intégré dans des sons non signifiants. C’est une façon de mettre en marche ce processus de sensibilisation de l’imaginaire. Je ne sais pas lequel de nous a inventé quoi. Nous faisons ça depuis longtemps, dès que nous avons commencé à faire de la musique, des mots, des sons sont venus. Au départ, il y avait des consonances espagnoles, latines. Ca nous a paru intéressant de creuser la question, car c’est plus original que de chanter en Anglais comme le font tant de groupes français. Vous me direz : dans Atlas il y a un morceau avec de l’anglais. C’est vrai, mais c’est une expérience ponctuelle. Cette langue nous paraissait convenir à l’esprit un peu « Yessien » du morceau.
Pour terminer avec ce langage, j’ai quand même fini par établir une sorte de lexique auquel je me réfère de temps en temps pour écrire de nouveaux textes. La base principale reste tout de même l’improvisation. Souvent, les sons viennent comme ça, et ensuite, nous les retravaillons pour que cela colle au mieux à la musique.

L’une de ces langues a-t-elle votre préférence ?
Jean-Luc :
Non. Nous sommes simplement contents quand ces « onomatopées » collent parfaitement à l’esprit du morceau, à la musique. Parfois, c’est réussi, d’autres fois moins il faut bien le dire. Cela dépend également du chanteur. Par exemple, certaines sonorités collent bien à Jean-Baptiste et Sonia, mais d’autres sont plus adaptées à Thierry et moi. Mais bien évidemment, nous ne leur arrivons pas à la cheville au niveau du chant !

Vous évoquiez tout à l’heure la chanson « Voyage », chantée majoritairement en Anglais. Avez-vous tout de même songé à un album entièrement dans cette langue ? Peut-être pour faciliter l’exportation dans les pays anglo-saxons ?
Thierry :
Pour reprendre ce qui a été évoqué au sujet de notre langage, je dirais qu’à priori cela ne nous intéresse pas trop de faire un album entièrement en Anglais. Quoi que nous fassions, cela sonnera toujours comme des Français essayant de sonner anglais, et ça je trouve que c’est faire preuve de manque de maturité.
Je ne comprend pas que certains groupes français persistent dans cette voie : c’est comme si il y avait une espèce d’admiration béate et un complexe par rapport aux formations anglo-saxonnes. Nous sommes Français que diable ! Avec une culture à nous ! Pourquoi toujours vouloir faire les « clones » de tel ou tel groupe ? Et c’est valable aussi sur le plan strictement musical d’ailleurs. Magma était en ce sens un groupe génial et exemplaire, et ce dès 1969 ! Ange aussi, qui avait lui pris le parti de marier le rock, qu’on n’appelait pas encore « progressif », avec toute la richesse de la langue française. Mais la leçon n’a pas assez porté : beaucoup de groupes en sont encore à jouer les « sosies » malhabiles des groupes anglais.
Je crois que nous avons tous intérêt à développer et accroître nos différences, nos personnalités, voire même nos défauts ! Nous tenons donc à conserver cette spécificité de « langage », même si c’est un langage musical seulement. Si il y a de l’Anglais, ce sera toujours très ponctuel.

