S. Beard & Enchant – S. Beard & Enchant

INTERVIEW : SPOCK’S BEARD / ENCHANT

 

Origine : Etats-Unis
Style : Rock progressif Formés en : 1995 – Spock’s Beard, 1990 – Enchant Derniers albums : Feel Euphoria (2003) – Spock’s Beard, Tug Of War (2003) – Enchant


Ce n’est pas tous les jours que deux groupes de cette qualité tournent ensemble, encore moins en Europe. A cette occasion, Progressia a pu réaliser une interview commune et, pour marquer le coup, soumettre les deux parties à un petit test en aveugle, réalisé dans des conditions inhabituelles dans les coulisses de l’Elysée Montmartre à moins d’une demi heure de l’entrée en scène d’Enchant. Cela n’a pas empêché les deux groupes de jouer le jeu jusqu’au bout.

Progressia : Quels sont vos commentaires sur cette tournée ?
Doug Ott :
Tout se passe pour le mieux, nous prenons vraiment notre pied, on essaie d’en profiter au maximum, surtout pour Enchant. Nous ne sommes pas venus en France depuis cinq longues années, et nous sommes donc plus qu’heureux de revenir.
Alan Morse : Je ne vois pas grand chose à ajouter, l’ambiance est vraiment excellente. Les gars d’Enchant sont comme des frères et tourner à nouveau avec eux est un vrai plaisir, que nous avions déjà connu il y a cinq ans. Nous sommes ravis de remettre ça.

Enchant et Spock’s Beard ont déjà joué à plusieurs reprises à Paris. Quels souvenirs gardez-vous de vos précédents passages dans notre capitale ?
Doug Ott :
Je ne garde que des souvenirs positifs des concerts d’Enchant à Paris. Notre premier concert a eu lieu en 1993, peu après la sortie de A Blueprint Of The World, mais j’ai oublié le nom de la salle (NdDan : le Club Dunois). En 1998, nous étions venus avec Spock’s Beard, cette fois-ci à l’Arapaho… Cette salle est un cauchemar à elle toute seule ! (NdRC : devenue depuis le Barachois, la programmation est désormais plus orientée clubbing)
Alan Morse (à Doug) : Tu m’étonnes ! Ce satané pilier au milieu de la fosse a réussi à me foutre le concert en l’air.
Doug : Quelques semaines après, nous sommes revenus avec Marillion, ici même à l’Elysée Montmartre et là, c’était tout autre chose. Quelle soirée ! La salle était comble et la réaction du public de Marillion nous a tous bluffés !
Alan : C’est vrai que Paris a toujours eu une place particulière dans notre cœur. Lorsque nous avons joué au Divan du Monde en 1999, je me souviens que nous étions obligés de nous plier à des restrictions sonores. C’était chaotique quand j’y repense (Rires). Aujourd’hui j’en ris, mais ce n’est jamais amusant d’être confronté à ce genre de situations. Mais le meilleur concert de Spock’s Beard en France reste celui que nous avons fait en ouverture de Dream Theater en 2000 au Zénith ! Mon dieu, je n’en revenais pas de voir autant de monde !

Vos groupes respectifs ont sorti chacun un album cette année. Quels sont les commentaires que vous avez reçus ?
Doug :
Nous n’avons pas encore reçu de menaces de mort pour le moment (Rires) ! Plus sérieusement, les choses ont l’air de plutôt bien marcher, à en juger par l’activité qu’il y a sur notre forum. Nous le regardions il y a quelques heures depuis un cybercafé et nos fans nord-américains nous réclament une tournée aux Etats-Unis. Mais c’est très difficile à mettre en place.
Alan : En ce qui nous concerne, les choses sont un peu différentes. Nous venons comme vous le savez de tourner une page importante de notre histoire (NdRC : Neil Morse, grand contributeur et meneur du groupe a en effet quitté ses camarades sous une impulsion spirituelle. Voir notre article à ce sujet). Malgré cela, il semblerait que Feel Euphoria ait été plutôt bien accueilli. Il est clair qu’il y a désormais un schisme entre les fans purs et durs et ceux qui acceptent d’être plus ouverts. Mais malgré cela, nous avons un feedback relativement positif.