Comment avez-vous abordé les claviers sur Atlas ? J’ai l’impression que vous avez d’avantage privilégié les sons plus « classiques »…
Thierry :
Oui, tout à fait, et c’est délibéré. Nous vivons une époque où tout semble avoir été fait, où tous les sons possibles et imaginables ont déjà été entendus, nous baignons en permanence dans un bain de sonorités de toutes sortes, ce qui fait que rien ne surprend plus. A la limite, en tout cas en ce qui me concerne, les sons trop riches, trop sophistiqués non seulement ne me surprennent plus, mais en plus ils me font bâiller ! En réaction à cette déferlante sonore, j’ai tendance à me raccrocher à des « valeurs sûres », et surtout des choses simples.
Je raisonne de façon très basique : le piano, l’orgue, les cordes. Pour les sons lead, j’utilise mes vieux monophoniques, dont le ARP Pro Soloist, et surtout le Korg Sygma. Celui-là, je l’adore ! Il me suit depuis toujours, j’ai vraiment un rapport d’affection et d’amour avec cet instrument. J’adore sa petite flûte toute simple, ou son hautbois pincé qui font des miracles dans un mixage. J’ai d’ailleurs du mal avec la mode des instruments virtuels que l’on installe sur un PC. Je n’arrive pas à m’y faire ! Pour moi, du moment qu’il n’y a pas de rapport physique, tactile, voire corporel avec l’instrument, il y a quelque chose qui cloche. Même si les sons sont très bons, et c’est souvent le cas d’ailleurs en ce qui concerne les imitations de vieux analogiques, ils ne m’intéressent pas. Au risque de paraître ringard, à mon sens un synthé c’est un clavier avec une boite qui a de la matière, que l’on transporte, qui pèse un certain poids, et que l’on branche sur une prise de courant ! Je ne comprend pas pourquoi la tendance dans notre monde actuel est d’éloigner toujours plus les choses de nous mêmes. Demain tout sera virtuel, y compris l’humanité si ça continue !

La mandoline et le cistre sont très présents. Est-ce une des répercussions de Vital Duo ?
Jean-Luc :
Oui. En fait, chez moi, j’ai tout une armada d’instruments à cordes un peu spéciaux : mandoline, mandole, cistre, luth à quatorze cordes. J’adore le grain « ancien » ou « folk » que ces instruments peuvent apporter et je compte utiliser de plus en plus ces lointains cousins de la guitare dans le futur.

L’escapade Vital Duo a-t-elle influencé votre façon de travailler pour Minimum Vital ?
Jean-Luc :
Non, pas pour cet album en fait. Nous avons procédé de la même manière que pour Esprit d’Amor, mais nous avons cependant inclus dans le disque une reprise d’un morceau de Vital Duo, Loué son Nom. Pourtant, une fois réapproprié par le groupe et réarrangé, il ne sonne plus du tout comme du Vital Duo, mais bien comme du Minimum Vital. Je veux dire par là que l’influence du duo n’y apparaît presque plus. C’est curieux, c’est comme si, quoi qu’on fasse, le groupe avait une couleur bien à lui, indépendante presque de notre volonté. Je crois que la synthèse entre les deux formations s’accomplira vraiment dans le prochain opus de Minimum Vital, du moins je l’espère…

Comment s’est déroulé l’enregistrement d’Atlas ? Il me semble qu’il vous a pris pas mal de temps…
Thierry :
Oui, c’est vrai, trop de temps, car il aurait dû sortir bien avant, après le live Au Cercle De Pierre en fait. Mais entre temps, il y a eu Vital Duo, qui n’était pas prévu. Et nous avons fait un album et un DVD quand même avec le duo. Tout ça prend beaucoup de temps quand la musique n’est pas votre activité professionnelle.
En plus, pour Atlas, nous avons fait le choix de devenir autonomes. C’est un album que nous avons réalisé nous mêmes, pour la première fois, avec notre matériel de studio. Je suis donc devenu ingénieur du son en herbe, et j’ai encore beaucoup à apprendre ! Je dois beaucoup aux conseils et expériences de nos travaux avec Bertrand Amable et Jean-Paul Trombert, qui sont, eux, de véritables ingénieurs du son. Cela nous a quand même demandé pas mal d’efforts et de temps. Tout ça explique que l’album ne sorte qu’en 2004.