La transition est toute trouvée pour parler d’un sujet délicat. Alan, as-tu des nouvelles récentes de Neal ? Avez-vous eu l’occasion de jeter une oreille sur Testimony ?
Alan : Des nouvelles de Neal ? L’autre jour, je l’ai croisé chez ma mère (Rires). Blague à part, je suis bien sûr souvent en contact avec lui, je suis quand même son frère. J’ai effectivement écouté Testimony et je trouve qu’il y a de très bonnes choses dessus.

Beaucoup de gens pensent que cet album aurait dû ou pu être le prochain album du Beard ? Vous devez trouver ça agaçant à la longue ?
Alan : Comme je le disais, il y a eu une cassure, qui était inévitable, entre nos fans. Je crois qu’on ne peut pas plaire à tout le monde. Je sais pertinemment que certains refuseront d’écouter Feel Euphoria sous prétexte qu’il n’y a plus Neal, mais tant pis, nous ne nous arrêterons pas à cause de cela. Une fois encore, les critiques que nous avons entendues ou lues sont très positives, et je pense sincèrement que sortir cet album était la meilleure réponse que nous pouvions apporter à ceux qui nous considéraient comme morts et enterrés. J’exagère un peu, mais certains se demandaient si nous existions encore. La réponse est claire aujourd’hui, nous sommes là et je peux te dire que ce soir nous allons donner un grand concert !

Queen – “The Prophet’s Song“, extrait de A Night At The Opera

Doug : Je ne vois pas du tout de qui il peut bien s’agir…
Alan : Moi non plus !
Ted Leonard : La structure de cette chanson me rappelle beaucoup Spock’s Beard…
Nick D’Virgilio : C’est du Queen, je reconnais la voie de Freddie… mais je sèche sur le nom de l’album.
Doug : Demande à Ed, c’est le spécialiste de Queen chez Enchant. (Rires) Jimmy Keegan : Je crois que ce titre est sur Innuendo

Non, il s’agit de “The Prophet’s Song“, qui est extrait de A Night At The Opera. C’est le titre le plus progressif jamais écrit par le groupe.
Alan : Ça y est, je me souviens maintenant, ce qui m’avait marqué dans ce titre – que je n’avais pas écouté depuis des années – c’est cet enchevêtrement d’harmonies vocales en canon, suivies d’une montée en puissance pour s’achever sur un superbe solo de Brian May. J’avais trouvé ça génial. D’ailleurs je trouve toujours ça génial. Et c’est vrai qu’on abuse un peu de ce genre de procédés dans Spock’s Beard !(Rires)
Doug : Je ne sais pas pourquoi mais j’ai toujours préféré A Day At The Races. J’adore Queen, mais j’étais bien trop jeune pour prendre pleinement conscience de l’impact qu’allait avoir cet album à sa sortie en 1975. En fait, j’ai débuté mon apprentissage de fan de Queen, si je puis dire, en 1979 avec Live Killers.

Genesis – “Ripples“, extrait de A Trick Of A Tail

Nick D’Virgilio : (après moins de dix secondes) Genesis, « Ripples » ! Un de mes titres préférés, sur un de nos albums préférés.



On parle souvent d’une déchéance de Genesis après la sortie de Calling All Stations. Qu’est ce que cela vous inspire ?

Nick : Déchéance ? Quelle déchéance ? Je ne vois vraiment pas quelle déchéance a subi Genesis ! C’est totalement infondé ! Soyons sérieux, peux-tu me dire ce qu’attendaient les fans avec cet album ? Un clone de Selling England By The Pound ou bien une resucée de The Lamb Lies Down On Broadway ? Genesis a superbement évolué à travers sa carrière, ils ont vendu des millions de disques et ils se portent très bien. Ils sont arrivés à un point où, artistiquement, ils peuvent aller là où ils veulent. Ceci dit, je n’ai encore jamais rencontré quelqu’un qui apprécie autant A Trick Of A Tail et Invisible Touch (Rires).

Rush – « Virtuality », extrait de Test For Echo

Doug : Wow, ça c’est du riff ! C’est surpuissant ! C’est Rush, un extrait de Counterparts
Sean Flanegan : Non, c’est « Virtuality », extrait de Test For Echo !