Quel est votre titre favori de cet album, et pourquoi ?
Jean-Luc :
J’ai déjà parlé du morceau « Icarus ». J’ai également un attachement très fort pour « Atlas ». Ce qui est amusant, c’est qu’il s’agit là d’une vieille composition écrite par Thierry à dix-sept ans, alors qu’on était encore tous les deux au lycée ! A l’époque (1981), c’était ce que nous avions fait de mieux : une espèce de morceau de bravoure typiquement progressif, que nous n’avions pas bien sûr les moyens de jouer en groupe, la pièce étant un peu aventureuse pour nos capacités techniques d’alors ! Aussi l’avons-nous laissé de côté pendant toutes ces années et un peu oublié, jusqu’à ce que je persuade Thierry de le reprendre et de le réarranger. Maintenant que nous l’avons enregistré, j’ai un peu le sentiment d’un vieux rêve réalisé.
Thierry : J’aime bien « Saltarello ». Il est à la fois simple, court, original et festif. J’aimerais bien qu’on arrive à faire tout un album avec ce parti pris d’évidence, avec des arrangements à la fois novateurs et efficaces. A vrai dire j’aime la musique de tous les morceaux, mais j’ai aussi une petite préférence pour « Icarus ».

Vous allez participer à un projet initié par le magazine finlandais Colossus. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Thierry :
Oui, pour l’instant ce projet nous occupe à fond. Il s’agit d’un projet ambitieux consistant à réunir neuf groupes autour du thème de l’Odyssée d’Homère ; chaque groupe doit illustrer par un morceau d’une durée de vingt à vingt-cinq minutes un des neuf chapitres qui relatent les aventures d’Ulysse. Les quelques vingt-huit chants qui composent ce poème épique – qui est le premier roman d’aventure de l’humanité – ont été divisés en neuf chapitres par Colossus. Nous avons travaillé sur le chapitre huit, qui se situe au moment où Ulysse est arrivé déguisé en mendiant dans sa propre maison, et rumine sa vengeance contre les Prétendants qui pillent ses biens [NdRC : après la Guerre de Troie et dix ans d’errance et d’épreuves pour avoir contrarié les Dieux, Ulysse revient à son royaume d’Ithaque. Pénélope, sa femme, est assaillie par nombre de prétendants au trône qui, pensant Ulysse mort, ont depuis longtemps compris qu’en épousant la reine, ils prendront la place du roi pour peu que cela se produise avant l’accession de Télémaque, fils d’Ulysse. En attendant ce moment, ils abusent de l’absence du maître de maison qu’ils complotent de tuer si jamais il reparaissait un jour].
Au départ ce n’était pas évident de trouver le lien musical. Finalement, cette trame nous a permis de faire émerger une pièce de musique en trois parties comportant quatre mouvements qui illustrent chacun une des situations qui se succèdent dans l’histoire. Mais attention, il ne s’agit pas non plus de faire de la musique « descriptive ». Ces situations ont en fait servies de prétextes pour développer quelque chose. Je crois que le résultat n’est pas mal. Nous avons prévu d’enregistrer la batterie début juin, sachant que le morceau doit être fini pour fin décembre 2004, en vue d’une sortie du coffret début 2005.

Quels sont vos autres projets à venir ? Des concerts en perspective ?
Jean-Luc :
Après Odyssée, j’ai hâte de finaliser un projet d’album solo auquel je pense déjà depuis plusieurs années. Tout ce que je peux dire, c’est que ce ne sera pas du sous-Vital Duo, encore moins du sous-Minimum Vital, mais un disque totalement acoustique faisant la part belle à la guitare classique et au théorbe, qui est une sorte de luth baroque très en vogue au 17° siècle. Ce sera sans doute notre prochaine sortie discographique… à moins que Thierry ne me séquestre pour me forcer à travailler plutôt sur le nouveau Minimum Vital (rires) !
Nous nous occupons aussi en ce moment de la réédition chez Muséa de deux albums fabuleux qui n’ont jamais été publiés en CD. Il s’agit de Climage et de Memento, les deux albums solo du guitariste Philippe Cauvin. Philippe Cauvin a officié dans les années soixante-dix et quatre-vingt au cœur du mythique trio Uppsala, groupe à la croisée du jazz-rock, de la musique contemporaine et du rock progressif. Mais il est surtout un compositeur unique, incomparable, de la taille d’un Christian Vander. Il a totalement réinventé son instrument, la guitare classique, et a été beaucoup plus loin dans ce domaine qu’un Steve Hackett par exemple. Cette réédition est programmée pour avril ou mai. Pour ce qui est des concerts, Vital Duo jouera au festival de Sarlat le samedi 22 mai 2004.

La scène progressive française d’aujourd’hui à l’air de retrouver une certaine vigueur. Qu’en pensez-vous ?
Thierry :
Oui, il y a effectivement beaucoup de groupes qui émergent. Certains développent quelque chose de personnel, comme – et je vais en oublier ! – Nil, Taal, XII Alfonso, Antheos, Priam, Sombre Reptile, etc. Par contre le public ne croît pas non plus pour autant. Il se trouve qu’aujourd’hui il est plus facile qu’avant de présenter sa musique, donc il y a beaucoup de disques qui sortent. Peut être même trop, car l’offre est nettement supérieure à la demande ! D’un autre côté, il est bon que des artistes puissent aller au bout de leurs idées et présentent leurs travaux.
Mais je suis un peu perplexe quant à savoir où tout cela va nous mener. La « déculturisation » et l’abêtissement des masses atteignent depuis quelques années des sommets effrayants. Les coups portés au peu de culture encore vivante n’ont jamais été aussi forts. Franchement, je ne sais pas où nous allons dans ce monde où tout semble s’accélérer pour le meilleur, mais surtout pour le pire ! Je sais, c’est pessimiste. Mais c’est justement en réaction contre ça que notre musique, elle, est optimiste !

Qu’est-ce que vous écoutez en ce moment ?
Jean-Luc :
je suis un vrai mélomane et je passe des heures à écouter uniquement de la musique classique. Je vais vous étonner, mais ma discothèque personnelle est largement plus fournie en opéra, musique baroque et médiévale, qu’en rock. La musique ancienne surtout, est vraiment une drogue pour moi, ainsi que certains compositeurs contemporains. En ce moment j’écoute une œuvre sublime : un opéra de Paul Hindemith (1895-1963) qui s’appelle Mathis der Maler – Mathis le peintre -, pas difficile d’accès comme pourraient le craindre des auditeurs non initiés, et que je recommande sans problème aux amateurs de rock progressif.
Sinon en musique « moderne », pas mal de David Bowie actuellement et aussi le regretté Claude Nougaro. Mais c’est vrai, j’avoue ne pas pouvoir survivre bien longtemps sans remettre quotidiennement un vieux Yes, Genesis, Gentle Giant ou Magma dans ma platine ! Cette musique est vraiment indémodable, universelle, éternelle.
Thierry : j’ai les mêmes goûts que Jean-Luc, mais moins de disques que lui ! J’écoute souvent de la musique ancienne ou contemporaine, des compositeurs comme Jean Langlais, Jehan Alain, Messiaen, qui ont écrit des pièces superbes pour orgue. J’ai un ami qui m’a fait découvrir Porcupine Tree, parmi les nouveaux ténors anglais de la progressive music. Récemment, un musicien dont j’ai fait la connaissance via le net m’a envoyé son disque. Il s’appelle Fabien Lo Cicero. Il a découvert Vital Duo et Minimum Vital et me fait découvrir en retour son travail. Je trouve ça sympa, d’autant que ce n’est pas du tout du rock progressif, mais justement ça fait du bien et c’est très bien réalisé !

Avez-vous quelque chose à ajouter à cette interview ? Peut-être un petit mot pour nos lecteurs ?
Thierry :
oui, je voulais remercier simplement les gens qui nous envoient de temps en temps un petit message d’encouragement. Nous faisons notre musique de façon humble et artisanale, et nous sommes tout à fait conscients du fait qu’il est de plus en plus difficile d’avoir une reconnaissance, fût elle minime, dans un monde avec lequel nous ne sommes décidément pas « en résonance », d’ailleurs, ceci explique cela. C’est pourquoi ce genre de message présente dans ce contexte un caractère particulièrement fort pour nous. Merci donc !

Propos recueillis par Greg Filibert
Photos de Gilles Pialat

site web : http://perso.frogprog.mageos.com/LaSource_FR.html

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