Quelle est votre “période“ préférée chez Rush ?
Doug : Mon album favori est Power Windows, mais la période où j’ai le plus apprécié Rush est celle qui a suivi le live All The World’s A Stage, ce qui correspond donc à des albums comme Permanent Waves ou Moving Pictures
Nick : Je n’ai jamais été fan de Rush. Bien sûr, ces types ont marqué l’histoire du rock progressif, mais je n’ai jamais été accro. Je me souviens que mon frère avait ramené Hemispheres à la maison. J’ai trouvé ça bien sur le moment, mais après j’ai dévié vers Yes et ELO… Je cherchais quelque chose de plus cool en fait.

Pain Of Salvation – “Used“, extrait de The Perfect Element

Alan : c’est très heavy !
Nick : Ça ressemble à Faith No More…
Doug : Non, c’est beaucoup trop sombre pour que ce soit Faith No More.
Ce ne serait pas System Of A Down ou Linkin Park?
Alan : Ce refrain est l’un des plus audacieux que j’ai entendu ces derniers temps, et c’est finement joué !
Doug : J’ai reconnu : c’est Pain Of Salvation. Un sacré groupe !

Beaucoup considèrent Pain of Salvation comme l’un des nouveaux leaders de la scène metal progressive actuelle. Qu’en pensez-vous ?
Doug :Ces gens ont en partie raison, Pain Of Salvation est tellement original. J’ai rencontré Daniel Gildenlöw il y a peu, ce type est super. Non seulement il est adorable mais c’est un mec bourré de talent. Il y a une finesse chez Pain of Salvation que j’ai rarement vue ailleurs.

Porcupine Tree – “The Sound Of Muzzak“, extrait de In Absentia

Nick (en moins de deux secondes) : Porcupine Tree, je suis fan absolu…
Doug : Je connais Porcupine Tree, j’ai deux albums d’eux et je les apprécie.

Pour un grand nombre de nos lecteurs, les nouveaux leaders de la scène progressive sont des groupes comme Porcupine Tree, Pain Of Salvation, mais aussi, dans une moindre mesure, Muse et Radiohead pour le coté expérimental de leur musique. Êtes-vous d’accord avec cette assimilation ?
Doug : Pour être honnête, je ne connais ni Radiohead ni Muse.
Nick : Pour moi, Radiohead est un groupe de rock progressif. Je pense qu’ils font partie de ces groupes comme Tears For Fears, qui ne se réclament pas du rock progressif mais qui ont des points de convergence nets avec le genre, sans être forcément très techniques pour autant. Cette remarque est également valable pour Porcupine Tree qui a une démarche plus “floydesque“.

Frank Zappa – “Stick It Out“, extrait de Joe’s Garage, Acts I, II and III

Nick (en moins de deux secondes) : Frank Zappa, Joe’s Garage, (NdDan : À ce moment-là, Nick danse tout en chantant le texte de la chanson. Afin d’éviter tout problème avec les éventuelles âmes sensibles qui liraient cette interview, nous ne le reproduiront pas ici). Je pourrais la chanter en entier celle-là ! (Rires)

Il y a un grand débat sur Zappa : sa musique est-elle progressive ou non ?
Nick : Frank Zappa domine tout ! Il excelle dans tous les styles.
Doug : Zappa était tellement avant-gardiste !
Jimmy : Il n’avait aucune limite, il faisait ce qu’il voulait et se foutait royalement du reste. Non seulement il n’avait aucune règle mais surtout, il n’obéissait à aucune règle. C’est le genre d’artiste qui refusait de se compromettre.

Weird Al Yankovic – “Bohemian Polka“, extrait de Bad Hair Day

Nous nous sommes dits que nous pourrions peut-être terminer ce blind-test sur une note un peu plus amusante…

Doug : On connaît la chanson mais ce n’est certainement pas Queen.
Doug et Jimmy (en même temps) : Oh mon dieu, c’est Weird Al Yankovic ! Excellent ! (S’ensuit une longue crise de fou rire entre les deux parties). On est tous fans de Weird Al !
Jimmy : Ce qu’il y a de marrant avec ce gars, c’est qu’au delà du coté facétieux du personnage et ses parodies, il est entouré d’excellents musiciens.

Nos remerciements à Jimmy Keegan pour la mise à notre disposition de son ordinateur.

Propos recueillis par Dan Tordjman

sites web :
http://www.theoasis.cchttp://www.spocksbeard.com

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